Le portrait de Mamadou Dia, homme politique et ancien président de l’Assemblée Nationale sénégalaise, était l’attraction de la deuxième soirée de la semaine des Escales Documentaires de Libreville avec, en prime, la présence du réalisateur, Ousmane William Mbaye, fils de la journaliste Annette Mbaye d’Erneville, témoin oculaire des événements politiques qui ont amené à la séparation entre Léopold Sédar Senghor et Mamadou Dia.

C’est une tragédie nationale qui rappelle tant de tragédies. La rupture entre Mamadou Dia et Léopold Sédar Senghor, compagnons dans la lutte contre la domination coloniale, ressemble terriblement aux jeux de trahison qui ont fait chuter tant d’hommes politiques profondément nationalistes et africanistes.

Le 17 décembre 1962, Mamadou Dia est mis en arrêt avant d’être condamné à perpétuité par son ami et compagnon politique, Léopold Sédar Sengho

r. C’est alors la fin d’une complicité et d’un chemin commun fait de rêves et d’ambitions partagés. Un chemin qui avait commencé 17 ans plutôt au moment où les colonies françaises d’Afrique bénéficiaient d’un nouveau statut juridique et politique au sein de l’Union Française. Mamadou Dia, pourtant fidèle, est alors accusé d’avoir fomenté un coup d’Etat. Le régime présidentialiste fut adopté au détriment du régime parlementaire. Le traumatisme est total, au point où les Sénégalais e

n parlent encore comme l’événement qui a brisé l’élan d’un pays promis à un avenir radieux.

« Président Dia », déjà primé au FESPACO 2013, est le regard d’une génération sur une époque qui a façonné les nations africaines. C’est un film historique et politique construit autour de plusieurs entretiens avec les acteurs des événements dont Mamadou Dia lui-même, Cheickh Hamidou Kane, écrivain et ancien ministre ou Abdou Diouf, ancien Président du Sénégal et successeur du président Senghor. Les images d’archives nourrissent le documentaire pendant que les sonorités rythment le récit.

Le film a soulevé de longs applaudissements. Le public gabonais a trouvé dans ce récit tragique un peu de son histoire. Comme au Sénégal, le Congo vit s’affronter Lumumba et Kasavubu alors que le Gabon faisait face à la crise institutionnelle qui opposait Léon Mba à Paul-Marie Gondjout, Président de l’Assemblée Nationale gabonaise jusqu’au 16 novembre 1960, quand il fut arrêté aux côtés de Luc Ivanga, Sossa Simawango et d’autres sur ordre de Léon Mba. Un coup d’état institutionnel qui mit presque fin au destin national de Paul Marie Gondjout et au rêve d’un régime parlementaire et démocratique.