Faire tomber le régime Bongo Ondimba par les armes. Tel est l’objectif de l’Armée gabonaise de libération nationale (Le Mamba). Difficile de se convaincre du sérieux de cette organisation secrète.
Rencontrer les animateurs du Mamba n’est d’ailleurs pas chose aisée. Les « combattants de l’ombre » ne se dévoilent pas facilement persuadés d’être traqués par les services de renseignement gabonais.
Paranoïa ou réalité ?
Cette Armée a-t-elle une existence réelle ou virtuelle ? Est-elle une menace sérieuse pour le président Bongo Ondimba récemment réélu à la tête du Gabon ? Autant d’interrogations auxquelles a répondu Curtis Bezauna Mabika, le porte-parole de l’Armée gabonaise de libération nationale.
Afriquecentrale.info : Sur votre site Internet on peut lire que l’Armée gabonaise de libération nationale prône la lutte armée pour faire tomber le régime Bongo. Elle revendique aussi le sabotage d’un transformateur électrique à Libreville en décembre dernier. Vous conviendrez que cette action est un peu mince pour convaincre de la réalité de votre engagement. On a davantage le sentiment d’une lutte virtuelle que réelle.
Curtis Bezauna Mabika : Vous avez tout à fait raison de penser, comme beaucoup d’autres, que ce premier test est bien mince pour convaincre de la crédibilité de notre action. Mais c’est tout simplement parce que le vrai combat n’a pas encore commencé. Nous sommes encore en phase préparatoire. Mais voyez-vous, notre objectif n’est pas de convaincre qui que ce soit de notre crédibilité car mener une insurrection n’est pas un concours de beauté où il suffit d’aller montrer son corps pour satisfaire les impatiences des uns et des autres. Nous nous devons de travailler à notre propre rythme et selon nos objectifs, pour un maximum d’efficacité car il ne faut rien laisser au hasard.
Notre objectif premier est de mener à l’écroulement du régime Bongo par des moyens armés et insurrectionnels, selon les exigences de l’idéologie de libération nationale du BDP-Gabon Nouveau. Ceci pour dire que nous sommes actuellement dans la phase préparatoire de notre combat armé. Ceux qui parlent de crédibilité, de minceur de l’action et de virtualité en général expriment leur impatience de nous voir passer tout de suite à l’action et d’en finir avec le régime Bongo. Nous les comprenons. Mais ils devront se rendre à l’évidence qu’une phase préparatoire ne se précipite pas et ne se bâcle pas. Le sabotage du transformateur de Kinguélé fut un coup de maître qui entre tout simplement dans le cadre de notre préparation. Il y a actuellement de multiples tests en cours au Gabon: un ou deux ou trois, comme le sabotage du transformateur de Kinguélé, seront visibles de par leur nature spectaculaire; d’autres seront invisibles car découlant de tests stratégiques comme les infiltrations, les reconnaissances, le tissage de réseaux, etc., tout simplement pour mesurer la capacité du régime Bongo non seulement à résister à une insurrection, mais également à la défaire.
Nous avons aussi un souci majeur, celui de veiller à ce que des dommages collatéraux en biens et en vies humaines ne puissent affecter nos populations. Nous ne voulons pas faire une insurrection terroriste sauvage comme les Arabes le font en Irak, mais une insurrection ciblée, humaine et responsable à l’africaine, qui visera principalement le régime Bongo tout en épargnant les populations gabonaises. Nous voulons aussi nous assurer que les biens des étrangers implantés au Gabon, du taximan malien au diplomate chinois, ne soient pas touchés dans le cadre de nos attaques. Ceci parce que nous aurons plus que jamais besoin de la contribution économique des étrangers du Gabon pour continuer à faire marcher l’économie une fois Bongo parti. A cause de ce soucis, nous prendrons tout le temps qu’il faut pour ne préparer que ces actions-là qui seront capables de mettre à mal le régime Bongo en rendant le Gabon ingouvernable pour lui. La portée de nos actions et la combinaison de diverses stratégies devront ainsi nous permettre, une fois le combat commencé, de rapidement mettre le régime hors d’état de nuire. Nous nous inspirerons à ce titre des méthodes insurrectionnelles de l’ANC en Afrique du Sud, sans pour autant écarter la possibilité d’un coup d’état en bonne et due forme. Nous étudions toutes les possibilités. Une fois que nous serons satisfaits du déroulement de nos tests et de notre étude du terrain gabonais tant à Libreville qu’à l’intérieur du pays, nous pourrons alors lancer des attaques coordonnées. La raison pour laquelle nous prenons notre temps consiste tout simplement à bien mettre en place nos réseaux d’action pour assurer leur approvisionnement continue en ressources et informations diverses, de manière à garantir qu’une fois les attaques commencées, elles se fassent de manière soutenue sans connaître de point d’arrêt. Mais nous pouvons déjà vous assurer que notre première attaque sera d’envergure nationale vu que nous plannifions d’embraser divers points stratégiques du Gabon pour montrer au régime que nous avons des antennes d’actions un peu partout dans le pays et que ses jours sont comptés.
Quant à notre virtualité que vous soulevez, nous dirons tout simplement ceci: l’on a souvent accusé le BDP-Gabon Nouveau, notre mouvement mère, d’être un mouvement virtuel. Pourtant, cela fait sept ans (le BDP-Gabon Nouveau existe depuis décembre 1998) que le régime Bongo essaie de supprimer ce mouvement par l’achat de ses leaders. Ils ont même essayé de créer des scissions en corrompant des membres qui sont allés créer des partis clones du BDP-Gabon Nouveau. On en dénombre au moins deux aujourd’hui que le régime a créé de toute pièces dans l’espoir de nous faire disparaître. On voit aussi des mouvements naître au Gabon comme le BDR (Bongo doit rester) ou le BDP (Bongo doit présider), tous inspirés de notre existence et dont le but unique consiste à essayer de nous détruire par la diffamation, al médisance et la propagande anti-Mengara. Il y en a même un qui, financé directement par l’ambassadeur Adzé en France, André Mba Obame (Ministre) et Ali Bongo (Ministre), a consacré tout son site Internet aux attaques contre le Dr. Mengara et le BDP-Gabon Nouveau. On y trouve toutes sortes d’élucubrations enfantines qui montrent bien à quel point l’existence continuelle du BDP-Gabon Nouveau traumatise Omar Bongo et son entourage. Apparement, c’est cela le seul but pour lequel ces groupes avaient été créés et pour lequel ils sont financés.
Il y a par ailleurs des salles informatiques entières à la présidence de la république créées spécialement pour surveiller l’activité Internet du BDP-Gabon Nouveau et les Gabonais qui s’y connectent. Omar Bongo, par au moins trois fois, a voulu rencontrer le leader du BDP-Gabon Nouveau, le Dr. Daniel Mengara, qui s’y est toujours refusé. On ne compte plus les gens que le régime envoit chaque jour en France et aux Etats-Unis essayer de corrompre les membres du BDP-Gabon Nouveau et le Dr. Daniel Mengara ou pour essayer d’arranger des rencontres secrètes. Tout cela a déjà coûté au régime Bongo près de 25 milliards de F CFA en sept ans, sans succès. Savez-vous que c’est à cause d’un rapport du BDP-Gabon Nouveau accusant Omar Bongo d’avoir honte de son père ancien esclave que Bongo s’est senti obligé de rajouter le patronyme Ondimba à son nom’ Son entourage vous le confirmera si vous frappez aux bonnes portes.
La question que nous vous posons, nous, dans ce cas, est la suivante: où est-ce que vous avez vu un mouvement virtuel qui en plus vit en exil causer autant de tracas à un régime? Il me semble que, par ces tentatives de destruction et de déstabilisation du BDP-Gabon Nouveau, force est de reconnaître que notre mouvement « virtuel » a un effet bien concret sur le régime Bongo puisqu’il dicte même les réactions du régime dans plusieurs domaines. Quelque chose qui affecte tout un pays comme nous ne peut donc pas être virtuel. Nous pensons que le régime Bongo sait que nous sommes sérieux dans nos objectifs, d’où sa panique de sept ans et l’interdiction de séjour informelle qui a été faite au Dr. Daniel Mengara. Omar Bongo a personnellement juré que tant qu’il sera vivant ou au pouvoir, il ne délivrera jamais de passeport ni de visa au Dr. Daniel Mengara. Nous savons cela de source sûre car Bongo ne voulait pas de la présence du Dr. Mengara au Gabon en période électorale. Il sait qu’il ne serait plus au pouvoir aujourd’hui s’il avait permis au Docteur de se rendre au Gabon faire campagne contre lui. C?est cela, à nos yeux, qui compte.
Ceux qui nous traitent de virtuel font tout simplement la confusion entre les sites Internet qui nous permettent de véhiculer notre pensée et l’action politique que nous menons d’exil. Ils n’arrivent pas à voir que le site Internet n’est qu’un outil de communication, et que mesurer l’impact du BDP-Gabon Nouveau au Gabon ne peut se faire qu’en observant la réaction du régime face à nos actions, qu’elles soient écrites ou physiques. Nous ne sommes pas le premier mouvement gabonais à travailler de l’exil. Cependant, nous fûmes le premier mouvement politique gabonais à innover en utilisant pleinement Internet comme outil de communication. Et d’ailleurs, de par le monde, il y a tout un mouvement de cyber-opposition non négligeable que connaissent de nombreux pays. On ne va tout même pas se priver d’un outil de communication aussi efficace et qui est, en grande partie responsable de notre renommée au Gabon! En cela, nous nous distinguons des premiers mouvements exilés du Gabon, comme l’ancien MORENA de Paul Mba Abessolo, mouvements qui pour beaucoup de Gabonais étaient encore plus virtuels que nous aujourd’hui vu qu’ils n’avaient pas les moyens de communication modernes que nous avons aujourd’hui pour communiquer directement notre pensée aux Gabonais. Pourtant, cela ne leur a pas enlevé leur crédibilité et ils ont tous fini par quitter l’exil et le « virtuel » pour se retrouver au Gabon pour y continuer leur action politique. Nous disons donc que tous les chemins mènent, non pas à Rome, mais au Gabon. Un jour, le BDP-Gabon Nouveau se retrouvera également au Gabon pour y finaliser son action politique. Ce n’est plus qu’une question de temps.
Afriquecentrale.info : Combien d’hommes votre armée peut-elle aligner, quels sont ses moyens d’action militaires et quel soutien peut-elle espérer auprès de la population et des forces de sécurité ?
Curtis Bezauna Mabika : Nous alignerons autant d’hommes qu’il sera nécessaire. Mais il ne faut pas confondre notre armée de libération nationale avec une armée classique. Il ne s’agit pas pour nous d’aligner face à Bongo une armée visible avec des tanks et des camions. Notre armée est une armée populaire, infiltrée et invisible. Elle sera partout et nulle part à la fois, et frappera à loisir partout où besoin sera. L?exemple des difficultés militaires des Américains face aux terroristes en Irak nous a enseigné que pour gagner une guerre contre un régime comme celui de Bongo, il faut le faire sur le plan insurrectionnel, c’est-à-dire faire du Gabon un enfer pour le régime, de manière à le rendre si ingouvernable que le régime ne pourra pas tenir. Pour nous, il s’agira de créer une situation où les ministres et les barons du régime ne pourront plus se déplacer nulle part au Gabon sans une escorte militaire. Ils vivront un véritable enfer sécuritaire et nous ne pensons pas que ce régime pourra tenir le coup face à ce que nous lui réservons comme agonie. Mais, pour ne pas faire dans l’euphorie et la naïveté, nous nous préparons tout aussi bien à un combat court et bref qu’à un combat de longue haleine. Cependant, quelque soit le temps que cela prendra, Omar Bongo ne pourra jamais gouverner le Gabon des temps qui viennent, ni dormir tranquille. Nous ferons tout pour qu’Omar Bongo ne puisse pas finir le nouveau mandat de sept ans qu’il vient de s’attribuer frauduleusement car pour nous, il n’est pas le président du Gabon, mais un imposteur.
Nous savons les populations gabonaises acquises à la nécessité d’un départ immédiat d’Omar Bongo. La fausse élection de novembre 2005 n’était qu’une farce nationale. Les Gabonais ne veulent plus de Bongo et cela fait 38 ans qu’ils souhaitent son départ. Les forces armées aussi souhaitent ce départ car la majorité d’entre eux a voté pour Pierre Mamboundou lors de l’élection de novembre 2005. Nous comptons d’ailleurs sur la possibilité que beaucoup d’entre eux se joignent à nos actions une fois que le combat sera engagé. Nous avons des contacts appuyés et soutenus avec pas mal de militaires, de policiers et de gendarmes de haut rang et de bas rang au Gabon. Nous tissons aussi des liens avec l’entourage militaire qui protège Omar Bongo. Le moment venu, leur contribution à la lutte sera déterminante.
Afriquecentrale.info : La lutte armée est-elle le seul moyen de faire évoluer les choses au Gabon ? Le combat politique n’est-il pas préférable à la violence. D?autant qu’ailleurs en Afrique, les exemples démontrent que le recours à la lutte armée n’a mené à rien.
Curtis Bezauna Mabika : Votre question trahit le mal intellectuel et moral des Africains qui, par manque de patriotisme et de nationalisme, se laissent brimer et meurtrir des années durant par des dictatures sans broncher. D?où le mythe malsain que nous caressons aujourd’hui en Afrique qui consiste à dire que rechercher le changement par la violence est un mal pire que celui qui consiste à attendre tout simplement qu’un dictateur meure au pouvoir ou quitte le pouvoir de lui-même. Seulement, là où le bas blesse est que ceux qui font ce type de remarques perdent de vue le simple fait que le coût humain d’une dictature de 15 ans en Afrique est pire que le coût humain d’une guerre civile de deux ans. Au Gabon par exemple, les misères causées par la mauvaise gestion économique et la dictature d’Omar Bongo sont sucsceptibles, en 15 ans, de causer la mort de 150.000 Gabonais (enfants, adultes, viellards) morts inutilement de misères et de maladies pourtant évitables. Comparez cela à une guerre civile qui tuerait 5.000 personnes mais épargnerait les 145.000 autres qui seraient morts si on avait laissé le dictateur au pouvoir pour éviter la guerre! Qu?est-ce qui vous apparaît le plus coûteux et inhumain: 5.000 morts dans une guerre civile de deux ans ou 150.000 morts inutilement à petit feu pendant 15 années de dictature?
Et il faut également que nous Africains nous disions certaines vérités. La raison pour laquelle les occidentaux nous dominent part de notre incapacité à nous préoccuper de l’intérêt national du plus grand nombre. En Afrique, on n’arrive au pouvoir que pour se remplir le ventre. Le Blanc lui, nous a démontré qu’il peut mourir non seulement pour son pays, mais aussi pour laisser dans l’histoire une image positive de son nom. En cela, les Blancs mettent l’intérêt national du plus grand nombre avant l’intérêt particulier, parce qu’ils savent que quand on apporte le bien-être à tous, les retombées sont forcément positives pour soi-même. Le principe, dans leur philosophie économique libérale est qu’il faut, pour assurer son bien-être personnel, d’abord se préoccuper du bien-être des autres citoyens. Autrement dit, c’est du bien-être de tous au sein d’une nation stable que découle le bien-être des individus. Et c’est cela qui a permis à leurs nations de se développer et de se stabiliser. En Afrique, c’est le contraire. On pense d’abord à soi-même et on fait tout pour priver les autres de bien-être. Et comme on ne veut pas mourir pour les autres, on s’accroche tous aux petites misères de nos vies comme de l’or, nous confinant ainsi à une végétation individuelle et animalière. Du coup, on aboutit à des sociétés instables et animalisées par l’instinct de survie individuelle. Le sens de la nation disparaît et du coup, les risques de guerres civiles augmentent là où on croyait pouvoir les éviter en laissant des situations pourrir.
D?où, en fait, nos guerres civiles. On croit souvent faussement en Afrique qu’en laissant les choses telles quelles, sans les toucher, elles finiront par s’arranger d’elles-mêmes. On entend parfois les Gabonais dire: « Si vous touchez à Bongo, il y aura la guerre au Gabon, donc, laissez-le tranquille. C?est quoi sept années de plus’ Laissez-le finir, ensuite on verra. » Puis un jour, quand on n’en peut plus, la violence éclate de manière bestiale et on se rend compte que si on avait fait la révolution 20 ans plus tôt, le pays se porterait beaucoup mieux aujourd’hui. On comprend ainsi souvent trop tard qu’en évitant de s’attaquer de front aux dictatures pour éviter la guerre, on créé en fait les conditions de la guerre sans le savoir. La Côte d’Ivoire en est le parfait exemple. Les décennies de supposées « paix » sous Félix Houphouët-Boigny ont fini par se transformer en enfer pour les Ivoiriens. Houphouët en tant que dictateur n’avait aucune notion de l’intérêt national. Comme au Gabon, il a imposé aux Ivoiriens une « paix » artificielle. Et cette fausse paix a, paradoxalement, préparé le terrain à la guerre civile. Houphouët-Boigny a donc laissé un héritage de guerre aux Ivoiriens, et non un héritage de paix. Mais entretemps, des centaines de milliers de citoyens seront morts inutilement de misères parce qu’on avait cru que c’est par la patience que les solutions arriveraient d’elles-mêmes, comme par miracle. Nous ne voulons pas faire la même erreur au Gabon.
Je crois donc qu’il nous faut cesser d’avoir peur de la révolution tout simplement parce qu’en Afrique, il y a des cas d’échecs. Les dictateurs d’Afrique, comme Omar Bongo, aiment d’ailleurs à tirer exemple sur des pays comme la Côte d’Ivoire pour rendre indolents leurs peuples. Ces échecs des révolutions africaines s’expliquent pourtant par le manque de patriotisme que je viens de soulever car ceux qui les font n’ont pour la plupart aucune vision concrète de ce que c’est que l’état et l’intérêt national. Gbagbo par exemple, a hérité d’une révolution populaire positive qui l’a conduit au pouvoir. Mais par ses propres maladresses politiques sur la plan national et international, il a fait d’une révolution réussie et positive un échec en commettant les mêmes erreurs d’accaparement du pouvoir que d’autres avant lui avaient commises. Ce qu’il nous faut donc, pour des révolutions positives en Afrique, c’est une nouvelle race d’Africains avec un sens aigu du nationalisme patriotique, celui-là même qui conçoit la démocratie et les libertés citoyennes comme une valeur de progrès et non une menace pour leur perennité au pouvoir. Quand on fait une révolution pour le pouvoir, on échoue. Quand on la fait pour la sauvegarde des libertés citoyennes, on réussit. Voilà pourquoi l’Europe, l’Amérique et certains pays d’Asie ont réussi. Et voilà pourquoi l’Afrique a échoué.
Mais cela ne devrait pas nous décourager car, au-delà de l’Afrique, nous avons plein d’exemples qui sautent aux yeux et qui démontrent parfois la nécessité impérieuse qui incombe aux peuples de passer par la violence pour conquérir leur liberté. Les pays les plus stables au monde et qui dominent la planète aujourd’hui sont passés par des guerres meurtrières et des instabilités pires que celles que nous connaissons aujourd’hui en Afrique pour défendre les libertés de leurs citoyens. Ni la France, ni les USA ne seraient ce qu’ils sont aujouird’hui s’ils n’étaient pas passés par des violences. Au vu de leurs histoires respectives, on pourrait même dire que l’Afrique est plus stable. Mais nos stabilités apparentes en Afrique ne sont pas saines parce que basées sur des contrats sociaux défaillants. Les pays d’Europe et l’Amérique nous ont démontré que, parfois, il faut passer par la guerre pour savoir la vraie valeur de la paix. Les pays qui n’ont jamais connu de guerre ne savent pas apprécier la valeur de la paix, d’où l’utilisation abusive que le régime Bongo fait du mot « paix » dans ses discours. Bongo et ses sbires ne savent pas ce que la paix veut dire car pour eux, la paix se résume à une absence de guerre civile. Mais ils oublient que leur présence dictatoriale au pouvoir est plus meurtrière à long terme qu’une guerre civile.
Il convient cependant de noter qu’en Afrique, il y a de l’espoir. Certains pays comme le Libéria par exemple viennent de battre en brèche la notion selon laquelle le recours à la violence n’a mené à rien de bon. Le Libéria, malgré des années sanglantes et instables, vient d’avoir une élection plus démocratique, légitime et civilisée que celle qui s’est passée au Gabon, amenant au passage une femme au pouvoir, ce qui est une honorable et louable première en Afrique. Le Liberia est donc potentiellement aujourd’hui en mesure de devenir l’un des pays les plus démocratiques et les plus stables en Afrique, parce que leur passage par la guerre leur a fait comprendre la valeur de la paix et de la démocratie. Ils ne veulenet plus revivre cet enfer. J?ai également beaucoup d’espoir pour la Côte d’Ivoire car ce pays deviendra forcément, grâce à sa crise politique, plus stable et plus démocratique que le Gabon dans les deux ou trois années qui viennent, laissant ainsi notre pays à la traîne comme l’un des pays les plus instables et totalitaires d’Afrique.
Voilà pourquoi le combat politique n’a de sens que dans les sociétés où, de part et d’autre, les hommes politiques ont le sens de ce que c’est que l’intérêt supérieur de la nation. Cela fait 15 ans que la crise politique gabonaise dure. 15 ans que le peuple et les acteurs politiques de l’opposition s’activent pour faire comprendre au régime Bongo que la paix dans notre pays passe par la démocratisation. Donc, 15 ans qu’Omar Bongo se refuse à cette ouverture démocratique. Le Gabon est donc aujourd’hui moins démocratique qu’il ne l’était en 1990 vu qu’Omar Bongo a peu à peu défait les acquis constitutionnels de la Conférence nationale de 1990 pour faire de son régime un nouveau parti unique avec pour lui-même le droit de mourir au pouvoir et de léguer ce pouvoir à son fils. L?élection frauduleuse de novembre 2005 ne fait que confirmer le refus animalier d’Omar Bongo de se réformer. Vous conviendrez alors avec moi que quelqu’un qui s’impose au pouvoir pendant 45 ans n’a aucun sens de l’intérêt supérieur de la nation. Il ne laisse alors d’autre choix à son peuple que la révolution. Nous ne souhaitons pas la guerre au Gabon et il n’y aurait pas d’insurrection au Gabon si Omar Bongo se montrait patriote en réformant l’état dans un sens démocratique, même si une telle réforme veut dire son départ immédiat. Il vaut mieux partir dans l’honneur que le déshonneur. Son entêtement est ce qui nous pousse aujourd’hui à prendre les armes. Ce n’est pas pour rien que les Français, en les articles 11 et 35 de leur Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1793, intrônisent le droit et le devoir sacré des peuples et des individus à recourir à l’insurrection comme moyen d’en finir avec un gouvernement qui viole leurs droits. C?est donc à ce principe, qui est un devoir national, que le BDP-Gabon Nouveau, au travers du Mamba sa branche armée, s’attèle aujourd’hui pour fomenter au Gabon l’insurrection qui rétablira le peuple dans ses droits bafoués par Omar Bomgo depuis près de 40 ans déjà.
Afriquecentrale.info : Quelle est la nature de vos liens avec le mouvement BDP qui ne ménage pas ses critiques à l’égard du régime d’Omar Bongo Ondimba ?
Curtis Bezauna Mabika : Le BDP-Gabon Nouveau est devenu notre mouvement mère suite à un accord signé le 9 décembre 2005 par des représentants du Mamba et ceux du BDP-Gabon Nouveau. Cet accord entérinait le ralliement du Mamba au BDP-Gabon Nouveau et son intégration dans le mouvement en tant que branche armée. Il s’agissait pour les deux groupes de tout simplement conjuguer leurs efforts en vue de renforcer leurs capacités d’action. Nous pouvons donc dire que les deux groupes sont un seul et même mouvement. Le BDP-Gabon Nouveau est aujourd’hui composé d’une branche politique et d’une branche armée, sous l’autorité directe du Comité Directeur et du président du mouvement, le Dr. Daniel Mengara. La hiérarchie militaire du Mamba tire donc ses injonctions militaires des directives données par le Comité Directeur du BDP-Gabon Nouveau et son président, le Dr. Daniel Mengara.
Le BDP-Gabon Nouveau pense que c’est Omar Bongo qui est responsable de la débâcle gabonaise. C?est lui qui a alimenté la corruption, le vol et l’incompétence qui sévissent dans le pays et qui ont mené 95% des Gabonais à la misère la plus totale. Aujourd’hi près de 80% de nos citoyens visent sous le seuil de pauvreté à cause de la soif de pouvoir et de l’incompétence d’un seul homme. La solution aux problèmes du Gabon passe forcément par le départ forcé d’Omar Bongo.
J?en profite donc pour lancer un appel aux Gabonais et Gabonaises de tous bords politiques, ethniques, sociaux et autres pour leur dire de ne pas perdre espoir et de s’organiser pour aider Le Mamba dans sa lutte nationale pour l’intérêt du plus grand nombre. Le BDP-Gabon Nouveau n’a jamais voulu la guerre au Gabon. Voilà pourquoi pendant sept ans il a essayé tous les moyens politiques à sa disposition pour appeler à la réforme démocratique immédiate du Gabon. Omar Bongo et son régime y sont restés sourds. La lutte du Mamba est donc la vôtre et Le Mamba ne peut la gagner sans votre participation et sans votre soutien. Cette lutte est une lutte entièrement gabonaise, par des Gabonais pour le bien du Gabon. Chacun doit donc faire sa part de travail. Visitez le site du Mamba (https://www.lemamba.org) et inscrivez-vous pour la lutte, car Bongo doit partir, pour la construction d’un Gabon Nouveau.
Propos recueillis par François Bocca (AfriqueCentrale.Info)
Curtis Bezauna Mabika est porte-parole de l’Armée gabonaise de libération nationale