Séraphin Moundounga, ministre de l’Education nationale et de l’Enseignement supérieur, a été auditionné, ce mercredi 2 novembre 2013, à l’Assemblée nationale. Les questions orales lui ayant été adressées étaient axées sur la problématique générale des mesures prises pour améliorer le niveau de l’éducation, les résultats des étudiants, le rendement des universités et le système éducatif gabonais. On aura en tout cas compris et appris bien de choses.
Même si, visiblement, les députés ont tout fait pour ne pas remuer le couteau dans la plaie en abordant, de front, la crise qui a secoué le système éducatif gabonais ces dernières semaines, il est pourtant apparu que les questions verbales adressées à Séraphin Moundounga, le ministre de l’Education nationale, qui était auditionné à l’Assemblée nationale ce 27 novembre 2013, se situaient presque toutes dans une logique de résolution des problèmes qui minent le secteur.
Taux d’échec à la FDSE
Devant le Premier ministre, Raymond Ndong Sima, qui devait à son tour répondre aux préoccupations soulevées par les députés concernant le casse-tête chinois de l’éducation, de l’enseignement supérieur et de la Formation professionnelle, le ministre de l’Education nationale qui devait notamment être interrogé sur les résultats à la Faculté de droit et de science économique (FDSE) de l’Université Omar-Bongo, n’a pas raté l’occasion pour décliner un aperçu général du secteur de l’enseignement au Gabon, du pré primaire à l’enseignement supérieur, en passant par le primaire et le secondaire.
Répondant à une question soulevée par le député Albertine Maganga Moussavou par l’entremise de son collègue Narcisse Massala Tsamba, le ministre Moundounga a expliqué, comme pour planter le décor : «Comme toutes les Gabonaises et tous les Gabonais le savent, pendant plus de 15 à 20 ans, avant l’ère de l’Emergence, les causes structurelles des résultats sont tout d’abord le fait d’orientations scolaires et universitaires peu objectives, par l’attribution des bourses aux nouveaux bacheliers, sous la gestion de l’ancienne Direction Générale des Bourses et Stages. Ces orientations avaient perdu leur objectivité d’antan, objectivité ayant permis au Gabon de se doter d’une élite intellectuelle bien formée, pour sombrer dans des déviances multiformes.»
Sans langue de bois il a ensuite indexé «la vente des bourses d’études par les services de cette ancienne Direction Générale des Bourses et Stages, l’attribution des bourses d’études complaisantes, en rupture avec le principe d’équité et sabordant l’excellence et le mérite au profit du rang social des parents de certains bacheliers, en orientant majoritairement vers les Universités gabonaises des étudiants pourtant méritants mais sans soutien particulier alors que des moins méritants étaient envoyés à l’étranger où malheureusement la plupart échouait. Plus grave, l’orientation des bacheliers ne se faisait plus forcément vers des filières en adéquation avec la série du Baccalauréat obtenu et le premier vœu exprimé par les bacheliers». On a donc compris que les déterminismes des résultats déplorés à la FDSE de l’UOB ont les racines bien profondes et découlent bien souvent d’une mauvaise orientation des étudiants.
Et Séraphin Moundounga d’expliquer toutes les difficultés du monde qu’ont eu de nombreux départements de l’UOB pour passer au système LMD et les différents réaménagements de calendrier en ayant découlé. Le ministre de l’Education nationale estime qu’il est prématuré de parler de forts taux d’échec. Car, selon lui, «les résultats connus à ce jour, ne portent que sur la première session d’examens au titre du premier semestre. Il s’agit donc de résultats provisoires, à mi-parcours. Il faut attendre les résultats de la session dite de rattrapage (actuellement en cours) et du second semestre (session ordinaire et de rattrapage) pour tirer des conclusions définitives.» Cependant et pour l’essentiel, on aura noté que ces résultats sont la conséquence de «la situation de contestation permanente, de perturbation récurrente et de troubles savamment entretenus dans laquelle se trouve cet établissement depuis de nombreuses années.»
Âge, reformes du BEPC et du Bac, etc.
Au-delà de bien d’explications, le ministre de l’Education nationale a énuméré les critères liés à l’âge. Et de faire remarquer que les enfants de 15 ans sont souvent encore dans les classes de 5e année, alors qu’il devrait être en 3e, tandis que ceux de plus de 18 sont dans ces classe alors qu’ils auraient dû être en train de passer le baccalauréat. Ce n’est donc qu’autour de 22 ans que la majorité des élèves passent le bac. Or, dans ce contexte et avec les critères en vigueur, ils étaient déjà été éliminés des circuits d’attribution de bourse.
Ce sont ces éléments qui ont été corrigés, a dit le ministre qui estime que les réformes ont permis à tous les élèves de prétendre désormais à la bourse. De même, des mesures ont été prises pour améliorer l’orientation des élèves.
Séraphin Moundounga n’a pas manqué d’aborder les questions relative aux réformes tant décriées ces derniers temps. Notamment celles portant sur le bac et le BEPC. A ce titre le ministre a expliqué que «pour amorcer l’allègement de la surcharge d’épreuves au Baccalauréat, qui causait inutilement le stress aux candidats, les conclusions des Etats Généraux ont préconisé qu’une partie des épreuves, en rapport avec les disciplines accessoires de chaque filière, fasse l’objet d’un élagage en fin de classe de Première, sous forme de Bac 1. Ce qui permet aux enseignants et aux élèves de se concentrer sur les disciplines fondamentales de chaque série, pour approfondir leurs connaissances et leurs compétences dans ces disciplines qui vont être déterminantes pour leurs études supérieures et leur vie professionnelle, tout en maximisant leurs chances de réussite au Bac avec une bonne mention». Et de souligner qu’une bonne mention favorise l’acceptation dans des meilleures universités et grandes écoles étrangères, alors qu’on ne se contentait plus que de s’inscrire «dans les établissements privés, dédiés, dans beaucoup de pays étrangers, aux seuls bacheliers venant du Gabon, simplement comme une clientèle et non une jeunesse à valoriser et à former.»
Le ministre de l’Education nationale a expliqué que des réformes au niveau des structures ont été engagées. Notamment par l’Agence nationale des grands travaux (ANGT), alors que les offres de formations sont restées figées jusqu’à un passé récent. D’où la nécessite de ces nouvelles réformes visant à les rendre professionalisantes.
Suggestions, non-dits et autres approches
Après sa réponse à la question de Mme Maganga Moussavou, les députés Narcisse Massala Tsamba, Paul Mba Abessole, Gisèle Akoghé ou Adrien Nkoghé Essingone sont revenus pour mieux cerner certains points du propos du ministre ou faire des suggestions en vue de l’amélioration des choses. En ce sens, on comprend aisément le propos de Paul Mba Abessole qui a invité le ministre à mettre en synergie les intelligences du pays pour trouver des solutions aux problèmes de l’éducation. Le non-dit ici étant le fait que les syndicalistes indiquent, depuis un moment, le refus du ministre de les associer à la prise de décision. L’ancien maire de Libreville a également invité le ministre à réformer l’école gabonaise en tenant compte des réalités venues d’ailleurs (allusion aux nombreux exemples pris sur la France en termes de modèle) alors que les réalités locales en sont très éloignées.
Mme Akoghé est venue à son tour demander au ministre revenir sur les réformes «impopulaires» relatives au Bac et au BEPC en faisant en sorte qu’il y ait des commissions composées d’enseignants et autres chargées d’étudier, au cas par cas, les dossiers des élèves. Le député a invoqué les nombreux contre temps pouvant être à l’origine de l’échec d’une élève lors d’un examen.
Une chose est sûre, l’exposé de Séraphin Moundounga a démontré qu’en l’absence de communication, le grand public ne comprend pas souvent grand-chose et se laisse aller à la rumeur ou aux facéties de quelques faiseurs d’opinion, pas toujours de bonne foi. L’intégralité des deux discours du ministre de l’Education nationale à l’Assemblée nationale, le 27 novembre 2013, est téléchargeable ICI.