Lassana Bathily, le héros de la prise d’otages de l’hypermarché casher de la porte de Vincennes, a été naturalisé ce mardi 20 janvier au ministère de l’Intérieur pour «acte de bravoure». Pendant plusieurs heures, ce jeune malien de 24 ans qui travaillait sur place a caché un groupe de clients afin d’échapper à la vigilance d’Amédy Coulibaly. Il est désormais Français.
Lassana Bathily est arrivé en France à l’âge de 16 ans. Il est originaire de la région de Kayes dans l’ouest du Mali. Lorsqu’il arrive en France, il prend des cours du soir pour apprendre le français et passe un CAP de carreleur. Mais très vite il doit abandonner ses études pour gagner sa vie. En 2009, il demande un titre de séjour qui lui est refusé, et devient donc expulsable. Il est ensuite soutenu par la Ligue des droits de l’homme et le réseau Education sans frontières. Il arrive à obtenir un permis de séjour. Lassana avait déposé l’été dernier une demande de naturalisation.
Une cérémonie très solennelle
La liste des invités s’annonçait très longue et n’était pas encore bouclée hier. Le jeune Malien a bénéficié d’un soutien massif, puisque 300 000 personnes ont signé une pétition demandant sa naturalisation, et même la Légion d’honneur. La cérémonie qui dure en général une trentaine de minutes se veut très solennelle pour bien marquer l’intégration dans la communauté nationale. Les nouveaux citoyens sont invités à remettre leur titre de séjour en échange d’un livret de nationalité. Sur ce livret est imprimé le célèbre tableau La Liberté guidant le peuple du peintre Eugène Delacroix. A l’intérieur se trouve toute une série de documents officiels : le décret de naturalisation, l’ acte d’état civil français, une lettre de bienvenue du président de la République. Mais aussi une copie de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen et les paroles de la Marseillaise.
Les participants sont en effet invités à chanter l’hymne national. Un moment très émouvant selon les témoignages des personnes qui ont été naturalisées. Généralement, la cérémonie d’accueil dans la citoyenneté française est d’autant plus poignante qu’elle correspond pour la plupart des naturalisés à la fin d’un long processus administratif, parfois très difficile. Ce mardi, elle s’est déroulée en grandes pompes puisqu’elle a eu lieu au ministère de l’Intérieur et a été présidée par Bernard Cazeneuve en personne. Mais pour Lassana Bathily et sa famille, il s’agissait d’un grand moment d’émotion, et selon ses propres mots « une réelle fierté de devenir Français ».
Et la déchéance de nationalité ?
La procédure de déchéance de nationalité est très rare, on ne compte que 8 cas depuis les années 70. Elle est régie par l’article 25 du Code civil, et concerne des personnes ayant commis des actes terroristes sur le territoire français. Elle ne peut être appliquée qu’à des Français ayant une double nationalité, et uniquement si la personne a obtenu la nationalité française depuis moins de dix ans. Les derniers cas connus sont ceux des islamistes Kamel Daoudi et Djamel Beghal. Ce dernier était, entre autres, le mentor d’Amédy Coulibaly. En revanche, une telle sanction ne peut toucher un Français de naissance, cela le rendrait apatride, ce qui est tout à fait impossible au regard de la Convention européenne des droits de l’homme.