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Renonciation de Benoît XVI: les diacres néophytes de Saint-Augustin donnent de la voix

Dans la continuité de la célébration de la Journée mondiale de la jeunesse (JMJ), célébrée récemment, les étudiants en année propédeutique du Grand séminaire national Saint-Augustin, ont donné une communication à l’endroit de la jeunesse gabonaise au regard de l’actualité au sein de l’Église catholique, à savoir la renonciation du souverain pontife Benoît XVI.

Le petit séminaire Saint-Jean de Libreville a prêté son cadre, ce 22 février 2013, à la conférence de presse animée par un collectif de jeunes étudiants du grand séminaire national Saint-Augustin. L’occasion pour ces jeunes, inscrits en année propédeutique (programme d’études préparant à l’inscription à des études universitaires de deuxième ou de troisième cycle), d’apporter leur point de vue sur ce qui paraît aujourd’hui extraordinaire, même si ce n’est pas une première : la renonciation du Pape Benoît XVI à la papauté, intervenue le 11 février dernier, cours de la réunion d’un consistoire de cardinaux.

«Nous soulignons ici d’abord le caractère très humble du Pape, et il est à saluer car il a évoqué ici et reconnaît l’ampleur des tâches qui l’accablent et les défis qui attendent l’Église. Il peut être interprété comme un appel aux dirigeants africains qui ne songent nullement à l’alternance politique, mais pensent par contre mourir au pouvoir», ont mis en évidence ces séminaristes avant de relever que «rien dans le droit Canon n’interdit à l’évêque de Rome de renoncer à sa charge. Le code du droit canonique de 1983, prévoit simplement au canon 331 que le pape exerce son pouvoir librement sans limite ni dans le temps, ni dans l’espace, ni dans son droit, mais le canon 332 paragraphe 2, précise également que le pontife romain peut remettre sa charge à condition que la renonciation soit parfaitement libre et qu’elle se déroule à travers un rite laissé à sa discrétion».

«En général ceux qui diabolisent l’Église catholique ne retiennent que ses faiblesses, et ses erreurs historiques qui sont largement amplifiées. Or nous devons reconnaître que l’Église fondée sur le Christ reste composée de pécheurs et que les brebis galeuses n’y manquent pas. Nous devons aussi reconnaître les erreurs et les fautes d’hommes d’Église tout au long de son histoire, en particulier les abus de pouvoir, l’inquisition, les guerres de religion et la regrettable discrimination vis-à-vis des autres confessions chrétiennes», ont-ils admis.

Au regard de l’écart de perception qui existe au sein de la jeunesse, ces aspirants diacres ont saisi également l’occasion pour exhorter cette tranche d’âge de la société à ne pas enraciner sa foi dans les hommes mais en Christ, car lui seul est le fondateur de son Église qui existe et vit depuis 2 000 ans et qui continuera à vivre, de leur point de vue, même après les papes.

«L’Église ce n’est pas simplement le magistère, c’est nous tous réunis autour d’une même foi. En dépit de tout cela, notre engagement doit partir d’une relation profonde et intime avec la personne du Christ sans qui rien n’est possible. Les jeunes, certes, cherchent des repères, ces repères qu’ils trouvent en des hommes, mais ce n’est pas en ces hommes-là qu’il faut se réfugier mais en Christ», ont prôné les futurs diacres.

Ce que l’on sait sur cette démission papale

© Andreas Solaro/AFP

Officiellement, le Pape dit ne plus avoir les « forces », en raison de son âge, de diriger l’Église, mais de nombreuses indiscrétions, plus ou moins sérieuses, viennent expliquer cette décision rarissime. Plusieurs signaux, pour certains infimes, avaient, depuis plusieurs mois, éveillé l’intérêt des observateurs de la scène vaticane. Tout d’abord, dans son livre Lumière du Monde, répondant aux questions du journaliste allemand Peter Seewald, le pape avait clairement envisagé cette possibilité. Autre indice : lorsqu’il s’est rendu dans les Abruzzes, le 3 mai 2009, après le tremblement de terre de L’Aquila, Benoît XVI s’était longuement incliné devant la dépouille de son prédécesseur, Célestin V, qui avait lui-même abdiqué en 1294, se sentant incapable d’assumer les scandales qui rongeaient l’Église à cette époque. Or, la décision de Benoît XVI vient clore huit années d’un pontificat rythmé par les scandales…

Il y a les affaires de pédophilie des prêtres, toujours d’actualité avec de nombreux rebondissements plus graves les uns que les autres. «Il avait participé à l’étouffement de ces affaires», relève Frédéric Lenoir, sociologue et historien des religions. Benoît XVI a toutefois fait preuve d’une grande fermeté une fois pape. Dans un climat de honte et d’humiliation, il a condamné durement ces «péchés», accepté des démissions d’évêques, demandé pardon aux victimes et reconnu qu’une « purification » s’imposait au sein de l’Église.
L’affaire du majordome qui a éventé les arcanes du fonctionnement du Vatican, révélant les profondes rivalités au sein de la Curie romaine (le gouvernement du Saint-Siège), conduit à l’arrestation de son propre majordome, Paolo Gabriele. Selon Mgr Michel Dubost, évêque d’Évry-Corbeil-Essonnes, «Benoît XVI a été très affecté par cette affaire. Cela l’a éprouvé et fatigué. Il a été trahi par un proche». Frédéric Lenoir est encore plus direct. Pour lui, «le scandale Vatileaks est la cause principale de la démission de Benoît XVI. Il n’est plus en état de gérer ces querelles violentes, même si l’affaire est juridiquement terminée».

La troisième raison, la plus importante et la plus grave aux yeux d’un homme traditionaliste comme Benoît XVI, est le constat de la crise des vocations. Malgré l’Opus Dei, les «légionnaires du Christ», les Églises se vident. Elle perd pied et les sociétés occidentales remettent en cause le fait religieux dans son ensemble. Un proche du pape résume ainsi sa pensée critique : «Les religions chrétienne et juive pensent que le mal est l’Islam et qu’il faut à tout prix réduire en se taisant quand les pays occidentaux encouragent justement les extrémismes dans les pays musulmans.» Le silence de Benoît XVI concernant l’islamophobie est assurément une tâche noire de son pontificat. Nous sommes loin de l’aggiornamento de Paul VI. Mieux encore, la première chose faite par Benoît XVI après son élection est de supprimer le secrétariat pour le dialogue avec les religions et a fallu attendre ces dernières années pour que Benoît XVI se fasse violence et renoue un dialogue auquel il ne croit pas.

Une autre raison, qui aurait contribué à sa décision, concernerait de notre point de vue son désarroi devant les conquêtes de la science ; les miracles sortent à la chaîne des laboratoires et sont à la portée du premier mécréant venu pourvu qu’il soit un savant. Le clonage de Dolly (le premier mammifère, un mouton, cloné) a été mal vécu par les religions. Depuis, le biologiste, Craig Venter a synthétisé la première cellule vivante.

Après avoir longtemps été dogmatique et promis le bûcher lors de l’Inquisition, l’église «suit le mouvement» et recule en s’installant dans le concordisme Pour Jean Paul II, le big bang, c’est le fiat lux. Benoît XVI a essayé de s’accrocher à la modernité en conversant avec les astronautes ou en ouvrant un compte Twitter pour échanger avec les internautes. Rien n’y fit, le pape ne comprenait pas le siècle. Enfin, quand il annule le purgatoire qui a fait partie des espérances de millions de chrétiens pendant plus d’un millénaire, il y a de quoi faire douter ses fidèles de faits présentés comme des vérités intangibles. Pour de nombreux prélats de Rome, et sans doute dans l’esprit de Benoît XVI, l’Église catholique meurt de ses mensonges.

Un autre mobile, très sérieux, est également évoqué pour expliquer cette démission surprise. Le Vatican s’apprêterait sans doute à affronter un des pires scandales financiers de son histoire, mêlant blanchiment d’argent sale, voire très sale, détournements de fonds et liens avec diverses mafias. De quoi faire hésiter, il est vrai, un Pape âgé, que l’on dit atteint de la maladie d’Alzheimer et à la foi bien ébranlée par ce qu’il a vécu en huit ans. Certains parlent même, sous couvert d’anonymat, d’«un mandat d’arrêt contre Joseph Ratzinger, alias le pape Benoît, pour crimes contre l’humanité et pour avoir ordonné une conspiration criminelle» ainsi que de «l’émission d’un nantissement commercial par l’intermédiaire des tribunaux contre les propriétés et richesses de l’église catholique romaine à compter du dimanche de Pâques, le 31 mars 2013». Même si on imagine que des arrangements diplomatiques auraient été déployé pour éviter un tel scandale, les récentes malversations au sein de la Banque du Vatican et la nomination de son nouveau directeur depuis le 15 février 2013, Le baron Ernst von Freyberg, qui s’avère être également un ami intime du Pape et un fabriquant de navires de guerre pour la marine allemande, ne clarifient pas l’histoire, laissant penser qu’il n’y a peut-être pas, là encore, de fumée sans feu.

Dernier scandale en date, la publication par le quotidien italien La Repubblica, dans son édition de jeudi, d’une véritable bombe : Benoît XVI aurait renoncé à sa charge après avoir découvert un lobby gay dans les murs du Vatican. L’article, intitulé «Sexe et carrière, les chantages au Vatican derrière la renonciation de Benoît XVI» cite le cardinal espagnol Herranz, l’un des trois prélats qui ont rendu un rapport d’enquête suite au scandale du Vatileaks. Le cardinal parle de dossier «scabreux», dénonce «un réseau transversal uni par l’orientation sexuelle» et affirme que «pour la première fois, le mot homosexualité était prononcé» du côté de la place Saint-Pierre. La Repubblica précise que certaines éminences du Vatican auraient subi «l’influence extérieure» de laïcs auxquels ils seraient liés par des liens de «nature mondaine». Seulement, voilà. Les tenants de cette version sont avant tout des ultra traditionalistes, on dirait intégristes si l’on parlait d’Islam, qui, d’après de nombreux observateurs, entendent profiter de telles fuites pour retarder une probable loi sur le mariage gay en Italie.

Un motif de démission, donc, qui semble de plus en plus douteux. D’autant qu’à l’approche de l’entrée en conclave, les articles à sensation risquent de se multiplier dans la presse italienne, entre rumeurs et intérêts personnels cherchant à peser sur l’élection selon les experts des questions vaticanes.

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