L’ex-chef rebelle Michel Djotodia a prêté serment dimanche pour devenir le sixième président centrafricain, ouvrant une période formelle de transition de 18 mois devant mener à des élections, dans un pays miné par la violence et menacé d’une crise humanitaire majeure.
Près de cinq mois après sa prise de pouvoir à Bangui, M. Djotodia a prêté serment sur la Charte de transition – qui fait office de Constitution depuis le renversement de François Bozizé – en présence du président congolais Denis Sassou Nguesso, médiateur dans la crise centrafricaine, et du chef de l’Etat tchadien Idriss Déby Itno, président en exercice de la Communauté économique des Etats d’Afrique centrale (CEEAC).
« Mon souhait le plus ardent (…) est d’être le dernier Centrafricain à devoir recourir à la force pour l’accession au pouvoir politique, de sorte qu’enfin l’ordre constitutionnel ne soit pas un vain mot » dans un pays dont l’histoire est jalonnée de mutineries, putschs et rébellions depuis son indépendance en 1960, a-t-il déclaré.
Cette prestation de serment clôt l’organisation du dispositif institutionnel de transition, après la création d’un Parlement provisoire (le Conseil national de transition, CNT), et d’une Cour constitutionnelle de transition.
La mise en place de ces organes avait été réclamée par les chefs d’Etat de la CEEAC lors d’un sommet en avril pour donner une assise juridique au nouveau régime.
Dans un communiqué, le Front pour le retour à l’ordre constitutionnel en Centrafrique (Frocca) du président déchu François Bozizé a qualifié la cérémonie de « mascarade ». « Cette prestation de serment est illégitime car M. Djotodia ne doit sa place qu’à la force des kalachnikovs et des mercenaires étrangers », accuse son texte.
François Bozizé, renversé le 24 mars, se trouve actuellement en France et accuse le Tchad d’avoir activement soutenu la rébellion Séléka.
Population apeurée
La prestation de serment ouvre une période 18 mois au terme de laquelle M. Djotodia s’est engagé à organiser des élections générales. « J’exhorte la classe politique centrafricaine à faire preuve de responsabilité en observant une trêve pendant cette période de transition », a-t-il dit.
Sa tâche s’annonce particulièrement lourde car la Centrafrique s’enfonce jour après jour dans la violence avec les exactions de combattants issus des rangs de l’ex-coalition rebelle.
Même si des tirs d’origine indéterminée ont encore été entendus dans la nuit de samedi à dimanche à Bangui, la situation semble se stabiliser dans la capitale où une force africaine a commencé à se déployer.
En province, en revanche, où des zones entières échappent au contrôle des autorités, la population vit dans un « climat permanent de peur », selon l’ONU.
Le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon a demandé au Conseil de sécurité d' »envisager les options appropriées, y compris l’adoption de sanctions » afin de mettre fin à l’impunité pour les auteurs d’exactions.
Le nouveau président a répété dimanche son engagement à cantonner et à désarmer ces « éléments incontrôlés ». « Le processus (…) se poursuivra et s’étendra progressivement dans les villes de province jusqu’à ce que notre pays soit totalement débarrasser de toutes les armes qui sèment la désolation et endeuillent d’innocentes familles », a-t-il promis.
« Je vous assure qu’il n’y aura plus de place pour l’impunité, car on ne peut bâtir un Etat de droit sans la justice », a-t-il affirmé.
Au fléau des exactions s’ajoute pour les 4,6 millions de Centrafricains la menace d’une crise humanitaire et sanitaire majeure, liée pour partie aux pillages généralisés des stocks alimentaires et des centres de santé qui ont suivi la chute du régime Bozizé.
Selon l’ONU, 1,6 million de Centrafricains ont besoin d’une aide d’urgence et 206.000 personnes ont été déplacées, dont 60.000 ont fui dans les pays voisins.