«Dix ans après la Déclaration de Maputo, combien de pays africains ont tenu parole ?», serait-on tenté de s’interroger au vu de l’état embryonnaire dans lequel se trouve encore le secteur de l’agriculture dans la plupart des pays du continent qui avaient pourtant juré de s’atteler à son développement. Avec le New York Forum Africa (NYFA), rebelote les promesses.
Si l’on convient avec Albert Sasson, modérateur d’une discussion lors de la dernière journée du NYFA 2013, dimanche 16 juin, que «l’agroalimentaire crée encore plus de travail que le pétrole», alors pourquoi autant de retard dans le développement de l’industrie agricole sur le continent et particulièrement au Gabon ? La plupart des intervenants à ce grand rendez-vous auront suscité des acclamations et de l’admiration de la part du public composé aussi bien d’experts en la matière que de simples fonctionnaires lorsque, d’un commun accord, ils exhortaient l’Afrique à ne plus rater ce qu’ils ont nommé «deuxième révolution verte».
Pourtant, il y a dix ans encore, lors de la rencontre de Maputo en 2003, les Etats africains se sont jurés d’accorder au moins 10% de leurs budget national avant 2008 dans l’objectif de développer le secteur agricole sur le continent pour ainsi prétendre dans les décennies à venir à une autosuffisance alimentaire pour l’Afrique et en finir, une bonne fois pour toutes, avec la famine et l’insécurité alimentaire qui mine le continent depuis de nombreuses décennies. Si quatre ans après la fameuse Déclaration, un sondage UA/NEPAD effectué en 2007 a conclu que 50% des pays avaient dépensé moins de 5% de leurs budgets nationaux dans le secteur agricole, ce qui représente une baisse par rapport aux 57% de 2003, en 2013, le constat n’en est pas moins amer. Comment croire alors les experts du NYFA qui ont déclaré : «l’autosuffisance alimentaire est une arme importante» ?
Aujourd’hui, il serait question d’un «nouveau départ» à en croire les différents acteurs qui ont pris la parole lors du NYFA et qui, pour la plupart sinon tous, ont soutenu l’idée selon laquelle «l’Afrique peut et doit corriger son retard en matière agricole pour plusieurs raisons». La principale, selon le ministre gabonais de l’Agriculture, Julien Nkoghé Békalé, tiendrait du fait que l’agriculture est véritablement génitrice d’emplois au vu de ses nombreuses filières et spécialités. Mais toujours sous exploitée en Afrique et particulièrement au Gabon, elle souffre du complexe des Gabonais : «C’est une activité salissante qui est très dénigrée, rare sont les parents, bien que qui disposant des moyens, qui encouragent les enfants à faire cette activité», a fait constaté le ministre. Ainsi, pour briser ces conceptions et présupposés, il convient, ajoute Julien Nkoghé Békalé de «changer de paradigme», il est primordial «d’amener les populations à comprendre que l’agriculture est une activité économique et commerciale, un ascenseur social, il faut aller vers des révolutions conceptuelles».
Aussi, les intervenants ont-ils convenu que le développement et la valorisation du secteur agricole dans les pays africains dépend d’un leadership de l’Etat assez fort, mais également de la formation des jeunes dans différents domaines agricoles : intégrer de manière pratique l’agriculture au système scolaire gabonais serait une stratégie.