L’Union nationale (UN, parti de l’opposition dissous), est montée au créneau récemment via une lettre parvenue à la rédaction de Gabonreview, à travers laquelle elle commente et analyse le report, au mois de novembre 2013, des élections locales qui devaient initialement avoir lieu en avril dernier.
Le parti de l’opposition dissout par le ministère de l’Intérieur s’exprime à travers une note et pose son regard sur les récentes décisions de la Cour constitutionnelle reportant au 23 novembre 2013 les élections locales qui auraient dû se tenir le 5 avril dernier. Les responsables de cette formation politique passée dans la semi-clandestinité estiment que «la fixation de la date du 23 novembre 2013 pour l’organisation des élections locales est arbitraire car elle ne tient aucun compte du délai de mise en œuvre de la biométrie fixé par l’opérateur privé choisi par les autorités en place, ni du délai des audiences foraines retenu lors des dernières rencontres politiques».
Cette analyse fait dire au parti dissous de Zacharie Myboto que «la décision de la Cour est destinée à éviter l’application des résultats de la fameuse concertation politique parce qu’ils gênaient les projets des autorités en place de mettre en œuvre seules la biométrie. Elle est destinée, comme d’habitude, à imposer à l’Opposition les choix arrêtés par ces autorités, qu’elles ne veulent pas assumer politiquement. Elle annonce un passage en force identique à ceux des élections présidentielles du 30 Août 2009 et des élections législatives 2011».
À travers cette lettre, «l’Union nationale voudrait savoir alors pourquoi le PDG (Parti démocratique gabonais, au pouvoir – ndlr) et Ali Bongo Ondimba esquivent à chaque occasion la transparence électorale alors qu’ils se prétendent forts politiquement et sur le terrain?».
Avant de passer aux analyses et commentaires de la Cour constitutionnelle, l’UN rappelle qu’elle a pris connaissance de la décision de la Cour constitutionnelle relative au report des élections locales qui devaient avoir lieu le 5 avril 2013. «Après le temps de la réflexion, indique-t-elle, elle croit de son devoir de faire part de ses analyses sur son contenu et ses motivations. En effet, si les décisions de la Cour constitutionnelle sont sans recours, aucune loi, aucun principe juridique n’empêche de les commenter, de les discuter et de les critiquer».
L’Union Nationale considère donc que la décision de la Cour constitutionnelle est contradictoire car elle reporte des élections sans relever un cas de force majeure pouvant le justifier. «La Cour pense qu’il n’y a pas «d’événement extérieur, imprévisible et irrésistible dont la survenance a empêché le Gouvernement d’effectuer les opérations de la phase préparatoire des élections»», souligne le texte qui revient sur des cas passés tranchés par la Cour constitutionnelle.
«Une telle affirmation tranche avec ses opinions antérieures dans lesquelles la Cour a retenu la force majeure dans une dizaine de situations diverses et variées pour aboutir au report d’une élection ou d’un événement constitutionnel», indique la lettre qui relève que «ces décisions auraient dû permettre de considérer que le défaut d’existence d’une liste électorale biométrique conforme à la loi nouvelle est un obstacle à l’organisation des élections assimilable, comme dans les cas précédents, à un cas de force majeure. D’ailleurs si la Cour pense qu’il n’y a pas de force majeure, la conclusion logique aurait été qu’elle demande que les élections soient organisées immédiatement. Elle se serait trouvée dans l’impasse».
L’Union nationale estime que le fait de ne pas retenir la force majeure cache des motivations politiques et non juridiques : celles d’empêcher notamment le recours à l’article 4 de la Constitution introduit lors de la dernière modification constitutionnelle et lourdement critiquée par l’Opposition qui permet la prorogation du mandat des élus. C’est pour éviter d’accréditer la pertinence de telles critiques qu’une disposition si stratégique n’a pas été utilisée.
En l’absence de force majeure, la Cour ne motive pas juridiquement le report de 7 mois des élections locales, relève le texte. Les articles 3 et 83 de la constitution sur lesquels elle s’appuie ne lui donnent nulle part le droit de réglementer l’activité des pouvoirs publics, de diriger l’action des autorités politiques ou de se substituer à elles.
Enfin, l’Union nationale affirme son attachement à la biométrie comme garantie d’une liste électorale fiable qui conduise à des élections transparentes, justes et crédibles en vue d’une alternance maîtrisée et d’un climat politique apaisée. Elle «croit fermement que la Conférence Nationale Souveraine est le conclave idéal pour une telle œuvre de reconstruction nationale».