La Convention nationale des syndicats du secteur éducation (Conasysed) vient de porter plainte au gouvernement gabonais pour «abus de pouvoir, répression antisyndicale, violation de l’exercice des droits syndicaux et violation des droits de l’Homme». Une décision motivée par la suspension «sans notification préalable, de manière arbitraire et illégale», depuis le 25 janvier, des salaires des enseignants de cette coalition syndicale. Ci-après, l’intégrale de la plainte de la Conasysed déposée auprès de la Cour africaine des droits de l’Homme et des Peuples.
La Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples
ARUSHA REPUBLIQUE UNIE DE TANZANIE
Objet : Plainte contre le Gouvernement gabonais pour abus de pouvoir, répression antisyndicale, violation de l’exercice des droits syndicaux et violation des droits de l’Homme.
Monsieur le Président,
Nous avons l’honneur de venir auprès de votre juridiction déposer plainte contre le Gouvernement gabonais pour abus de pouvoir, répression antisyndicale, violation de l’exercice des droits syndicaux, reconnus comme des droits humains au titre de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, et par les conventions internationales de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) ratifiés par le Gabon.
En effet, nous sommes des enseignants, leaders syndicaux regroupés au sein de la Convention Nationale des Syndicats du Secteur Education (CONASYSED).
Depuis le 25 janvier 2011, sans notification préalable, de manière arbitraire et illégale, nous sommes suspendus de nos salaires et ce, jusqu’à ce jour. Par ailleurs, nous avons été traduits en Conseil de Discipline tout aussi illégalement et de manière arbitraire, dont les décisions sont toujours attendues sept (7) mois après sa tenue, en toute violation des prescriptions en la matière, et en parfaite violation des textes nationaux et des Conventions Internationales de l’OIT en vigueur, tels que :
• La Constitution de la République Gabonaise,
• La loi 18/92 du 18 mai 1993 fixant les conditions de constitution et de fonctionnement des organisations syndicales des agents de l’Etat,
• La loi 1/2005 du 04 février 2005 portant Statut Général de la Fonction Publique,
• La loi 8/91 du 26 septembre 1991 portant Statut Général des Fonctionnaires,
• La loi 20/92 du 08 mars 1993 fixant les statuts particuliers des fonctionnaires du secteur éducation.
• Conventions 87, 98, 151, et 154 de l’OIT, que le Gabon a librement ratifié.
En date du 15 février 2011, par l’entremise de notre avocat conseil, Maître MOUBEYI BOUALE, nous avons saisi par requête en référé le Conseil d’Etat, aux fins de voir ladite mesure levée.
En date du 26 avril 2011, l’avocat de l’Etat, Maître NKEA, a déposé ses conclusions devant la juridiction de céans en déclarant ce qui suit : «la juridiction de céans prendra donc acte de ce que l’Etat gabonais entend rétablir les salaires revendiqués dans les meilleurs délais ( …) par ces motifs : recevoir les présentes ; les dire fondées et y faisant droit ; prendre acte de ce que l’Etat Gabonais s’engage à procéder à la régularisation de la situation des requérants dans les meilleurs délais».
Mais, contre toute attente, alors que nous nous attendions à la levée desdites mesures arbitraires, le Conseil d’Etat a rendu sa décision finale en date du 2 août 2011 dans les termes suivants : «Recours rejetés parce que mal fondés et les requérants doivent se pourvoir au principal».
Cette décision est prise en faisant fi des différentes interventions du Médiateur de la République Gabonaise à l’endroit du Président de la République le 7 mars 2011 ; de l’interpellation de l’Internationale de l’Education (IE) le 1er juillet 2011 adressée au Président de la République Gabonaise ; du rapport 2011 du BIT sur la violation des droits syndicaux au Gabon.
Face à cette décision inique du Conseil d’Etat et devant la deshumanisation dont sont désormais l’objet les leaders syndicaux que nous sommes, nous sollicitons de votre juridiction une condamnation ferme du Gouvernement gabonais de rétablir urgemment les leaders syndicaux dans leurs droits.
Dans l’attente, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Président, l’assurance de notre considération distinguée.
Alain Mouagouadi