Wilson-André Ndombet, enseignant à l’université Omar-Bongo de Libreville, observe d’un œil critique les changements au sommet de l’État.
Jeune Afrique : La nomination de Brice Laccruche Alihanga comme directeur de cabinet représente-t‑elle un nouvel élan dans le septennat d’Ali Bongo Ondimba (ABO) ?
Wilson-André Ndombet : Je ne pense pas. Le chef de l’État cherchait un successeur à Maixent Accrombessi depuis que celui-ci est tombé malade. Il voulait quelqu’un d’assez proche de lui et des milieux financiers. Le nouvel arrivant est surtout rassurant pour le président. De plus, c’est un message politique : comme Accrombessi, qui a été élevé à l’étranger, Brice Laccruche Alihanga, qui est un métis, fera face à un certain ressentiment de la part des Gabonais. C’est une façon pour Ali Bongo Ondimba de dire que peu importent les critiques, lui seul prend les décisions.
Entre le remaniement ministériel et l’arrivée de toutes ces nouvelles têtes dans l’administration, on a pourtant l’impression d’un grand changement…
Encore une fois, on est dans la continuité. Beaucoup de « nouveaux » sont des « parents de » ou des « amis de » qui étaient programmés pour être là. Un père et un fils peuvent toujours être vice-président et ministre. On recherche davantage l’occupation de l’échiquier politique que l’efficacité. C’est la géopolitique gabonaise, qui assure la sérénité du président. Mais y a-t‑il une réelle volonté de maîtriser le budget, de créer de la richesse ?
On peut faire autant de « tsunAli » que l’on veut, cela ne mettra pas pour autant le pays sur les rails
On compare beaucoup ce « tsunAli II » à ce qui s’est passé en 2009, au début du premier mandat d’ABO. Qu’en pensez-vous ?
Ce qui s’est déroulé en 2009 était intéressant. Des personnalités qui occupaient la scène depuis vingt ou trente ans ont été écartées. Mais cela n’a pas suffi car, comme aujourd’hui, on a fait place à des jeunes, certes bons militants, formés aux États-Unis ou en France, mais sans expérience de la chose publique. On ignore en revanche des gens bien plus expérimentés mais qui ne font pas partie du cercle restreint. Dans ces conditions, on peut faire autant de « tsunAli » que l’on veut, cela ne mettra pas pour autant le pays sur les rails.
Par Mathieu Olivier