Les voyagistes africains réunis au sein de la Fédération inter-Etats des syndicats des agences de voyages et de tourisme de l’Afrique de l’Ouest et du Centre (Fisavet/Aoc), ont vivement rejeté l’instauration par la compagnie aérienne Air France d’un nouveau mode de rémunération calqué sur le système européen qui aurait des répercussions socio économiques catastrophiques. Ce mode de rémunération qui supprime les commissions des voyagistes entraînerait la fermeture de 70% des agences de voyages du continent et la suppression de 3000 à 5000 emplois.
Un épais brouillard s’est installé dans le ciel des relations entre la compagnie aérienne Air France et les agences de voyages africaines, suite à l’annonce par le transporteur français de la suppression à compter du mois de juin 2008 des commissions dues aux voyagistes.
Réunie en assemblée extraordinaire à Abidjan, en Côte-d’Ivoire, le 21 mai dernier, la Fédération inter Etats des syndicats des agences de voyages et de tourisme de l’Afrique de l’Ouest et du centre (Fisavet/Aoc) ont mis en place une commission ad hoc chargée de discuter de cette nouvelle norme de rémunération à Paris, en France, le 18 juin prochain. Le président du Savoga, Modeste Mvouri, a notamment été retenu dans les rangs de cette commission.
Rabaissée à 7 % après avoir culminé à 9 % il y a une dizaine d’années, la commission des agences de voyages africaines pourrait aujourd’hui être supprimée pour s’aligner sur le nouveau modèle de rémunération appliqué dans les pays occidentaux.
Si ce système s’érige en norme internationale, il s’annonce totalement «inadapté à l’environnement africain» explique le président de la Fisavet/Aoc, Emmanuel Ngassa Happi.
Les voyagistes, qui seraient contraints de se contenter des frais de service facturés aux clients, ont mis en garde contre les graves conséquences socio économiques qu’entraînerait une telle décision. La Fisavet/Aoc annonce non seulement une hausse généralisée des tarifs mais également la fermeture de 70% des agences de voyages et la suppression de 3000 à 5000 emplois.
«Ce nouveau mode de rémunération (…) ne tient compte ni des intérêts des agences de voyages, ni des spécificités des économies de nos pays africains C’est un abus de position dominante qui va provoquer un renchérissement significatif des coûts des billets d’avion. Ce qui serait dommageable pour nos populations qui croulent sous le poids d’une vie de plus en plus chère», s’est insurgé monsieur Ngassa Happi.
«Si Air France persiste, nous nous réservons le droit de l’attaquer en justice» a poursuivi le président du Fisavet/Aoc.
Ce type de procédure judiciaire avait été expérimenté courant 2004 par les agences de voyages sénégalaises avec succès après qu’Air France eut réduit leur rémunération de 9 % à 7 %. A Dakar, le Conseil d’Etat avait condamné la compagnie à reverser aux agences le manque à gagner assorti de dommages et intérêts.
Alors que les responsables d’Air France mettent en avant des difficultés financières, monsieur Ngassa Happi affirme qu’«Air France réalise d’importants bénéfices, particulièrement en Afrique, et applique systématiquement la surcharge carburant pour atténuer ses charges et qui ne profitent nullement aux agences de voyages».
En revanche, la compagnie marocaine Royal Air Maroc a créé une lueur d’espoir en se proposant, au terme des entretiens entre le directeur du pôle Afrique, Mourad El Kanabi, et Modeste Mvouri, du 2 au 8 juin derniers, de doubler la commission des voyagistes en la portant à 15%.
En soufflant sur le nuage noir du géant français, Royal Air Maroc pourrait prendre le contrôle d’une grande partie du ciel africain au détriment de la compagnie aérienne française qui risque une grosse part de marché dans cette affaire.