En accédant au pouvoir par un coup d’État électoral en août 2009 avec assassinat de plus d’une cinquantaine de personnes à Port-Gentil, Ali Bongo 9% a confondu vitesse et précipitation pour réaliser sa vision de « Gabon émergent ». Ainsi, son projet de société « l’avenir en confiance » a consisté à mettre en œuvre une stratégie s’appuyant sur la valorisation du capital humain et naturel du Gabon. Pour ce faire, il l’a fait reposer sur trois piliers de croissance baptisés « Gabon industriel », « Gabon vert » et « Gabon des services ».
À ce propos, il avait dit : « Depuis mon arrivée au pouvoir en 2009, j’ai établi un programme ambitieux de réformes économiques en vue d’une prospérité future. Il ne nous est désormais plus possible de dépendre uniquement de nos ressources pétrolières et gazières pour dynamiser la croissance économique. Nous devons nous diversifier sur un mode durable. Tel est l’objectif du programme Gabon Emergent, qui guidera notre développement ».
En parlant de développement durable dans son projet de société, l’usurpateur Ali Bongo 9% se prend pour un expert de la « Bonne gouvernance environnementale » alors qu’il est loin du compte d’autant qu’il ne maîtrise même pas les acceptions, les facteurs, les contextes, les mesures du développement durable (DD). Au niveau par exemple de la mesure du développement durable, gageons qu’il sache que celle principalement utilisée est l’Environmental Sustainability Index (ESI) de l’Université de Yale qui est un indice synthétique à 5 composantes (état des systèmes écologiques, stress environnementaux, vulnérabilité humaine, capacité sociale et institutionnelle, responsabilité mondiale…), à 21 indicateurs (qualité de l’air, qualité de l’eau douce, émission de gaz à effet de serre, couvert forestier, terre humide, conditions de vie, gouvernance environnementale, participation aux actions internationales…) et à 76 variables (concentration des particules, espèces menacées, NOx et SO2 en moins, forêts sous aménagement durable, eau potable accessible, sécurité alimentaire, aires protégées, inscriptions universitaires, chercheurs, signature de conventions, accords internationaux, activités gouvernementales bi et multilatérales…).
En prétendant faire du développement durable la base de son projet de société avec le pilier « Gabon vert », l’imposteur Ali Bongo 9% est plutôt l’un des plus grands ennemis de la Terre (cf. permis d’exploitation du fer de Belinga originellement accordée aux firmes chinoises destructrices de la forêt gabonaise par dynamitage ; accord de licence au Groupe Olam pour l’hévéaculture dans le Woleu-Ntem sans une étude préalable d’impact environnemental face aux inquiétudes des populations locales ; mauvaise gouvernance territoriale en violation de l’agenda 21 local ou A21L de la Convention de Rio de 1992…).
De même, il omet sciemment de mentionner que l’incrustation du pilier (Gabon vert) dans son projet de société obéit à une décision de la Banque mondiale et du FMI d’intégrer les normes environnementales dans leurs programmes de prêts accordés aux pays en difficultés comme le Gabon en raison de la « Malveillante gouvernance » érigée en mode de gestion par les Bongo. D’ailleurs, il existe bel et bien des programmes d’aide financière et technique, et même des techniques spéciales d’aide comme les « échanges dette-nature ». Ces échanges « dette-nature » permettent à des pays ruinés comme le Gabon par la « Malveillante gouvernance » des Bongo de se libérer d’une partie de leur(s) dette(s) en s’engageant vis-à-vis du détenteur de la créance à mettre en œuvre une mesure environnementale que ce dernier lui propose. En pratique, un groupe environnementaliste disposant de moyens financiers importants comme le WWF (World Wildlife Fund) peut acheter une obligation d’un pays en développement débiteur et annuler une partie de sa créance contre l’engagement, par exemple, de mieux protéger telle ou telle espèce en voie d’extinction sur son territoire.
Ainsi, le kleptomane Ali Bongo 9% qui prétend s’inscrire dans le courant de l’Écologie radicale (Deep Ecology) contribue plutôt à la « crise environnementale » et à ses conséquences fâcheuses et irréversibles (pollution de l’air, de l’eau et des sols ; déforestation des vastes zones terrestres avec érosion et fragilisation des sols ; glissements des terrains et inondations ; pénurie d’eau potable touchant de vastes populations ; changements climatiques…) de par sa politique de « Malveillante gouvernance », politique initialisée par Bongo père et facteur de pauvreté, d’injustice ou inégalité sociale et environnementale.
L’injustice sociale montre comment la répartition de la richesse nationale est injuste et inéquitable entre les gabonais considérés par le régime incompétent au pouvoir comme fondamentalement non libres et inégaux. Elle montre comment les avantages et les charges sont inégalement répartis entre les gabonais. C’est le cas par exemple de la minorité au pouvoir (2%) qui s’approprie criminellement les 98% de la richesse nationale tandis que le plus grand nombre de gabonais vit dans une précarité extrême selon le coefficient de Gini ou la distribution par quintile.
L’injustice environnementale ou « apartheid environnemental » montre comment le régime kleptomane au pouvoir place de façon inégalitaire les populations gabonaises face aux pollutions, aux nuisances et aux risques environnementaux. C’est le cas par exemple du plus nombre de gabonais qui vit dans des quartiers sous intégrés comme Kinguélé, Derrière-la-prison, Nkembo… sans eau potable, sans électricité et avec des moustiques, des rats, des serpents et des dépotoirs très polluants ou poubelles à ciel ouvert… pendant que la minorité au pouvoir (2%) vit à la Sablière, caractérisant ainsi le dualisme Mapanes – Sablière. De même, c’est le cas, dans les années 1990, de la forêt de l’Ogooué-Ivindo qui avait reçu l’entreposage des déchets ou résidus toxiques tels que le cyanure, l’arsenic, le plomb…venant des usines du Nord avec la complicité du gouvernement corrompu.
Or, la Théorie de la justice sociale du philosophe américain John Rawls (1987) soutient que l’appartenance à une génération plutôt qu’à une autre relève fondamentalement des hasards de la vie et, par conséquent, ne devrait justifier des avantages pour certains individus. La situation temporelle d’une personne est essentiellement tributaire de circonstances moralement arbitraires, tout comme c’est le cas pour certains facteurs qui déterminent le capital de santé à la naissance ou encore le statut socio-économique d’un individu se retrouvant par exemple dans un milieu plus ou moins défavorisé. Il s’agit là d’autant de facteurs qui doivent par conséquent se voir pris en compte, tout spécialement par l’entremise des institutions sociales et politiques. Bref, il est une obligation de justice de se soucier de ce que notre génération va léguer aux générations futures.
De même, Le principe de responsabilité de l’allemand Hans Jonas (1979) stipule que chaque fois qu’un individu agit, il lui incombe d’emblée la responsabilité morale forte de se soucier de ses semblables qui subissent ou subiront éventuellement les conséquences néfastes de cette action. Il s’agit pour ainsi dire d’une responsabilité en amont et non plus seulement en aval. Plus nous avons de pouvoir sur les autres, plus il nous incombe la responsabilité forte de nous préoccuper de leur bien-être; ce qui amène à dire que notre génération actuelle a d’autant plus de responsabilité qu’elle dispose des moyens d’action inégalés aux conséquences potentiellement désastreuses pour les générations à venir.
De la sorte, la pauvreté et les injustices sociales sont des obstacles majeurs au développement durable qui se veut être un développement répondant aux besoins essentiels des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs ce, sous le triptyque harmonieux de l’intégrité écologique, de l’efficacité économique et de l’équité intra et intergénérationnelle sociale. Il y’a un lien étroit entre la pauvreté chronique qui stigmatise des populations entières et la persistance de modes de développement qui sont insoutenables à terme. Les populations qui vivent dans des conditions de pauvreté, voire de misère, se soucieront prioritairement d’assurer leur subsistance en comblant leurs besoins de base, quitte si nécessaire à s’adonner à des pratiques contraires au développement durable qui exercent de fortes pressions sur l’environnement (déforestation accélérée, surpêche, braconnage, consommation de produits peu coûteux mais hautement polluants…).
En cela, la « Malveillante gouvernance » du Gabon par les Bongo viole la règle d’Hartwick.
En effet, produire demande l’emploi de ressources naturelles. Beaucoup sont renouvelables mais d’autres sont non renouvelables (pétrole, gaz naturel…). Ces ressources naturelles forment un capital naturel dont chaque nation est plus ou moins bien dotée. On peut y substituer le capital naturel à la force de travail ou aux autres formes de capital. Par exemple, on peut chauffer une maison au bois (capital naturel de la forêt) ou à l’électricité produite par du capital physique que constitue un barrage hydro-électrique.
Si la gestion des ressources renouvelables est souvent problématique (surexploitation des pêches, déforestation…), il est possible de continuer à les employer à la condition de ne pas diminuer le stock total qu’on laissera aux générations futures. En revanche, il en est autrement pour les ressources non renouvelables (tout le pétrole qu’on consomme aujourd’hui est autant de pétrole dont les générations futures ne pourront disposer).
Dans ce cadre, si on ne peut prévenir la déplétion de ces ressources naturelles, soit une partie du capital naturel, il faut en contrepartie accroître le capital physique et le capital humain de sorte que le stock total de capital physique, humain et naturel ne diminue pas ou reste stable ((ST = stock total = KP + KH + KN) avec une fonction de production (Q) telle que Q = f(KP;KH;KN) ce, sous l’hypothèse de substitution entre les 3 types de capital, KP, KH et KN ).
Cette proposition est connue sous le nom de règle d’Hartwick en l’honneur de l’économiste qui l’a énoncée vers la fin des années soixante-dix. La Norvège, qui est un producteur de pétrole, met cette règle en application en consacrant l’essentiel des profits de l’exploitation pétrolière à la constitution d’un fonds dont elle ne consomme que les intérêts pour ses besoins courants.
La règle d’Hartwick est donc la réponse au respect du développement durable donnée dans la loi. Un pays qui emploie ses ressources non renouvelables pour se développer, que cela soit en bâtissant des routes, des écoles, des hôpitaux (dépenses d’infrastructures avec une rentabilité socioéconomique) respecte la règle d’Hartwick. Par contre, s’il les emploie pour rouler en Rolls Royce dans le désert ou bref, pour financer des éléphants blancs, il ne la respecte pas.
Or, depuis l’avènement des Bongo par des coups d’État électoraux et constitutionnels à la magistrature suprême au Gabon, les secteurs sociaux (éducation, santé, logement, alimentation, transport…), censés faire le développement (économique, social, culturel, environnemental) d’un pays, sont réduits à une peau de chagrin et délaissés au profit des détournements des deniers publics pour financement d’actifs (réels, monétaires et financiers) à l’étranger, financement de dépenses futiles dans des bordels et autres casinos, financement d’achat d’armes en vue de mâter les populations civiles désarmées en cas de contestation et de revendications sociales légitimes (cas des étudiants à l’UOB), financement de mercenaires en vue d’assassiner des opposants politiques (cas de J. Rendjambé…) et autres intellectuels gêneurs (cas de Ndouna Dépénaud…), financement des courses de vélo et de bateaux quand le plus grand nombre de gabonais vit avec moins de 1 USD par jour.
Dès lors, contrairement au développement durable vendu urbi et orbi, le projet de société (l’avenir en confiance) de l’imposteur en chef 9% ne pourra pas ne pas récolter du développement non durable au sens où de par sa « Malveillante gouvernance » du Gabon héritée de papa Bongo, il fera très vite épuiser le stock de capital naturel (KN) du Gabon sans compenser cette perte par une accumulation suffisante de capital physique (KP) et de capital humain (KH).
Par conséquent, il fera diminuer la capacité des générations futures gabonaises à subvenir à leurs besoins à moins qu’il n’adopte la « Bonne gouvernance » comme mode de gestion indispensable à l’obtention d’une croissance économique réelle (pas celle nominale que vante son émergence) et soutenable sur les bases de justice sociale et de prise en considération de l’évolution du capital naturel (cf. justice environnementale).
Pour cela, il lui est impératif de faire une veille systématique des comptes nationaux quant à l’évolution du capital naturel (cf. système des comptes de l’environnement et des ressources du Gabon ou comptabilité verte) et autres indicateurs socio-économiques.
Dr Jacques Janvier Rop’s Okoué Edou,
Secrétaire Exécutif Adjoint du BDP-Modwoam chargé des Affaires Économiques, du Développement et de la Mondialisation,
Doctorant en Sciences politiques,
MAP – Évaluation des programmes publics,
DESS en Administration des Affaires,
Pr d’économie à l’UQAR et au Cégep de Limoilou,
Consultant international (BTO Groupe Consultants).