L’arrivée au Gabon du président français, Nicolas Sarkozy, n’a pas fait l’unanimité au sein de la population. Partis de l’opposition, société civile et diaspora ont vivement dénoncé cette visite dans des réquisitoires qui peinent à cacher les plaies béantes laissées par la dernière élection présidentielle et la prétendue implication de la France dans celle-ci.
«M. le Président (…) vous n’êtes pas le bienvenu», écrit sèchement Marc Ona, leader de la société civile gabonaise, dans sa lettre ouverte dénonçant la visite du président français Nicolas Sarkozy.
Même son de cloche du côté du Mouvement pour le redressement national (MORENA), dinosaure de l’opposition locale, de certaines associations de la diaspora gabonaise et plusieurs poids lourds de la société civile, qui ont réagi avec véhémence face à cette nouvelle visite de Sarkozy au Gabon, la troisième en moins de trois ans.
«Comme vos prédécesseurs vous continuez à maintenir à la tête de notre pays des traîtres à la Nation dont aucun Gabonais sincère ne veut plus depuis des décennies. Nous comprenons, que pour vous, les intérêts de vos amis de la bourgeoisie d’affaires française sont autrement supérieurs à la vie et au destin du peuple gabonais», poursuit la lettre ouverte signée par Marc Ona et Grégory Mintsa.
«C’est pourquoi dans le sillage de tous vos déplacements vous emportez toujours la vermine, VRP d’Areva, de Bolloré, de Total et autres esclavagistes infâmes appuyés par la gouaille de Bernard Kouchner», concluent-ils sans ambages.
Dénonçant le «silence coupable» des autorités françaises sur les irrégularités dénoncées lors du scrutin présidentiel du 30 août dernier, la Diaspora gabonaise unie (DIAGAU) se demande également si «le président français pratique une diplomatie à deux vitesses en comparant la Guinée du Capitaine Dadis Moussa Camara au Gabon d’Ali Bongo Ondimba, tous pourtant auteurs de tueries importantes respectivement le 28 septembre 2009 à Conakry et le 3 septembre 2009 à Port-Gentil ?».
«La Diaspora gabonaise unie dénonce vivement le voyage officiel du président Sarkozy au Gabon dont le but est de consacrer un pouvoir putschiste», conclu le communiqué de la DIAGAU.
Même Greenpeace dénonce un «Nicolas Sarkozy en VRP de l’exploitation des forêts tropicales», affirmant que «la France continue de promouvoir la destruction des forêts en soutenant financièrement les industriels du bois dans le bassin du Congo».
«Le bassin du Congo est le deuxième massif de forêts tropicales après l’Amazonie. Sur 150 millions d’hectares de forêts denses, 39 millions sont sous concessions forestières. Pourtant, les rentrées fiscales des cinq pays concernés ne s’élevaient qu’à 119 millions d’euros, soit environ 3 euros par hectares en 2007. Pour chaque mètre cube de bois, qui vaut plusieurs centaines d’euros, quelle somme revient au développement rural local ?», s’interroge encore l’ONG environnementale.
Mettant en exergue les points historiques saillants de l’instauration d’une relation «néocoloniale» entre la France et le Gabon, le président du MORENA, Luc Bengone Nsi, a exhorté le président français à mettre en application ses promesses de rupture annoncées tambour battant depuis plusieurs années.
Du côté de la nouvelle alliance de l’opposition gabonaise, l’Union nationale, on a choisi une méthode moins cavalière, et peut-être plus constructive, en demandant un entretien au président français, au cours duquel un document commun lui sera remis.