Face aux rumeurs qui la donnent prochainement démise par l’Elysée de ses fonctions d’ambassadrice de la France auprès de l’Unesco, l’ex-secrétaire d’Etat garde la tête haute et prépare son avenir politique.
Un petit tour et puis s’en va. Quatre mois seulement après sa nomination, les jours de Rama Yade au poste d’ambassadrice auprès de l’Unesco semblent comptés. Selon le Nouvel Observateur et le Canard Enchaîné, l’Elysée aurait déjà pris la «décision de principe» de limoger l’ex-benjamine du gouvernement. Nicolas Sarkozy n’apprécierait pas de la voir empiéter sur le devoir de réserve inhérent à sa fonction. Elle s’était notamment violemment opposée au «débat sur l’Islam» mené à l’UMP. Il y a un mois, le chef de l’État avait aussi reproché à son ancienne ministre de ne pas manifester son soutien à l’offensive français en Libye. «Ca aurait peut-être mérité un petit commentaire, non ? On est les seuls à s’engager autant sur les droits de l’homme en Libye, idem pour la Côte d’Ivoire, et on ne l’entend plus !», s’insurgait le chef de l’Etat, comme le rapportait Le Figaro.
En porte-parole de la pensée présidentielle, Brice Hortefeux s’était récemment interrogé sur la compatibilité de «l’expression politique» de Rama Yade avec sa fonction d’ambassadrice. Et vendredi, la députée Valérie Rosso-Debord, membre de la direction de l’UMP, a enfoncé le clou, estimant que la «meilleure solution» pour l’ex-secrétaire d’Etat serait encore de démissionner. «C’est une fonction qui nécessite tact et mesure. Donc je pense qu’à priori elle est passée au delà du tact et de la mesure», a-t-elle jugé sur RTL. Et d’ajouter, cinglante : «Si son seul moteur est l’aigreur, sa vie ne va pas être très agréable».
Comme une libération
Son aigreur, Rama Yade sait pourtant la dissimuler. A la question de savoir si son éventuel remplacement l’inquiète, elle répond, vendredi matin sur France Inter : «Pas du tout ! J’ai l’air (inquiète), là ?». Face aux pressions, Rama Yade veut garder la tête haute : «J’existais avant, j’existerai après» l’Unesco, assure-t-elle. «Je continuerai de faire ma vie comme d’hab. A 34 ans, on a la vie devant soi et rien ne nous fait peur».
A l’entendre, son limogeage sonnerait presque comme une libération : «Je n’ai aucune perspective professionnelle ou ambition particulière à l’Unesco. Je fais une mission temporaire comme on me l’a demandé avec beaucoup d’insistance», explique-t-elle, laissant entendre que Nicolas Sarkozy l’avait installée de force à ce poste. «Ambassadeur à l’Unesco à 34 ans, c’est énorme ! Je n’aurais pas pu espérer mieux», s’enthousiasmait-elle pourtant en décembre, à l’annonce de sa nomination en Conseil des ministres.
Rama Yade fourbit ses armes
En stratège politique, Rama Yade pense déjà au «coup d’après». Après avoir quitté l’UMP début avril pour rejoindre le parti radical de Jean-Louis Borloo, celle qui a toujours cultivé sa liberté de ton au sein du gouvernement, ne veut plus avoir de compte à rendre à l’Elysée à l’aube d’importantes échéances électorales. Les sénatoriales d’abord : élue de Colombes, l’ancienne secrétaire d’Etat pourrait figurer en seconde position sur la liste du Nouveau Centre conduite par Hervé Marseille dans les Hauts-de-Seine. Les législatives, ensuite : elle vise la seconde circonscription alto-séquanaise, actuellement détenue par Manuel Aeschlimann, mis en cause dans une affaire de trafic d’influence.
La tâche s’annonce compliquée pour Rama Yade dans le fief de Nicolas Sarkozy. Prête à «aller au combat», l’ancienne ministre fourbit déjà ses armes. Elle mise d’abord sur le succès de «l’OPA» de Jean-Louis Borloo au centre, à laquelle elle compte s’associer. Déjà à la tête du club «Agir pour Colombes», elle a réuni jeudi soir à Paris les membres de son nouveau think-tank, baptisé «Allons enfants !», qui revendique déjà 56.000 amis sur Facebook. Un moyen pour la cinquième personnalité préférée des Français d’exister médiatiquement, mais aussi de récolter des dons en vue des batailles qu’elle va devoir livrer.