Ce qui se dit ou s’écrit sur le président de la République gabonaise à l’étranger est toujours bon à savoir, même lorsque ce n’est pas valorisant pour l’image du pays en général. Un journal du Niger et un autre du Burkina Faso ont récemment tablé sur l’actualité du Gabon, en des termes qui ne sont pas toujours pour plaire. Ci-après, l’économie de ces articles.
Deux titres ouest-africains, Le Sahel (Niger) et Le Pays (Burkina-Faso), ont analysé, il y a une dizaine de jours, la situation politique au Gabon. Si on les croit loin de la réalité équatoriale, les auteurs de ces articles semblent pourtant suivre à la loupe les mouvements de l’arène politique gabonaise et si leur prose avait été produite à Libreville, on les classerait assurément dans la catégorie «presse de l’opposition».
Dans sa livraison du 15 septembre 2012, le quotidien Le Sahel, par exemple, a laissé entendre que le président Ali Bongo avait commis deux fautes la même semaine : «la reconduction de l’ex-maîtresse de son défunt père à la présidence de la Cour constitutionnelle pour un quatrième mandat de sept ans et le refus du dialogue avec l’opposition solennellement annoncé devant le Parlement gabonais», estimant qu’il n’est jamais bon de refuser le dialogue, «surtout quand on est le fils d’Omar Bongo, homme de dialogue, et quand on se veut un chef d’État responsable».
Pour sa part, dans son numéro du 13 septembre, le quotidien burkinabé Le Pays a titré : «Gabon – Proposition de conférence nationale souveraine – Ali Bongo se braque». Sous la plume de Boulkindi Couldiati, le journal note : «Ali Bongo a solennellement donné une réponse à la requête de ses opposants qui lui demandent la tenue d’une conférence nationale souveraine. Au lieu de se mettre au-dessus de la mêlée, en tant que chef de l’État, afin d’instaurer un dialogue franc et inclusif, Ali Bongo a livré un discours plutôt martial où il promet de sévir contre ceux qui lui demandent un peu plus de démocratie». L’auteur de l’article a ainsi commenté, dès le lendemain, le discours prononcé par le président Ali Bongo devant l’Assemblée nationale et le Sénat réunis en congrès 12 septembre dernier à Libreville.
Indiquant à ce sujet que «quiconque prenait le discours du numéro un gabonais en marche croirait que le pays est en guerre alors qu’il n’en est rien moins qu’une mise en garde contre son opposition et la société civile qui lui réclament une conférence nationale souveraine», le journal ajoute : «En fait, les Gabonais, depuis longtemps maintenus dans les mains ferrées d’une oligarchie familiale, ont besoin de se parler. Peu importe l’appellation du cadre. Mais Ali Bongo qui récuse obstinément cette conférence nationale feint d’ignorer la façon dont il est arrivé au pouvoir. Pourtant, comme dirait quelqu’un, «un problème non résolu demeure un problème à résoudre, tôt ou tard».
Plutôt figue que raisin, le quotidien burkinabé circonstancie à sa manière l’accession au pouvoir du président gabonais, perçu, au passage, comme quelqu’un de raide : «En effet, pour mettre de l’eau dans son vin, il aurait fallu qu’il se rappelât que ceux qui réclament la conférence savent que le pouvoir qu’il gère d’une main d’acier lui est tombé dans les mains comme un fruit mûr. Car, l’histoire retient que le trône qu’il occupe aujourd’hui a été le fruit d’une pure usurpation avant d’être, dit-on, légitimé par le peuple gabonais.»
«A la vérité, poursuit le journal burkinabé, cette sortie d’Ali Bongo manque d’élégance à plus d’un titre quand il somme surtout ses opposants de reconnaître sa légitimité. Celui qui, comme dans les monarchies absolues, a succédé à son défunt père revendique sur tous les toits la reconnaissance de sa légitimité. Sait-il seulement que la légitimité se mérite mais ne se revendique pas ?» Et le quotidien de Ouagadougou de s’interroger : «Qui disait, avec raison, que ‘’le pouvoir révèle l’homme et non le transforme»
«En se comportant en forteresse assiégée face à une requête populaire, Ali Bongo achève de prouver qu’il ne s’est pas foncièrement démarqué des vieux réflexes du régime de son défunt père, caractérisé par la pensée unique. Jusqu’où mènera-t-il ce bras de fer qu’il engage avec l’opposition et la société civile ?» «La question reste entière quand on sait surtout qu’il ramène toujours cette revendication légitime à une querelle individuelle entre lui et son frère d’hier, devenu aujourd’hui son ennemi juré, André Mba Obame, géniteur de l’idée de la conférence nationale souveraine que lui-même, ô ironie de l’histoire, avait rejetée, du temps où il était l’épine dorsale du système Bongo-père. Mais il est vrai qu’aujourd’hui le nouveau contexte de ce monde en ébullition commande que l’on se parle, dans l’intérêt de tous», conclut Le Pays.
A l’évidence, on pourrait conclure que l’image du président Ali Bongo n’est pas des plus reluisantes auprès d’une certaine opinion africaine. Ceux qui ont en charge la gestion de l’image du président de la République ont donc du grain à moudre. Faut-il donc tant d’imagination que ça pour lifter et entretenir l’image du chef de l’Etat auprès de l’opinion africaine ?