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Supputations sur un changement de Premier ministre : En toute lucidité et avec recul

Le choix du prochain chef de gouvernement ne saurait se réduire à une affaire de genre ni être guidé par le désir de céder à un effet de mode.

Angélique Ngoma, Denise Mekam’ne Taty, Madeleine Berre, Rose Christiane Ossouka Raponda : le choix d’un chef de gouvernement ne saurait se réduire à une affaire de genre. Le président de la République n’aurait rien à gagner à s’enfermer dans une option cosmétique. © Gabonreview

Encore une fausse-bonne idée. Toujours cet attrait pour le strass et les paillettes. Depuis quelques jours, l’idée d’un changement de Premier ministre fait son chemin. Sur les réseaux sociaux et même dans une certaine presse, le casting se poursuit. Quatre personnalités féminines font la course en tête : Madeleine Berre, Denise Mekam’ne Taty, Angélique Ngoma et, Rose Christiane Ossouka Raponda. Sans édifier l’opinion sur la plus-value de chacun de ces noms, certains les présentent comme incontournables. Pour eux, la nomination d’une femme se suffit à elle-même. Mais le choix d’un chef de gouvernement ne saurait se réduire à une affaire de genre. Il ne saurait non plus être guidé par le seul désir de céder à un effet de mode. De haute portée politique, cette décision doit plutôt être la résultante d’une analyse du contexte, des défis et états de service des candidats.

Emprise de la gent féminine sur la marche du pays

Même si elles peuvent avoir de bonnes raisons de dénoncer un déséquilibre numérique, les femmes jouent un rôle de tout premier plan dans la vie politique, institutionnelle et administrative nationale. Depuis bientôt 30 ans, la Cour constitutionnelle est dirigée par Marie-Madeleine Mborantsuo. De par le positionnement de cette institution, du fait de ses attributions, son inamovible présidente apparait comme l’une des deux ou trois personnalités les plus puissantes du pays. De l’avis général, elle est le principal pilier du régime. Présidente du Sénat entre 2008 et 2014, Rose Francine Rogombé a assumé l’intérim de la présidence de la République, organisant la présidentielle anticipée d’août 2009 dans des conditions contestées. Depuis 2015, Lucie Mboussou Milebou-Aubusson trône à la tête de la chambre haute du Parlement. Numéro 3 dans l’ordre de préséance de la République, elle ne s’illustre ni par ses prises de position politiques ni par des initiatives novatrices. Fortement décriées, les institutions nationales sont, quelque part, le produit de la pratique politique des femmes.

Depuis octobre 2018 et le déclenchement des ennuis de santé d’Ali Bongo, l’emprise de la gent féminine sur la marche du pays n’a eu de cesse de se renforcer. Même si elle aura beau jeu de mettre en avant la collégialité supposée des décisions, Marie-Madeleine Mborantsuo a pris sur elle d’empêcher à l’article 13 de la Constitution de déployer son plein effet. Dénonçant un « acharnement politique« , ses huit collègues n’ont d’ailleurs pas hésité à voler à son secours en mars 2019, proclamant être « solidaires entre eux et par conséquent avec le président de l’institution. » Pendant ce temps, dans les salons feutrés comme dans les bistrots de la capitale, dans les milieux autorisés comme au sein du bas peuple, un nom revenait dans toutes les conversations : Sylvia Bongo Ondimba. De par son rôle politico-institutionnel, fantasmé ou réel, l’épouse du président de la République suscite toujours moult interrogations. Aujourd’hui encore, d’aucuns lui prêtent la réalité du pouvoir d’Etat. Pour certains, l’arrivée d’une dame à la Primature serait la traduction de sa mainmise sur la conduite des affaires publiques.

Ni révolution ni ancrage dans la modernité encore moins gage de réussite

Idée séduisante à première vue, la nomination d’une femme à la Primature ne serait ni une révolution ni la marque d’un ancrage dans la modernité encore moins un gage de réussite. En vue de faire face à l’après-covid, le choix du futur Premier ministre doit être guidé par trois éléments : compréhension du fonctionnement de l’Etat, capacité à inspirer la confiance et sens de l’organisation. Or, sur ces points, aucune femme ne se démarque réellement. Quand bien même elles plaideront la discipline de groupe ou diront agir sur ordre, elles ne pourront prétendre être reléguées à des rôles de moindre importance. Ayant, pêle-mêle, occupé les portefeuilles de la Défense nationale, de la Justice, du Budget, du Commerce, de l’Enseignement supérieur ou la mairie de Libreville, Madeleine Berre, Denise Mekam’ne Taty, Angélique Ngoma et Rose Christiane Ossouka Raponda doivent être jugées sur leurs bilans respectifs et non sur leur féminité. Si on ne doit pas les condamner d’emblée, on ne peut leur faire la courte échelle par simple coquetterie.

S’il venait effectivement à décider de changer de Premier ministre, le président de la République n‘aurait rien à gagner à s’enfermer dans une option cosmétique. En toute lucidité et avec recul, il devra faire un état des lieux, c’est-à-dire inventorier les problèmes et définir les urgences. Sur ce fondement, il pourra ensuite déterminer les résultats attendus, lister les tâches pour, in fine, dresser le portrait-robot du futur Premier ministre. En y allant de la sorte, il se donnerait les chances de faire émerger une personnalité en phase avec la réalité du moment. Autrement, ce serait la poursuite des effets d’annonce et errements du passé.

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