Pierre Claver Zeng Ebome est décédé à Paris dans la nuit du 18 au 19 mai 2010. Récemment désigné par la presse comme un « crooner politicien », il a bercé en effet le Gabon de ses compositions musicales durant trois décennies. Loyal jusqu’au bout avec le défunt président Bongo, il est reparti dans l’opposition à la mort de celui-ci et était l’un des membres fondateurs de l’Union nationale (UN), nouveau parti de l’opposition. Le parcours d’un artiste et homme politique atypique…
Pierre Claver Zeng Ebome est né le 18 septembre 1953 à Ekouasse, dans la province du Woleu-Ntem dans le nord du Gabon. Après son enseignement primaire et secondaire à Oyem, il a poursuivi son cursus au Lycée technique Omar Bongo puis à l’Université Omar Bongo à Libreville. Titulaire d’une maîtrise en Droit, il est entré à l’Ecole nationale des services du Trésor, en France, et est devenu inspecteur central du Trésor à son retour au Gabon en 1985.
Entre temps, depuis le milieu des années 70, il s’est illustré comme l’un des chanteurs phare du Gabon et l’est resté, même si sa carrière artistique s’est estompée avec son entrée en politique. Il n’en a pas moins laissé huit albums et cinq 45 tours. De la centaine de chansons qu’il a composé (publiées ou non), on se souviendra, entre autres, de « Assoum », « Bibulu », « Bidiza », « Eya Moan », « Ekang Ye Ngom », « Essap », « Moan Essogha », « Mvele », « Nkoum Ekeung ».
L’œuvre musicale de Zeng Ebome a notamment fait l’objet d’un ouvrage publié chez l’Harmattan sous le titre « Pierre-Claver Zeng et l’Art poétique Fang : Esquisse d’une herméneutique », écrit par Marc Mvé Békalé, enseignant chercheur à l’université de Reims.
«Il aura marqué les gens de part la quintessence de ses textes. Il était très énigmatique et très engagé dans ses textes. En son temps, on peut dire qu’il faisait du rap, il était contestataire et menait un combat par rapport à l’amélioration des conditions de vie des gabonais», témoigne Christian Bekoung, responsable de Starcom Events.
Pierre Claver Zeng Ebome entame sa carrière politique dans l’opposition en créant l’Association pour la promotion du socialisme au Gabon (APSG). Il entre au gouvernement en 1990 en tant que ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative. Il est pour un temps ministre de la Jeunesse, des Sports, de la Culture et des Arts. Après quoi, il est tour à tour ministre des Affaires sociales, de la Solidarité nationale et de la Famille en 1997, puis ministre des Droits de l’Homme et des Relations avec les Institutions constitutionnelles en 1999.
Lors des élections législatives de décembre 2001, Pierre Claver Zeng Ebome remporte le deuxième siège du département du avec 52,11% des voix. Par la suite, il est le seul candidat du Mouvement africain pour le développement (MAD), formation dont il est le président fondateur, à remporter un siège lors des élections législatives 2001-2002. Au cours de sa législature, il est vice-président du Groupe des démocrates républicains (GDR), un groupe parlementaire composé de députés des petits partis alliés au Parti démocratique gabonais (PDG). Le 8 Janvier 2003, il est porté Président de la Conseil national pour la démocratie, un organe chargé de la médiation des différends entre les partis politiques.
Zeng Ebome soutien la candidature du président Omar Bongo à l’élection présidentielle de novembre 2005. En tant que représentant de la majorité présidentielle, il prend part à la Commission conjointe la majorité-opposition concernant la réforme du processus électoral. Au cours de la législature qui a suivi l’élection législative de 2006, il était un membre ordinaire du groupe parlementaire RDA.
Après la mort d’Omar Bongo en Juin 2009, son parti passe dans l’opposition, soutient la candidature indépendante de Casimir Oyé Mba lors de l’élection présidentielle d’août 2009. Ce positionnement contre le candidat du PDG le ramène dans l’opposition après de longues années de loyauté envers Omar Bongo.
Le 10 décembre 2009, les dirigeants de l’opposition, Zeng Ebome y compris, annoncent le projet de création d’un nouveau parti d’opposition unie. Zeng Ebome organise à cet effet un bref Congrès extraordinaire du MAD, le 8 Février 2010, au cours duquel il confirme que son parti cesse d’exister. L’annonce est suivie par le lancement d’un parti d’opposition unifiée, l’Union nationale (UN), le 10 Février 2010. L’UN a été créée par la fusion du MAD avec deux autres partis d’opposition, et regroupé un assortiment de dirigeants de l’opposition; Zeng Ebome a été désigné comme l’un des cinq vice-présidents.
Le quinquagénaire à l’allure éternelle de jeune premier a été récemment hospitalisé à l’Hôpital d’instruction des armées de Libreville. Il décède à l’hôpital Saint-Louis de Paris où il a été évacué, de calculs dans la vésicule biliaire disent certains, d’un cancer du même organe assurent d’autres. Il restera pour les Gabonais un pionnier de la musique contemporaine et un acteur mémorable de l’échiquier politique.
Dommage, c est un homme que je connaissais pour avoir travaille au parlement gabonais, c etait un homme simple et sympathique. Que dieu soutienne sa veuve et ses orphelins