Sœur du président, aux côtés duquel elle a mis du temps à s’afficher, et ex-compagne de son challenger, elle est au cœur de toutes les rumeurs à Libreville. Une position bien inconfortable…
Le 26 août, à la veille de l’élection, Pascaline Mferri Bongo est apparue au bras de son compagnon, l’ancien ministre Paul Toungui, lors du meeting de clôture de la campagne de son président de frère. Le pas incertain, une silhouette à la minceur chancelante, l’ex-puissante directrice de cabinet d’Omar Bongo n’est plus qu’une ombre que l’on aperçoit parfois entre deux brefs séjours à l’étranger.
Très amaigrie, elle vit entre les États-Unis et le Gabon, où l’attend Toungui, bunkerisé dans sa villa de la Sablière à Libreville ou dans son vaste domaine d’Okondja (Haut-Ogooué). Le vieux mathématicien lui est resté loyal, voire dévoué, faisant la sourde oreille aux sollicitations de ses anciens amis qui ont vainement tenté de le pousser à la démission quand le Parti démocratique gabonais a paru prendre l’eau de toutes parts.
Longtemps, ils ont attendu un signe, jusqu’à ce qu’il devienne évident que « Monsieur Gendre » ne bougerait pas. Tous ou presque, « appellistes » convaincus, ont fini par rejoindre Jean Ping, ce rival qui lui a toujours fait de l’ombre dans le cœur de Pascaline. « Sa position n’est pas confortable, entre la fratrie Bongo et Ping, qui demeure le père des enfants de sa compagne », résume un journaliste qui lui est proche. Le 26 août, assis tous les deux à la tribune, ils écoutent, impassibles, le candidat Ali dézinguer Jean Ping. Les oreilles de « Madame Sœur » ont dû siffler quand Ali a raillé « ce père qui renie ses enfants ».
Mais Pascaline a fait vœu de silence. Elle ne dit rien en dépit des coups qui pleuvent sur ses frêles épaules. A-t-elle financé Jean Ping, comme le dit la rumeur à Libreville ? « Elle ne m’a rien donné et elle ne me donnera rien, répond l’intéressé. Elle a été éduquée pour rassembler toute cette famille. Il est exclu qu’elle me soutienne contre son frère. »
Entre Pascaline et Ali, l’entente est-elle pour autant cordiale ? Rien n’est moins sûr
Pour son mariage cet été, leur fille, Nesta Bongo-Ping, a essayé de rassembler ses parents, qui ne se parlent plus depuis que son père a refusé de se retirer de la course à la présidence comme Pascaline le lui avait demandé courant 2014. Ce dernier s’était dit disposé à venir à n’importe quelle condition, mais Pascaline ne souhaitait pas la présence de Ping. Celui-ci n’a donc pas été invité. Mais Nesta a beau s’être mariée sans lui, elle refuse de le lâcher. Son époux était d’ailleurs présent dans la villa de Ping pendant la folle nuit de violences qui a suivi la publication des résultats.
Entre Pascaline et Ali, l’entente est-elle pour autant cordiale ? Rien n’est moins sûr. Le frère a toujours en travers de la gorge d’avoir été tenu à l’écart de la maladie et d’une partie des obsèques de son père. « Je ne sais pas ce qui s’est passé dans la chambre de cette clinique espagnole », se plaint souvent le président. Ali a également peu apprécié l’opacité avec laquelle la notaire Lydie Relongoué-Bevigna a géré la succession Bongo. Elle était bien trop proche de sa sœur à son goût.
Et Pascaline ? Elle n’a jamais digéré d’avoir été chassée du Palais, d’où elle cornaquait les régies financières du pays, et de voir ses réseaux méthodiquement démantelés. Ces dernières années, quelques-uns de ses fidèles se sont également plaints de ces fuites judiciaires qui ont fait le miel de la presse, à l’instar de l’affaire des 86 millions de dollars (76,4 millions d’euros) dépensés en billets d’avion et facturés par une société suisse à la présidence gabonaise.
Georges Dougueli