Le leader de l’opposition au Zimbabwe, Morgan Tsvangirai, devient mercredi Premier ministre de son rival de toujours, l’octogénaire président Robert Mugabe, avec lequel il va devoir reconstruire un pays en ruine.
« La prestation de serment de Tsvangirai symbolise l’aube d’une nouvelle ère » pour le Zimbabwe, souligne Daniel Makina, de l’Université d’Afrique du Sud. « Mais de là à savoir si le gouvernement d’union va réussir… »
L’ampleur des attentes, après les mois de statu quo qui ont suivi la signature le 15 septembre d’un accord de partage du pouvoir, se lit dans les déclarations qui se sont enchaînées mardi.
Le Fonds des Nations unies pour l’enfance (Unicef) a dénoncé un « désastre national » dans l’éducation, avec 94% des écoles fermées dans les zones rurales. Les enseignants ont fui les violences déchaînées par le régime après sa défaite aux élections générales du 29 mars 2008. Pour Oxfam, la priorité va à « la crise humanitaire ». Plus de la moitié des Zimbabwéens sont menacés de famine et le délabrement des infrastructures sanitaires a généré une épidémie de choléra dont 3.400 personnes sont mortes en cinq mois.
Et Amnesty International réclame la libération immédiate d’une trentaine de militants de l’opposition.
La crise née des élections du 29 mars a précipité l’effondrement de ce qui restait d’une économie autrefois prolifère. L’hyperinflation défie l’entendement, à plusieurs milliards pour cent. La production est au point mort. L’un des hommes clés du gouvernement, qui devrait entrer en fonction vendredi, est le secrétaire général du Mouvement pour le changement démocratique (MDC) de M. Tsvangirai, Tendai Biti. Au ministère des Finances, il devra convaincre les donateurs internationaux de délivrer les milliards de dollars d’aide indispensables à la reconstruction.
Le MDC a longtemps refusé de rejoindre un gouvernement où il se verrait assigner une place symbolique. Si le MDC a finalement plié devant la pression régionale, « le doute persiste sur la réalité de son pouvoir », souligne M. Makina. La perspective d’élections anticipées est évoquée. En attendant, M. Mugabe, 84 ans, reste à la tête du pays qu’il dirige depuis l’indépendance en 1980.