Puissance mondiale émergente, le Brésil, dont une partie de la population est composée de descendants d’esclaves noirs africains, investit beaucoup en Afrique où il bénéficie d’un capital sympathie en raison notamment de son passé de pays pauvre.
Jeudi et vendredi, le Brésil, qui avait dépêché son ministre des Affaires étrangères Antonio de Aguiar Patriota, était l’invité vedette du Forum de coopération Amérique du Sud-Afrique (Asacof) qui a réuni 55 pays des deux continents.
« Le Brésil, c’est foot et samba », s’amusaient les lycéens gabonais avant le match de gala Gabon-Brésil le 10 novembre. « Le Brésil est choisi pour participer à ce genre d’événement en raison de ce que représente la sélection brésilienne », admettait Mano Menezes, le sélectionneur brésilien, conscient toutefois que la présence de son équipe dépassait le cadre du football.
Outre le sport, la musique et les telenovelas (feuilletons), le très charismatique ancien président Inacio Luiz Lula, tiers-mondiste, qui s’est souvent rendu en Afrique en prônant une coopération sud-sud, était aussi un formidable atout pour Brasilia.
Jadis très endetté et en proie à la corruption – deux maux qui minent l’Afrique – le Brésil est désormais un exemple pour le Continent noir, puisqu’il figure parmi les dix premières puissances mondiales.
Le pétrolier brésilien Petrobras et le minier Vale sont des consortiums gigantesques à la force de frappe financière impressionnante. Au Mozambique (pays lusophone comme le Brésil et l’Angola) Vale a investi 1,7 milliard de dollars dans la mine de charbon de Moatize (nord-ouest) et s’est engagé sur plus de 2 milliards sur d’autres projets. Il fait travailler un peu moins de 10.000 personnes, sous-traitants compris.
Au Gabon, après avoir été écarté du projet Belinga, important gisement de fer dont l’exploitation reste en suspens après avoir été accordée aux Chinois, les Brésiliens sont revenus dans le jeu même si les négociations restent secrètes.
Moins visibles, de nombreuses entreprises brésiliennes, du BTP à la pharmacie en passant par l’aviation ou l’électricité, ont pris pied sur le continent en vendant leur savoir-faire adapté aux particularités africaines parfois similaires à celles du Brésil (climat, structure de la population).
Mais, le Brésil est surtout vu comme un allié qui peut atténuer la domination du Nord.
« L’influence et l’activisme économique du Brésil doivent être vus de façon positive. Le Brésil et la Chine ont prouvé à l’Afrique que le développement est possible », souligne le ministre des Zones économiques spéciales du Congo, Alain Akouala Atipault.
« Hier l’Afrique était en relation de coopération uniquement avec les ex-puissances colonisatrices. L’émergence de la Chine et du Brésil donne une possibilité de coopération sud-sud. Au Congo, où nous préparons le développement de zones économiques spéciales, le Brésil, la Chine et Singapour vont nous servir de modèle », explique-t-il
« Nous avons beaucoup à apprendre du Brésil dans l’agriculture et la recherche. Nous avons décidé de créer une commission stratégique entre les deux pays », a renchéri le président guinéen Alpha Condé, de retour d’une récente visite au Brésil.
« Il y a en ce moment une dynamique très perceptible de l’intérêt du Brésil pour l’Afrique. Tout ce que le Brésil compte de forces sociopolitiques +afrodescendantes+ (noires, NDLR) sont mobilisées pour des relations plus étroites avec l’Afrique. Les Brésiliens s’en sentent proches, contrairement aux Chinois », observe le tout premier ambassadeur du Burkina Faso à Brasilia, Alain-Jean Gustave Ilboudo.
En juillet 2006, Lula avait déjà impulsé une coopération avec le Kenya, en matière d’énergie et d?éducation. Les échanges restent cependant limités.
Le Brésil, qui exporte notamment son sucre vers le Nigeria, est le troisième importateur de brut nigérian, derrière les USA et l’Inde. Le géant africain est en contact avec le Brésil pour la privatisation de son réseau électrique.
Toutefois, un officiel sénégalais note un changement récent: « Autant Lula était internationaliste, autant l’actuelle présidente Dilma Rousseff, également du Parti travailliste, semble mettre l’accent sur les problèmes internes ».