Les enseignants gabonais regroupés au sein du Syndicat National des Enseignants et Chercheurs (SNEC) ont suspendu leur mouvement de grève samedi après-midi à l’issue d’une assemblée générale de 4 heures tenue à l’Université Omar Bongo de Libreville, a annoncé Jean Rémy Yama, Président du SNEC.
Le mouvement de grève déclenché le 16 mars dernier par les enseignants du supérieur membres du SNEC pour revendiquer la régularisation des situations administratives, l’aboutissement du dossier des parcelles d’Agondjé et l’amélioration des conditions de travail et de vie des enseignants a été suspendue ce samedi après la rencontre entre le Gouvernement et les responsables dudit syndicat vendredi.
« Constatant la décision du Gouvernement de mettre en place deux commissions chargées de régularisation des situations administratives et de l’aboutissement du dossier des parcelles, constant également la décision qui a été prise par les enseignants et chercheurs de nous en remettre au Président de la République s’agissant des questions de la revalorisation des conditions de vie et de travail des enseignants décidée par son excellence le 31 décembre 2011 dont la prise d’effet devrait être fin janvier 2012, l’assemblée générale, ne pouvant pas mettre le Président de la République sous pression, a décidé de suspendre son mouvement de grève pendant deux semaines », a indiqué M. Yama samedi à l’issue de l’Assemblée Générale précisant toutefois qu’une autre assemblée générale sera convoquée dans deux semaines pour une évaluation, le temps pour les commissions d’amener les résultats afin ramener la sérénité dans les universités et grandes écoles.
A part la grève des enseignants du supérieur, les étudiants de l’Université Omar Bongo ont aussi déclenché un mouvement de grève pour revendiquer le paiement de leurs bourses et la fin de la limitation d’attribution de celles-ci à 27 ans. Une situation qui a occasionné des manifestations ayant entrainé des dégâts matériels, la séquestration du Recteur et la suspension de certains étudiants.
20 ans après, on n’arrive pas toujours à remettre l’Université Omar Bongo sur les rails.
La situation actuelle au sein de l’Université Omar Bongo est préoccupante et compromet le fonctionnement normal de l’année académique, avec des risques réels d’une année blanche, préjudiciable à la scolarité des étudiants et à l’image de cette université.
Il est urgent que les acteurs de l’université, administratifs, enseignants et étudiants tiennent compte de cette donne pour sortir de la crise actuelle.
Pour la Force de Réflexion et d’Action Pour l’Enseignement Supérieur (FRAPES), un autre syndicat des enseignants du supérieur, quelque soit la légitimité des revendications des enseignants et des étudiants, la voie de la négociation devrait primer sur le blocage des cours et l’usage de la violence, comme on peut lire dans un communiqué distribué à la presse.
La FRAPES apprécie à sa juste valeur les mesures annoncées par le Président de la République dans son discours à la nation le 31 décembre 2011 comme une avancée concrète qui vise à améliorer les conditions sociales des enseignants et chercheurs. De même, les réformes académiques et le plan de rénovation des structures d’accueil et des conditions de travail en cours constituent une volonté réelle du Gouvernement de moderniser l’enseignement supérieur et la recherche de notre pays.
Le blocage dont l’UOB est victime est dû à l’absence de l’autorité, estime le SNEC. Jean Rémy Yama déplore cette situation.
« C’est vrai que ces événements sont déplorables ce qu’on a vu avec les étudiants qui font la cassure et vouloir même l’intégrité d’un collègue que nous n’avons pas également accepté. C’est regrettable mais c’est tout simplement dû à l’absence de l’autorité », a expliqué Jean Rémy Yama.
Et de poursuivre : « Quand l’autorité est absente on arrive à ces dérives ou alors lorsque l’autorité également ne respecte pas les textes, elle veut faire des passages en force, on arrive également à ces dérives ».
« L’autorité à l’UOB pour l’instant est le Recteur. Les problèmes qui se posent à l’UOB sont les mêmes que ceux de deux autres universités gabonaises que sont l’Université des Sciences et Techniques de Masuku (USM) et l’Université des Sciences de la Santé (USS). Mais dans ces universités, on n’a jamais entendu qu’un Recteur a été séquestré. Qu’il y a eu tentative sur la vie d’un enseignant. Il n’y a qu’à l’UOB qu’on a vu, les étudiants à l’époque agresser un enseignant. Il n’y a qu’à l’UOB qu’on voit ça. Il n’y a qu’à l’UOB également qu’on assiste à ce genre des dérives. »
M. Yama plaide pour la restauration de d’autorité de l’Etat dans cette institution universitaire.
« En tant qu’enseignants, nous demandons la restauration de l’autorité de l’Etat mais conformément aux textes en vigueur dans les universités. Si chacun de nous fait son travail, le calme pourra revenir. »
Quant à la politisation des universités notamment l’UOB, le Président du SNEC ne partage pas cet avis.
« Ceux qui voient la politique partout sont des incompétents. Je fais du syndicalisme pendant 12 ans, je n’ai jamais été politisé. Je n’ai jamais vu un étudiant pour dire fait quoique ce soit. Les hommes politiques, ceux qui ont plus des moyens sont ceux qui sont au pouvoir. Si c’est politisé, alors dans ce cas, ce sont ceux qui sont au pouvoir qui politisent cela. Vous pensez que quelque soit votre opinion politique vous pouvez manipuler 12 000 ou 20 000 étudiants ? Mais ce n’est pas possible ! Les étudiants posent des problèmes qui sont réels même s’il y a une petite dose d’exagération, ça existe partout. Même nous au syndicat, lorsque nous posons des problèmes, il y a aussi des extrémistes parmi nous, mais le bon sens gagne toujours à la fin. Pour les étudiants, c’est la même chose. Je ne crois pas à la politisation des universités. Je crois plutôt à l’incapacité de certains de régler les problèmes », a déclaré Jean Rémy Yama.
Les enseignants ont annoncé la reprise des cours ce matin dans toutes les universités et grandes écoles. Mais la grande inconnue demeure la position des étudiants de l’UOB qui ont prévu une assemblée générale ce matin.
« Notre mouvement continue avec comme revendications : la libération des étudiants enfermés ; la levée de la décision rectorale suspendant cinq étudiants grévistes, ainsi que le départ des gendarmes de l’université », a expliqué un étudiant qui a requis l’anonymat.