Une rencontre de haut niveau entre le Ministre en charge de la forêt, de la mer et de l’environnement de la République Gabonaise, le Chef de Délégation de l’Union Européenne au Gabon, le Représentant de la FAO au Gabon et un représentant du Centre de Recherche Agricole pour le Développement International (CIRAD) s’est tenue le 03 novembre afin de marquer le lancement d’un nouveau projet intitulé « Gestion durable de la faune ».
Ce projet s’inscrit dans le cadre d’un programme multipartenaires de 45 millions d’euros couvrant douze pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, visant à stopper la chasse non durable de la faune sauvage, à conserver le patrimoine naturel et à renforcer les moyens de subsistance, ainsi que la sécurité alimentaire des populations rurales.
Le Gabon est l’un des pays bénéficiaires de ce programme qui contribuera à la conservation et à l’utilisation durable de la faune sauvage en réglementant la chasse, en renforçant les capacités de gestion des communautés autochtones et rurales et en augmentant l’offre de produits carnés et de poissons d’élevage.
Piloté par la FAO, le programme s’appuiera également sur l’expertise du CIRAD, leader pour la mise en œuvre de la composante programme au Gabon. La FAO et le CIRAD mettront à profit notamment les acquis d’un partenariat avec l’Etat gabonais initié en 2012 dans le cadre d’un projet sous-régional financé par le Fonds pour l’Environnement Mondial et visant à tester la gestion participative de la faune pour rendre durable la chasse villageoise. Ce nouveau programme permettra ainsi de continuer les réflexions et efforts amorcés.
Le Représentant de la FAO au Gabon, Hélder Muteia, a déclaré: « la faune sauvage représente l’une des principales sources de protéines et de moyens de subsistance pour les populations rurales du Gabon. Les viandes sauvages sont également un aliment à forte valeur traditionnelle, reflétant le lien solide des populations urbaines avec leurs racines rurales. Les mesures de gestion à développer doivent prendre en compte cette dimension pour une meilleure appropriation, tout en cherchant à susciter les changements de comportements nécessaires à pérenniser la ressource : là réside le défi que nous devons relever ».
«C’est la première fois qu’un programme aborde ces deux questions – la conservation et la sécurité alimentaire – main dans la main », a déclaré M. Helmut Kulitz, chef de la délégation de l’Union Européenne au Gabon. « Ce type d’effort collectif et d’approche globale est essentiel pour atteindre notre double objectif de protection de la biodiversité, tout en assurant la sécurité alimentaire et économique de certaines des populations les plus vulnérables et politiquement marginalisées de la planète. Cet appui se veut complémentaire d’autres appuis que l’Union Européenne apporte par ailleurs au Gabon dans le secteur forêts – environnement, en reconnaissance notamment de son leadership en matière de préservation de la biodiversité ».
Dr. Daniel Cornelis, chercheur au CIRAD, impliqué depuis la conception du programme, d’ajouter : « le Gabon constitue un modèle intéressant car sa faible densité de population et une pression de chasse encore modérée offrent des perspectives sérieuses de tester et mettre en place localement les conditions d’une exploitation durable des espèces animales sauvages les plus résilientes, sans compromettre le maintien de la biodiversité et des rôles écologiques essentiels de la faune. Ce n’est clairement pas le cas partout en Afrique Centrale, et nous croyons que l’engagement du Gouvernement gabonais sur les questions de développement durable est un atout pour réussir. »
Le Ministre de la forêt, de la mer et de l’environnement, Pacôme Moubelet, a salué « cette approche ambitieuse qui permettra de minimiser les risques de déficit protéique pour les familles rurales et de répondre à la demande croissante de nourriture en milieu rural et urbain, tout en contribuant à réduire la dépendance aux produits alimentaires d’importation et à multiplier les opportunités de développement local et de diversification économique ». Le projet spécifique au Gabon entrant dans sa formulation détaillée et finale, il a souhaité « que ce processus soit le plus inclusif possible afin de couvrir l’ensemble des enjeux de développement rural, d’aménagement du territoire, d’approvisionnement alimentaire, de développement du tourisme, de la recherche scientifique et de préservation du patrimoine culturel que le projet sous-tend. » Il a conclu la rencontre en présentant ses remerciements à l’encontre de l’Union Européenne, de la FAO et du CIRAD, et en exprimant sa satisfaction de « l’opportunité que toutes les parties puissent ensemble contribuer à la conception finale du projet dans un esprit de collaboration franche et transparente».
« Crise de la viande sauvage »
Le niveau de chasse et de pêche au Gabon affecte indéniablement les populations d’animaux sauvages dans les forêts. Des mesures doivent être mises en place pour anticiper l’accroissement des niveaux de prélèvements au-delà de niveau soutenable à long terme et limiter l’impact de la chasse sur les espèces animales les plus vulnérables.
De nombreux pays font déjà face à une « crise de la viande sauvage ». Le programme estime que, par exemple, dans le bassin du Congo, quelque 4,6 millions de tonnes de viande sauvage sont consommées chaque année, soit l’équivalent d’environ la moitié de la viande bovine produite dans l’Union européenne.
Si la chasse de la faune n’est pas réduite à des niveaux durables, non seulement la biodiversité sera perdue, mais aussi un nombre incalculable de familles, dont les moyens de subsistance dépendent des ressources naturelles, souffriront d’une insécurité alimentaire et d’une malnutrition infantile débilitante.
Passage de la viande sauvage à d’autres sources de protéines animales
Le programme de gestion durable de la faune travaillera en étroite collaboration avec les autorités nationales pour fournir aux communautés rurales des sources de protéines alternatives telles que le poulet, le bétail ou le poisson d’élevage. Cela contribuera à dissuader la chasse des espèces menacées, à favoriser le rétablissement de leurs populations et à réduire les risques pour la salubrité des aliments pouvant être associés à la consommation de viande sauvage.
Dans les endroits où la production de bétail est limitée en raison de conditions climatiques défavorables, ou lorsque la viande importée est indisponible ou inabordable, les gens continueront à dépendre des animaux sauvages pour nourrir leurs familles. Cependant, des mesures telles que la reconnaissance des droits fonciers coutumiers des gens peuvent les encourager à s’engager davantage dans la conservation de la faune sur leurs terres et à éviter la chasse inutile.
En revanche, dans les grandes zones urbaines, la viande sauvage est vendue et consommée moins comme une nécessité nutritionnelle, mais plus comme un produit de luxe. Bien que la proportion de citadins consommant de la viande sauvage soit souvent faible, la demande nette peut être énorme. Dans de tels cas, des restrictions sur la consommation de viande sauvage doivent être mises en place pour que les populations rurales puissent continuer à bénéficier de cette ressource cruciale pour leur bien-être.
Améliorer la gestion de la faune
Le programme vise à aider les gouvernements à développer des politiques proactives et à renforcer les cadres de travail juridiques afin de réduire la consommation de viande de brousse pour lui faire atteindre des niveaux durables, et ce, sans compromettre la sécurité alimentaire et économique des populations qui dépendent de la chasse de la faune pour leurs moyens d’existence et leurs besoins nutritionnels.
L’initiative se focalise également sur la création d’emplois dans le secteur agricole, sur l’autonomisation des femmes et sur la protection des droits des populations autochtones et traditionnels, en vue de leur garantir un accès aux ressources naturelles dont ils dépendent pour leurs moyens d’existence et sur lesquelles est basée leur culture.
Le programme contribue à la réalisation de plusieurs Objectifs de développement durable (ODD) liés à la sécurité alimentaire, à la gestion durable des terres et à la protection de la biodiversité, et en particulier à l’ODD 15, selon lequel cette année « le braconnage et le trafic d’animaux sauvages restent de vives sources d’inquiétude ».
Source : FAO