À 70 ans, le franco-gabonais Christian Kérangall, président de la Compagnie du Komo (CDK), est, selon le magazine Forbes, le 8e homme le plus riche d’Afrique subsaharienne francophone, avec une fortune estimée à 309,18 milliards de francs CFA.
Le mensuel économique Forbes Afrique vient de taire, dans sa livraison de novembre 2015, les rumeurs sur l’identité de l’homme le plus fortuné du Gabon en dressant le Top 24 des hommes les riches d’Afrique subsaharienne francophone. Christian Kérangall est le seul Gabonais dans ce classement où il occupe le 8e rang avec une richesse évaluée à 520 millions de dollars (309, 18 milliards de francs CFA). Il est devancé et suivi par deux Sénégalais, respectivement Abdoulaye Diao qui pèse à lui seul 321,08 milliards de francs et Yerim Sow, qui accumule pour sa part 303,24 milliards de francs.
Ce classement offre pour la première fois l’occasion de s’amnistier des spéculations autour des personnes telles que Henri-Claude Oyima, Seydou Kane, Claude Sezalory, Ntoutoume Emane et même le légataire universel d’Omar Bongo par ailleurs héritier de Delta synergie, Ali Bongo Ondimba, jusque-là présentés, chacun, comme l’homme le plus riche du Gabon. La classification de Forbes Afrique tord également le cou à l’idée selon laquelle la politique serait la seule voie, au Gabon, pour espérer devenir milliardaire.
L’homme d’affaires franco-gabonais, connu pour être très lié à Ali Bongo et qui réside depuis plusieurs décennies à Libreville, est le «big-boss» de la Compagnie du Komo (CDK). Selon les notes d’une célèbre lettre continentale d’informations confidentielles datant de 2007, ce groupe contrôle au Gabon une dizaine d’autres entreprises dont Sodim (automobile, matériel TP et forestier), Sogafric services (froid, plomberie, électricité, sécurité), Sogi (construction industrielle), Solsi (informatique et Internet), Electra (équipements de bureau et de maison)… et détient des participations dans la SEEG (électricité et eau, 2,78%), Gaboa (oxygène et acétylène, 11,43%), Setrag (transport ferroviaire, 7%), etc. En Afrique, il est aussi présent en Angola (froid, ascenseurs, négoce), en Guinée équatoriale, au Tchad et en Afrique du Sud. En Europe, CDK est actionnaire de la Société financière des Ternes qui contrôle cinq concessions Mercedes en région parisienne et le Bureau technique d’approvisionnement (BTA), ainsi que 50% du cabinet conseil en informatique Artaud, Courthéoux et associés (ACA). La CDK dépasse les 120 milliards de francs CFA de chiffre d’affaires annuel et tire sa puissance de sa participation à 25% dans la BGFI Bank, le premier groupe financier d’Afrique centrale.
Soupçons de l’opinion et confiance des autorités
Mais, pour le commun des Gabonais, cette fortune n’est pas sans soupçons d’une collusion coupable avec la haute sphère politique du pays. À titre d’exemple, Kérangall figurait sur les listes du PDG dans le 5e arrondissement de Libreville pour les élections locales de novembre 2013, avant d’en être retiré, suite au tollé de l’opposition quant à cette candidature. Mais, concernant cette retractation, certains soupçonnaient alors l’intervention, auprès du concerné, du milieu diplomatique et des cercles d’affaires français du Gabon, quand d’autres assuraient que Christian Kerangall n’était pas si partant que ça quant à sa participation aux joutes électorales de cette année-là. Nombreux en tout cas pensent qu’il s’était plié, en premier lieu, à une demande du pouvoir.
Autre exemple : en 2011, plusieurs Gabonais qui espéraient louer leurs voitures au Comité d’organisation de la Coupe d’Afrique des nations de 2012, accusaient Christian Kérangall d’avoir favorisé les entreprises de vente de voitures de son propre groupe (Sodim TP, Toyota, etc.) et d’avoir écarté les véhicules des petits Gabonais de l’opportunité de location automobile créée par la Can 2012. La rancœur de certains était si forte qu’ils avaient souhaité qu’un rapport lui soit demandé au terme de la fête continentale du football de 2012 au Gabon, persuadés qu’ils étaient de ce qu’il y avait nécessairement eu de grosses malversations financières avec les 500 milliards de francs CFA que le patron de CDK avait alors à gérer.
Les plus hautes autorités du pays viennent de lui renouveler leur confiance, puisque Kérangall a de nouveau été nommé, le 28 mai dernier, Haut-commissaire à l’organisation de la Coupe d’Afrique des nations (CAN), qui se déroulera en 2017 au Gabon.