Invité de l’émission le Débat africain sur RFI, le président de la Commission électorale nationale autonome et permanente (Cenap), René Aboghé Ella, intervenant, avec des pairs africains, a été amené à parler des dossiers de candidature de la prochaine présidentielle au Gabon.
A l’approche de l’élection présidentielle et des élections législatives que doit abriter le Gabon dans les prochains mois, la Cenap est au centre de bien d’attentions, au regard du rôle qu’elle aura à jouer. En même temps, sur le continent, plus d’une dizaine de pays organisent en 2016 leur élection présidentielle. Ce qui a nécessairement inspiré une émission de Radio France Internationale (RFI) à laquelle ont pris part des représentants de Commissions électorales de quelques-uns de ces pays.
L’objectif, au regard des interventions, était de cerner le rôle de ces institutions en ces périodes cruciales des pays concernés. Gestionnaires des élections, «ces organes ont pris, ces deux dernières décennies, de plus en plus d’importance dans le processus démocratique en Afrique, suscitant partout de réelles interrogations. Mais, [la question est] surtout celle de savoir s’ils sont réellement indépendants, comme le stipule à chaque fois leur nom. Sinon, comment comprendre qu’à chaque fois les acteurs politiques s’emploient à les contrôler ? Quelles sont vraiment leurs prérogatives ? Disposent-ils des moyens pour être autonomes ? Ne sont-ils pas devenus de simples outils aux mains du pouvoir en place ?»
Autant de questions ont été posées au participants à cette émission et chacun y ayant apporté des réponses selon ses vues et le contexte particulier de son pays. A la question comment choisit-on les membres de la Cenap au Gabon ? René Aboghé Ella, président de la Cenap du Gabon, a expliqué que «la compétence est partagée». Pour lui, la responsabilité d’organiser les élections au Gabon incombe à la fois au ministère de l’Intérieur et à la Cenap qu’il dirige depuis une dizaine d’années. Amené à décliner les prérogatives de cette institution, il a laissé entendre que «la Cenap est responsable d’assurer la préparation et la gestion des opérations électorales en dehors de l’établissement des listes électorales qui relève de la compétence du ministère de l’Intérieur». Ce qui a fait demander à l’animateur comment est-il possible que la structure puisse gérer les élections si elle ne s’occupe pas des listes électorales ?
«C’est un peu plus subtil», a répondu René Aboghé Ella. «La compétence de l’établissement des listes électorales incombe à l’administration. Néanmoins, avec la participation de la Cenap, qui collabore un peu à cette activité», a-t-il affirmé avant de préciser que cette organisation découle de la volonté du législateur. «Tous ce qui est fait par la Commission électorale est déterminé par des dispositions des textes bien précis. Les Commissions électorales ne fonctionnent pas selon leur bon vouloir. Elles doivent appliquer un texte qui est le Code électoral. Elles ne peuvent s’inscrire que dans le cadre de cette loi électorale», a-t-il expliqué.
Cette réponse a amené à la question de la neutralité, d’autant plus que le fameux code électoral est supposé avoir été rédigé ou élaboré par le pouvoir ou le régime, de même que la nomination des membres de cette institution pose le problème de son objectivité ou plus simplement de son impartialité. Le président de la Cenap s’en est défendu, expliquant : «là encore, c’est un peu nuancé». Pour lui, la loi électorale résulte d’accords entre acteurs politiques, aussi bien de la majorité que de l’opposition. Et d’indiquer le président de la Cenap est choisi par «une décision de la Cour constitutionnelle en fonction des critères qui sont définies dans la loi électorale, suivant un profil en matière de neutralité, d’intégrité et d’indépendance». Pour ce qui est des autres membres, note-t-il, «on retrouvera, suivant des proportions qui peuvent varier, la représentation des acteurs politiques en présence dans la compétition électorale. Avec en ce qui concerne le Gabon, une représentation paritaire. C’est dire que la Commission électorale est faite, en parité, des partis politiques de la majorité et des partis politiques de l’opposition avec un président désigné parmi les hauts cadres de l’Etat par la Cour constitutionnelle».
Pour René Aboghé Ella l’indépendance de la Commission «doit s’entendre par le fait que l’institution n’obéit à aucune hiérarchie, ne relève d’aucune tutelle et décide de façon tout à fait autonome. Mais néanmoins, on ne peut ignorer le fait qu’elle est financée par l’Etat dans un cadre précisé par la loi électorale». Et l’animateur de RFI de déduire de la Cenap ne peut donc être totalement impartiale.
Sujet de saison, la question de l’acte de naissance du président de la République n’a pas manqué. Et l’animateur de demander à Aboghé Ella s’il demandera son acte de naissance au chef de l’Etat au cas où celui-ci déciderait de déposer sa candidature à la prochaine élection présidentielle. En réponse de quoi, le président de la Cenap a indiqué : «Nous sommes à l’aise avec cette question. Nous allons examiner les dossiers de tous les candidats conformément aux dispositions de la loi et nous allons voir les pièces listées par la loi et la décision sera prise, non par le président Aboghé Ella, mais par l’assemblée plénière de la Commission électorale qui comprend à parité la majorité et l’opposition».
L’on retiendra en tout cas, dans la réponse d’Aboghé Ella, que la décision sera prise par consensus comme il en a été pour d’autres cas dans le passé, à moins que les choses ne soient difficiles et n’aillent alors jusqu’à nécessiter un vote.