Repu de plus de quarante années de pouvoir un brin gabégiques, le président Omar Bongo du Gabon a un coup de mou. Et n’arrive plus même ni à faire cesser les chamailleries de ses petiots, ni à faire nommer « son » ambassadeur français à Libreville.
Grand épicurien devant l’éternel, le président Gabonais Omar Bongo n’a jamais trop regardé à la dépense. Ni pensé à sa succession. Mais à 73 ans bien sonnés, voire tassés à en croire ses artères, d’autres y pensent pour lui. Notamment sa petite famille. Larvée depuis des années, la guerre d’attentions que se livrent son ministre de la Défense de fils, Ali et son gendre de ministre des Finances Paul Toungui, n’en est plus tout à fait aux escarmouches.
Dernière épisode en date, la nomination du nouvel ambassadeur du Gabon à Paris. Une place enviée et enviable en même temps qu’assez exposée. Il faut à la fois gérer la tranquillité des multiples résidences françaises du patron Omar… et réagir aux basses et mesquines attaques d’avocats et médias farceurs, qui osent gloser sur la façon dont sont acquis les jolis hôtels particuliers du Mollah, ou la façon dont est utilisée la rentre pétrolière.
Après 6 ans de bons et loyaux services, Jean-Marie Adzé a été poliment démis de ses fonctions. « Reproche lui a été fait de ne pas avoir assez réagi sur les plaintes pour détournement de fonds déposé l’année dernière », glisse un habitué des cénacles gabono-parisiens. La plainte de divers ONG contre Bongo et quelques-uns de ses confrères, déposé à Paris en 2007 avait mis en rage le vieil Omar, malgré le classement sans suite.
Terrain miné à l’ambassade du Gabon
Plutôt classé du côté des « appelistes » de Paul Toungui, Adzé a été remplacé, au grand dam « des rénovateurs » d’Ali –avec ces noms de courant on se croirait au PS français- par une très proche de Pascaline Bongo, ci-devant fille de Papa Bongo et épouse de Paul Toungui, la dénommé Félicité Ongouori Ngoubili. Une fille bien comme il faut, élu dans la province natale du président, le Haut-Ogooue et ancien directrice adjointe de cabinet d’i-celui.
Et depuis l’officialisation de sa venue à Paris début juin, les Gabonais de Paris se sont mis à la valse. « La dame ne connaît pas Paris et n’a pas de réseaux. Pour Ali, c’est une chance que nous devons saisir », glisse gourmand Virgilio Foumangoye. Gabonais bon teint, Parisien depuis longtemps et grenouilleur franc-mac, le quarantenaire n’a jamais caché son peu d’attachement à Adzé. D’où un certain agacement à constater qu’il reste en course, malgré son départ de l’ambassade. « Il veut placer son neveu, Vincent Mpéa, comme conseiller de l’ambassadrice ». Bref ça grenouille sec. D’autant que l’attaché militaire de l’ambassade, le colonel Okemba, fidèle à son statut militaire, se range plutôt du côté d’Ali.
En terrain miné, Madame l’ambassadrice a vu lancer un joli scud il y a dix jours par l’ONG Transparency International, une nouvelle plainte pour corruption…de quoi faire ses preuves.
Mugabe, ce héros
Ces petites chamailleries ne pourraient être qu’un énième épisode de la Saga Borgia qui rythme depuis des années la vie politique du Gabon. A ceci près qu’Omar, pourtant fort impulsif n’a pas réagi aux manœuvres de ses petits. Ni déclaration lapidaire, ni discours pour siffler la fin de la récréation.
Sa dernière saillie a eu lieu à Charm El Cheikh le 30 juin dernier, lors des sommets des chefs d’État africains. Mugabe « a été élu, il a prêté serment, il est là avec nous, alors il est président on ne peut pas lui demander plus. Ils ont fait des élections, je crois qu’il les a gagnées », s’est fendu le doyen des chefs d’État africains pour défendre le leader zimbabwéen. Avant d’ajouter « nous l’avons accueilli comme un héros » . Des déclarations qui ne rassurent pas vraiment.
Omar en pince pour Delapalme
Comme l’avait narré Bakchich, de vieilles concierges des palais africains ne cachent pas leur crainte. « Le Vieux est fatigué, il s’endort désormais en réunion ». Et ses multiples visiteurs, lors de son passage à Paris début juillet, ne sont pas ressortis très optimistes de leur audience à l’hôtel Meurice. « On ne l’avait jamais vu aussi las », ose l’un d’eux.
Même son pouvoir de décision s’en trouve mis en cause. Ces malotrus de l’Élysée n’écoutent pas même ses conseils, à l’heure où ils cherchent un remplaçant à leur ambassadeur à Libreville, Jean-Marc Simon. Le secrétaire général du Palais, Claude Guéant a affiché une fin de non-recevoir à sa requête : nommer Nathalie Delapalme, ex Madame Afrique du Quai d’Orsay pendant dix ans, dans ce joli fauteuil. La dame avait pourtant fait des efforts en faisant comme d’autre le pèlerinage vers le Meurice, accompagné d’un joaillier de la Place Vendôme…
Depuis l’accession au pouvoir de Nicolas Sarkozy, le château avait pourtant plus que ménager Omar Bongo, rappelant même son missi dominici Robert Bourgi dans le circuit. « Nicolas fait dans le thérapeutique, professe à l’envie Maître Bob, il accompagne les anciens dans leur fin de règne ». Il va peut-être falloir passer aux soins palliatifs.