Dans une interview accordée à notre confrère Gabonactu à sa sortie de prison, le général Jean Philippe Ntumpa Lebani, qui a passé trois ans en prison après son inculpation pour avoir fomenté un coup d’État, parle de sa détention, du chef d’accusation et de son avenir.
Le général Ntumpa Lebani, condamné à cinq ans de prison en mars 2011, a bénéficié de la grâce présidentielle le vendredi 19 octobre dernier avec 370 autres détenus. En septembre 2009, il avait été incarcéré, puis jugé et condamné le 11 mars 2011 à 7 ans de prison dont 2 avec sursis. Le décret présidentiel, daté du 25 septembre 2012, s’articule autour d’une remise gracieuse de peine, en application de l’article 23 de la Constitution gabonaise.
A sa sortie de prison, l’ex patron des services de renseignements à la présidence de la République a été interviewé dans la voiture qui le ramenait à son domicile. L’homme parait très pieux dans ses propos et rend également beaucoup grâce à Dieu. D’où cette réponse à la question de savoir quelle est sa première réaction à sa sortie de prison. «Ma première réaction c’est merci à l’éternel tout puissant qui sait garder ses enfants. Du fond de ma cellule, je n’ai jamais oublié le père que j’ai toujours loué et je me disais toujours qu’un jour il aura une solution pour moi», a-t-il déclaré avant de commenter l’annonce de sa libération: «Pour une surprise, c’est vraiment une surprise agréable parce que je dormais encore lorsqu’on est venu me réveiller pour me dire, mon général faites vos bagages vous partez chez vous. Il était 9 heures. J’ai dit pourquoi et comment. On m’a répondu, la décision est tombée. J’ai dit gloire à Dieu».
En parlant de ses conditions de détention, le général Ntumpa explique : «si un prisonnier peut mener une bonne vie, je dirais, c’est la meilleure. Mais ce n’était pas la joie. Mais c’est la vie», a-t-il dit avant de compléter «Non ça ne se raconte pas. Ça se vit. Quand vous êtes à même le sol, quand vous vivez avec les cafards, les moustiques et les rats, vous imaginez la vie du prisonnier. Je ne mangeais pas la nourriture de la prison. Je mangeais ce qui revenait de chez moi».
Parlant de sa nouvelle vie, de cette vie qu’il aura à refaire après sa sortie de prison, l’ex-dirigeant du Conseil national de sécurité (CNS), a parlé de «résurrection». «C’est la résurrection. D’abord il faut remercier celui qui m’accorde cette liberté. Le chef de l’État, Ali Bongo Ondimba. Je suis quand même sorti par décret présidentiel !»
Il n’admet pas l’idée selon laquelle c’est le même chef de l’État Ali Bongo Ondimba qui l’y avait envoyé et s’explique : «Non, non puisque, à l’époque, il n’était pas président de la République. C’est dans le destin des hommes. Mon destin avait prévu que je parte en prison. C’est tout. Dans la vie il y a des hauts et des bas. Personne ne m’a envoyé en prison», a-t-il déclaré encore.
A propos des griefs qui l’ont conduit en prison, notamment l’affaire du coup d’État en préparation, le général Ntumpa Lebani raconte que «le commun des mortels a découvert que pour faire un coup d’État il faut être armé. Avoir de l’argent. Être épaulé. Avoir les hommes, les femmes, un plan politique, un plan B. bref une armada. Vraiment tout. Mais une petite mouche dans un coin faire un coup d’État ? C’est l’aventure humaine !».
Pour lui, son séjour en prison n’a pas de réels motifs. «Je dirais humblement que je n’ai pas vu un motif spécial. Les décideurs ont pensé que c’était une décision juridique d’arrêter telle personne (…). La loi est dure mais c’est la loi».
Cependant, le général semble mettre en garde ceux qui l’ont conduit dans les geôles. «Vous savez, si celui qui a donné l’ordre à la GR (Garde républicaine, ndlr) de m’appeler et de m’arrêter peut me dire les éléments qui étaient en sa possession, je crois qu’aujourd’hui il doit mûrement réfléchir pour se dire qu’on ne court pas pour courir. Il faut avoir tous les éléments nécessaires avant d’agir. Nous étions en période électorale. Tout le monde était chaud. Maintenant on est au froid. On peut commencer à se dire il y a eu peut être des manquements, des erreurs, mais la vie continue».
«J’ai vu des très nombreux témoins qui étaient incapables d’apporter les preuves de ce qu’ils avaient certainement affirmé dans le noir. Mais le jour a amené la lumière et la vérité se saura», a-t-il souligné.
Enfin, il précise qu’il reste prêt à servir son pays. «Un soldat n’a pas de choix. Ali Bongo est chef suprême des armées. La première responsabilité est la sienne de faire ce qu’il veut du général Ntumpa. Je suis un officier au service de la République. S’il a besoin de mes services, je suis là et s’il n’en a pas besoin, écoutez, c’est cela la vie. (…) Je ne sais pas qui m’a envoyé en prison. Je vais juste remercier le chef de l’État qui a, je crois, reçu toutes les informations nécessaires et qui a usé de son pouvoir pour décider de me libérer. Si on était en guerre même si on m’envoie en première ligne, j’irai. Le soldat que je suis ne fléchirait jamais.»