Principale personnalité visée par l’astreinte territoriale de plusieurs opposants, Jean Ping s’est prononcé sur cette décision gouvernementale dans une interview accordée au magazine français L’Obs. Si la mesure a été levée, elle a tout de même arraché quelques commentaires acerbes au principal concerné : «ils ont voulu nous rappeler que nous étions en sursis», a déclaré Jean Ping.
Plusieurs sujets d’actualité ont été abordés par Jean Ping, dans l’interview accordée le 10 septembre à L’Obs, un magazine d’actualité française. Parmi ces sujets, figure en bonne place l’astreinte territoriale des opposants. En effet, ce dernier a récemment été accusé de «trouble à l’ordre public» et interdit de quitter le territoire, comme plusieurs personnalités d’opposition, avant que la mesure ne soit levée par le ministère de l’Intérieur le 8 septembre.
«Nous vivons dans une dictature brutale, violente, qui bafoue quotidiennement toutes les libertés fondamentales», a déploré Jean Ping. «Le 31 août marque la date anniversaire du massacre de 300 manifestants de l’opposition, au lendemain des élections truquées qui ont portée Ali au pouvoir… Ils savaient que nous allions célébrer nos martyrs. Ils ont voulu nous rappeler que nous étions en sursis, sous une épée de Damoclès», a poursuivi Jean Ping.
Pour lui, cette mesure n’était que le prolongement d’une situation perdurant depuis la fin de la présidentielle 2016. «Depuis un an, un an et demi, ma résidence est encerclée par les forces de l’ordre. Je ne sais pas si c’est pour me protéger ou pour m’assigner à résidence… C’est vrai, ils ne m’empêchent pas de sortir, mais ils sont constamment derrière moi», a-t-il déploré. «Au Gabon, tout le monde sait que je suis menacé : la presse, l’opposition, l’opinion publique. Je fais attention à tout», s’est-il permis d’ajouter.
Qu’à cela ne tienne, Jean Ping est convaincu que le pouvoir symbolisé par Ali Bongo cèdera tôt ou tard. «Ali va partir. D’une manière ou d’une autre. Cela peut prendre, deux ou trois mois, peut-être moins, peut-être un peu plus, mais cela finira par arriver», a-t-il affirmé. Pour le candidat à la dernière présidentielle, deux options s’offrent ainsi à l’actuel chef de l’Etat.
«Première option : il part car il est gravement malade, comme on le dit à Libreville, mais je n’y crois pas. On dit aussi qu’il peut s’enfuir, mais ce n’est pas le plus probable. Deuxième option : ses propres partisans vont l’abattre car il est devenu gênant. A l’intérieur du Mouvement gabonais des amis d’Ali bongo Ondimba (Mogabo), son propre camp, ses hommes lui cherchent déjà un successeur», a confié Jean Ping.
En attendant l’une ou l’autre de ces hypothétiques issues, Jean Ping a dit tempérer ses partisans et, plus généralement, les Gabonais. «J’essaie de calmer les Gabonais, mais ce n’est pas facile. Quand je leur dis de patienter, ils me soupçonnent d’être prêt à me compromettre. Or c’est exclu (…) Mes partisans me disent que si je passe un compromis quelconque avec Ali, ils s’en prendront à moi et mettront le feu à ma demeure», a-t-il indiqué.
Par ailleurs, Jean Ping a également dit compter sur des soutiens extérieurs pour faire chuter le régime d’Ali Bongo. «Je bénéficie de soutiens importants dans le monde, même s’il m’est difficile de les nommer. Je peux juste vous dire que j’ai des partisans importants au sein de l’Union Africaine. Ils me l’ont fait savoir», a-t-il soutenu.
Tout comme il a présenté un certain nombre de garanties à Ali Bongo en cas de départ : «Quant à Ali, s’il s’en va, je suis prêt à lui garantir trois choses. Qu’il puisse circuler librement, partir et revenir. La sécurité de ses biens. Je promets enfin au pays un processus de paix, comme l’a fait Mandela en Afrique du sud : Justice et réconciliation», a conclu Jean Ping.