Afin de garantir un État impartial et moraliser la vie publique, les institutions de la République se doivent de ne pas être politiquement marquées. A contrario, elles devraient comporter une certaine pluralité politique. Ce qui est loin d’être le cas au Gabon où la composition du Conseil national de la communication (CNC) est manifestement contraire au principe de l’apparence d’impartialité.
Après les années 1967-2009 sur lesquelles il n’est pas besoin de revenir, il était souhaitable que la qualité de membre de certaines institutions soit marquée du sceau de la neutralité politique, à la Cour constitutionnelle comme au Conseil national de la communication (CNC). En attendant le renouvellement de la Cour constitutionnelle qui devrait intervenir en septembre-octobre prochain, l’on s’interroge aujourd’hui sur les risques de partialité et de subjectivité que court le CNC après la désignation des membres de sa nouvelle équipe.
De nombreux observateurs indiquent en effet l’uniformité idéologique des nouveaux Conseillers membres du CNC. Car, autant dans le bureau sortant, Jean-Claude Boulanga, François Duchateau Effemba et Jean-Baptiste Obame Emane n’étaient pas trop marqués politiquement, autant dans la nouvelle équipe, la majorité des conseillers membres sont d’anciens membres du Bureau politique, du Conseil national ou du Comité central du Parti démocratique gabonais (PDG).
A ce titre, on signalera que le président de l’institution, Guy-Bertrand Mapangou, a même été jusqu’à sa nomination le 7 mai, directeur du cabinet du président du PDG qui n’est autre que le président de la République. Le vice-président Brigitte Anguilet est une responsable du PDG dans le troisième arrondissement de Libreville. Jean de Dieu Ndong Ovono, par exemple, est connu pour avoir appartenu au courant des «Rénovateurs». Gilles Térence Nzoghé était jusque-là Conseiller politique du président du Sénat, Rose-Francine Rogombé, qu’on sait être un membre éminent du Bureau politique du PDG.
Au-delà de sa démission du poste de directeur de cabinet d’Ali Bongo, Guy-Bertrand Mapangou s’est-il formellement retiré du Bureau politique dont il est l’un des animateurs à Fougamou ? Les autres nouveaux membres ont-ils démissionné du PDG ? Cette uniformité idéologique ne va-t-elle pas les influencer dans les décisions qu’ils seront amenés à prendre tout au long de leur mandature de cinq ans ? Pour éviter tout soupçon, pour donner au CNC une espèce de neutralité et pour donner du Gabon l’image d’une République exemplaire, les hautes autorités du pays auraient dû désigner deux à trois personnes qui ne seraient pas trop marquées politiquement.
L’institution a d’ailleurs commencé sa nouvelle mandature par des mises en garde pour le moins impartiales et absurdes. A l’issue de sa première séance extraordinaire du vendredi 1er juin 2012, le CNC a mis en garde les journaux «Le Mbandja», «Echos du Nord», «Le Temps», pour avoir commenté l’article de «Jeune Afrique» intitulé «Bienvenu chez les Fangs». Si l’émission de la RTG «Pluriel» en a également fait les frais, on aura remarqué que les titres «La Griffe», «Le Scribouillard» ou «Le Douk Douk», satiriques qui ne cachent pas leur proximité avec le cabinet présidentiel et qui avaient pourtant eux aussi commenté l’article de «Jeune Afrique», ont été épargnés de la mise en garde de l’institution. «Le compte à rebours pour faire taire les médias récalcitrants a donc commencé», n’avait pas manqué de noter l’ancien diplomate, Petit-Lambert Ovono, qui commentait alors cette première séance plénière du CNC.