Le président burkinabè et facilitateur de la crise ivoirienne Blaise Compaoré est à Abidjan pour tenter de trouver une sortie de crise. Pendant ce temps-là, les manifestations continuent dans les rues, où la violence a de nouveau éclaté, faisant deux morts à Daloa.
Le président burkinabè et facilitateur de la crise ivoirienne Blaise Compaoré est arrivé à Abidjan ce lundi 22 février à la mi-journée pour rencontrer l’exécutif et l’opposition ivoirienne. En marge de ce sommet préparé « en urgence », de violentes manifestations ont éclaté, faisant de nouvelles victimes.
Deux personnes sont mortes et treize ont été blessées dans des violences à Daloa, dans l’ouest du pays, où des manifestants ont affrontés les forces de l’ordre, a-t-on appris auprès du Comité international de la Croix-Rouge (CICR). L’opposition avait organisé une journée « ville morte » contre le président Laurent Gbagbo.
Répondant à l’appel de leurs chefs à contrer « par tout moyen » le pouvoir en place, des opposants ont continué d’organiser à travers le pays des manifestations. A Abobo, quartier populaire du nord d’Abidjan dirigé par le Rassemblement des républicains (RDR) d’Alassane Ouattara, deux policiers ont été « blessés par balles » par « des individus non identifiés », selon la police.
Un membre du personnel médical a affirmé avoir vu un civil étendu sur le sol et « très mal en point », puis pris en charge par une ambulance. Des échauffourées y avaient dans la matinée opposé aux forces de l’ordre des jeunes qui avaient érigé des barricades, incendié des pneus et jeté des pierres sur la police. Un responsable local d’opposition a cependant assuré qu’il n’y avait pas eu de « mot d’ordre » et évoqué un « mouvement populaire ».
A Katiola (centre), des jeunes ont « saccagé » le domicile du porte-parole du chef de l’Etat, Gervais Coulibaly, et « tenté de brûler » le siège local du Front populaire ivoirien (FPI, parti présidentiel), a indiqué Martin Yao Touré, directeur local de campagne du candidat Gbagbo.
Dans la ville de Gagnoa, ces tensions ont tourné au cauchemar vendredi 20 février : 5 personnes ont été tuées par balles lors d’échauffourées qui ont opposé les militants de l’opposition aux forces de défense et de sécurité. Celles-ci ont, pour la première fois depuis le début des troubles, fait usage de leurs armes à feu sur la foule.
De consultation en consultation
Le sommet prévu « en urgence » devait réunir à Abidjan le Cadre permanent de concertation (CPC*) sous l’égide du facilitateur Blaise Compaoré. Ce dernier a été accueilli à son arrivée par le président Laurent Gbagbo et le Premier ministre Guillaume Soro. Ces entretiens devaient être suivis d’une nouvelle rencontre avec les opposants Henri Konan Bédié et Alassane Ouattara, avec lesquels le médiateur s’est déjà entretenu dimanche à Ouagadougou, sans succès.
En fin de journée, Blaise Compaoré devait encore consulter les ambassadeurs français, américain et nigérian ainsi que le représentant de la Commission européenne. Blaise Compaoré doit également rencontrer le chef de l’Opération des Nations unies en Côte d’Ivoire (Onuci) Choi Young-jin.
L’objectif de ce sommet est d’aborder la « question de fond du processus électoral », a indiqué le numéro un burkinabè.
L’ancien président Henri Konan Bédié et l’ex-Premier ministre Alassane Ouattara s’étaient déjà rendus à Ouagadougou dimanche pour rencontrer Blaise Compaoré, mais les réunions qui s’y étaient déroulées n’avaient pas suffi à débloquer la situation.
Guillaume Soro tente, sans succès jusqu’à présent, de former un nouveau gouvernement comprenant des ministres du Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (RHDP, opposition) après la dissolution fracassante du cabinet précédent, vendredi 12 février. Dimanche soir, l’entourage de Guillaume Soro maintenait la date du lundi 22 février pour l’annonce de la nouvelle équipe.
Blocage sur la CEI
Mais le RHDP refuse toujours de prendre des responsabilités gouvernementales tant que Laurent Gbagbo ne rétablira pas la Commission électorale indépendante (CEI) dissoute le 12 février en même temps que le gouvernement.
Celle-ci était jusque-là dominée par l’opposition, mais son ancien président, Robert Beugré Mambé, est accusé de tentatives de fraudes dans l’établissement des listes électorales par le camp Gbagbo .
Dans ce climat tendu, tant entre les leaders politiques que dans la rue, la diffusion de la chaîne France 24 a été « suspendue » lundi dans le pays pour « traitement non professionnel de l’information » concernant « l’actualité politique » ivoirienne récente, a annoncé l’organe de régulation.
La direction de France 24 a dit « regretter » une décision qui « lui paraît injustifiée ».
*Le CPC regroupe le président Laurent Gbagbo, le Premier ministre reconduit Guillaume Soro ainsi que les opposants Henri Konan Bédié et Alassane Ouattara.