Quand des responsables de l’opposition affirment des prétentions, sans disposer des moyens de leurs visées. A six mois de l’élection présidentielle, le Front uni de l’opposition appelle à la destitution du président de la République et à la mise en place d’une transition devant déboucher sur l’alternance, selon les termes du Professeur Pierre André Kombila, président en exercice du front, il y a deux semaines.
Raison avancée pour cette démarche, le président de la République se serait rendu «coupable d’imposture, de forfaiture et de parjure». Afin de parvenir à cette destitution, le front appelle les populations à se lever et à marcher. Mais, le Pr Kombila, qui s’est exprimé au cours d’une conférence de presse à la Chambre de Commerce de Libreville le 3 février dernier, a fait part du caractère dangereux de cette démarche.
Affirmant que le président de la République s’est rendu coupable d’imposture, de forfaiture et de parjure, les membres du Front de l’opposition pour l’alternance appellent à sa destitution et à la mise en place d’une transition devant déboucher sur l’alternance. Tout émettant son aveu d’impuissance, cette opposition réunie au sein du Front pour l’alternance évoque pourtant la possibilité d’une transition, dont elle sait qu’elle ne surviendra pas, tandis qu’on se trouve à six mois à peine de la fin du présent mandat présidentielle.
Dernière arme, l’espoir que l’actuel président de la République ne pourra présenter, au cas où il souhaiterait rempiler, un acte de naissance différent de celui qui figure dans le dossier constitué en 2009 et qui est l’objet de nombreuses plaintes aussi bien au Gabon qu’en France. Le Pr Pierre André Kombila déduit alors : «Il apparaît clairement, au regard de tout ce qui précède, qu’à ce jour, Ali Bongo Ondimba ne détient aucun document crédible pouvant valablement attester de sa naissance». Et d’ajouter : «Même si d’aventure, pour des raisons qu’on devine aisément, Ali Bongo Ondimba venait à sortir de son chapeau un énième acte de naissance, il serait automatiquement frappé de caducité et confirmerait, une fois de plus, la qualité de faux acte de celui délivré par Serge William Akassaga Okinda et qui lui a permis de perpétrer le coup d’État électoral de 2009».
Et tout de suite après, le président du Front s’est remis en cause, en affirmant : «Le dispositif du prochain coup d’État électoral est déjà en place. Les quatre institutions qui sont à la manœuvre dans le processus électoral d’amont en aval, à savoir la préparation, l’organisation, la proclamation et le contrôle des élections ont déjà choisi leur camp». Avant de poursuivre : «Nous savons pertinemment que ce clan Bongo-PDG ne reculera pas et que face à la détermination du peuple souverain et mobilisé comme ce fut le cas lors des obsèques d’André Mba Obame, il y aura certainement des troubles. Faut-il laisser les Gabonais se faire massacrer par les milices d’Ali Bongo Ondimba, recrutées à coup de milliards dans certains pays de triste mémoire ? Nous disons non à l’effusion de sang en préparation !».
Le discours du Pr Kombila pourrait donc résonner ainsi aux oreilles du peuple : « Je vous dis de vous lever comme un seul homme et de marcher en vue de la destitution du président Ali Bongo. Mais ne suivez pas mon appel, car c’est très dangereux !». Le président du Front uni de l’opposition pour l’alternance administre la preuve que le combat de ce groupement est sans lendemain, que ses acteurs font la politique, la peur au ventre. De plus, les appels au peuple à marcher ne sortent guère de la logique du bouclier, avec le risque ressenti quant au fait de devoir assumer les responsabilités en cas de bain de sang.
Pourquoi a-t-il donc convoqué une conférence de presse, si, avec l’analyse de tous ces paramètres, s’il sait ne disposer d’aucun moyen d’arrêter le processus actuel ? Il aurait pu faire l’économie d’un tel discours et reconnaître que celui dont il dénie l’élection en 2009, il l’accepte finalement comme président de la République, par le fait des institutions qui ont contribué à son arrivée à la magistrature suprême. Par ailleurs, le professeur admet implicitement que ces institutions-là ne feront rien pour l’empêcher de se représenter.
Le doute émis ici pose la question profonde du changement au niveau des institutions. Pour y parvenir, quelles armes utiliser ? La seule voie la plus simple n’est-elle pas, celle de se résoudre à aller affronter le président Ali Bongo Ondimba aux urnes et de prouver, par la mobilisation du peuple derrière soi, qu’il n’a bénéficié d’aucune légitimité durant son mandat ?