Le Gabon a certes construit ou rénové des hôpitaux, acheté du matériel ces dernières années, mais cela ne suffit pas pour une riposte efficace contre la pandémie de la Covid-19, estiment les médecins qui notent plusieurs carences, notamment en respirateurs et centrales d’oxygène. Cet avis contredit le président de la République qui affirme que son pays est suffisamment équipé pour faire face à la pandémie du coronavirus.
L’optimisme et la certitude d’Ali Bongo quant à la qualité du système sanitaire gabonais, jugé suffisamment outillé contre la Covid-19, sont loin d’être partagés par les premiers acteurs de la lutte contre cette crise sanitaire, dont le docteur Adrien Mougougou. Le président du Syndicat des médecins fonctionnaires du Gabon (Symefoga) affirme en effet le contraire. Dans une interview accordée à nos confrères d’Info241, il indique continuer, ses collègues et lui, à «se débrouiller avec les moyens du bord».
Si la confiance d’Ali Bongo en la qualité du système sanitaire gabonais repose notamment sur le nouveau laboratoire de dépistage massif récemment érigé au sein du palais des sports de Libreville, et sur les lots de matériel médical acquis ou offerts par des partenaires internationaux durant les deux derniers mois, pour le président du Symefoga, il est nécessaire que l’on fasse un tout petit peu attention, car ces éléments ne suffisent pas pour faire face à toute éventualité.
«Nos structures sanitaires seront elles capables de pouvoir faire face à un afflux de positifs asymptomatiques soient-ils ? Sachez que depuis longtemps, nous nous plaignons de la baisse drastique du personnel de santé. Donc dépister, c’est bien, mais il va falloir que l’on s’organise pour pouvoir prendre en charge tous ceux qui seront positifs», a fait remarquer le docteur Mougougou.
Même son de cloche au Copil, où selon le porte-parole, les hôpitaux retenus pour le traitement de la Covid-19 sont quasiment saturés. Ce qui explique aujourd’hui les plaintes des patients en attente de prise en charge. «Au niveau du CHU de Libreville, nous avons sensiblement une capacité litière de 500 lits, dont 200 lits attribués à la prise en charge du Covid-19, et 150 à l’hôpital des instructions des armées d’Akanda», a indiqué le Dr Guy-Patrick Obiang au cours de l’une de ses précédentes conférences de presse, assurant que la «meilleure prise en charge c’est la prévention (port obligatoire des masques, respect de la distanciation sociale, le respect des mesures barrières)».
Entre le manque de matériel, le non-renouvellement du personnel soignant, la faiblesse de la capacité d’accueil des malades, l’écart demeure encore très important pour clamer être suffisamment équipé contre le Covid-19, estime le Dr Adrien Mougougou. Pour lui, il n’existe que 30 respirateurs «fonctionnels» au Gabon. Pourtant, le gouvernement parle, lui, de 700 lits et 100 respirateurs «pour les cas les plus critiques», réquisitionnés pour la lutte contre le Covid-19.
«L’équipement ce n’est pas seulement ce qu’on appelle équipements de protection individuels (EPI), l’équipement, c’est le barboteur que nous utilisons pour donner l’oxygène aux gens. Beaucoup de malades ont besoin d’oxygène. C’est ce même oxygène qui pose problème aujourd’hui au CHUL qui est en première ligne de la prise en charge des malades», a-t-il souligné, non sans marteler que «les centrales d’oxygène sont tombés en panne bien avant que le Covid-19 n’arrive.»
Avec 14 décès et 2135 cas recensés au 25 mai, le Gabon est le 14e pays africain le plus touché par la pandémie du Covid-19, derrière la République démocratique du Congo.