Deux journalistes de l’agence audiovisuelle Capa ont été interpellés mardi à Libreville, au Gabon, puis libérés aujourd’hui. Pierre Morel et Olivier Pronthus, qui réalisaient un reportage pour l’émission de Canal+ « L’effet papillon », étaient accusés d’avoir tourné des reportages alors qu’ils ne disposaient que de simples visas de tourisme.
Mais sur quoi enquêtaient-ils ? La ministre gabonaise de la Communication, Laure Olga Gondjout, a indiqué à l’AFP que, lorsqu’ils avaient demandé leurs visas, les journalistes avaient indiqué travailler « dans le cadre d’une enquête sur l’affaire (Bernard) Kouchner ». La ministre assure leur avoir refusé le visa, « parce que nous estimons que c’est une affaire franco-française ».
La version de Capa est radicalement différente. « Nous, ce sont les pygmées qui nous intéressent !, s’exclame Victor Robert, rédacteur en chef de l’émission, interrogé par @si. Nos journalistes n’ont tourné que dans les parcs nationaux, avec une autorisation en bonne et due forme, obtenue sur place. Ils n’ont pas été retenus par la police et sont sur le chemin du retour. »
Pour Robert, « il y a sans doute en ce moment une méfiance du Gabon sur les journalistes français ». Et pour cause : la polémique ouverte par la publication du livre de Pierre Péan est loin d’être éteinte. Et au coeur de la bataille, on trouve le rapport rédigé par Kouchner sur le système de santé gabonais, alors qu’il présidait le groupement d’intérêt public Esther, consacré à la coopération hospitalière entre pays du Nord et pays du Sud. Péan pointe le douteux mélange des genres; Kouchner se défend en soulignant que ce rapport a permis de créer une sécurité sociale pour les Gabonais les plus démunis.
L’avocat du ministre des Affaires étrangères, M° Georges Kiejman, insistait d’ailleurs sur la qualité de ce rapport dans le Journal du dimanche : « L’avocat a en main un premier rapport signé Kouchner de 107 pages, daté de 2004, «avec annexes et graphiques», intitulé «Le constat». Bernard Kouchner s’est ensuite rendu au Gabon pour mener son étude. Il a remis au ministère de la Santé de Libreville un deuxième rapport, de 25 pages, daté d’août 2004, intitulé «Les propositions de réforme». » Dans le même article, le médecin et élu UMP Bernard Debré, qui a travaillé bénévolement plusieurs fois dans le pays (et soutien de Péan lors de son procès sur son livre sur le génocide rwandais), se dit lui « choqué » par la facture demandée pour l’étude de Kouchner. Il insiste sur la mauvaise qualité des soins aux Gabon : « Quand on va aider ces pays, on évite, à mon sens, de demander de l’argent. »
Par Dan Israel le 11/02/2009