Le Gabon, dont le président Omar Bongo Ondimba est un des piliers des relations franco-africaines, a jugé « inacceptables » les propos du secrétaire d’Etat français à la Coopération sur la nécessité de signer « l’acte de décès de la Françafrique ».
« De tels propos ne peuvent être mus que par l’ignorance des réalités de la coopération franco-africaine », note sèchement vendredi un communiqué du Conseil des ministres, présidé par M. Bongo, au pouvoir depuis 1967.
Le communiqué, essentiellement consacré à répliquer aux déclarations de Jean-Marie Bockel, affirme sa « surprise » que « soient véhiculés à un tel niveau de responsabilité des clichés méprisants faisant des Etats africains de vulgaires mendiants sollicitant sans fin l’aumône de la France ».
« Cette attitude (est) d’autant plus inacceptable quand on sait les avantages que tirent la France et les autres Etats occidentaux de leurs rapports économiques depuis toujours, avantages mutuels par ailleurs ». Le gouvernement gabonais a été particulièrement choqué par la déclaration de M. Bockel, ministre issu de la gauche et entré au gouvernement français dans le cadre de l’ouverture prônée par le président Nicolas Sarkozy, sur les pays « à rente pétrolière », visant implicitement le Gabon producteur de pétrole où opère en particulier le groupe français Total.
M. Bockel avait exhorté, lors de la présentation de ses voeux mardi à Paris, M. Sarkozy à ne plus « céder à un certain nombre de caprices (…) de demandes incohérentes de certains pays (africains) qui ont (…) une rente pétrolière qu’ils ne consacrent pas aux investissements qu’ils nous demandent de financer ».
Ce passage est d’ailleurs repris dans le communiqué du gouvernement gabonais qui observe que « si la France estime que l’Afrique lui coûte cher, il lui revient souverainement d’en tirer les conclusions, sans être obligée de se justifier de façon aussi peremptoire ». Le Gabon brandit au passage la menace de se tourner vers « des partenaires plus respectueux de la dignité de ses peuples et de la souverainté » des Etats africains.
« Il conviendrait donc que les partisans d’une certaine rupture en France sachent rompre avec l’arrogance qui a souvent marqué leurs rapports avec l’Afrique », conclut le communiqué. Selon un diplomate s’exprimant sous couvert d’anonymat, « cette réplique du gouvernement gabonais n’a rien d’étonnant. Elle a été faite pour marquer le coup et montrer le mécontement des autorités ».
Désormais doyen des chefs d’Etat africains, M. Bongo, qui a connu tous les présidents de la Ve République française, est l’un des derniers symboles des relations particulières qui ont longtemps uni Paris et ses ex-colonies. Il fut un des principaux relais du système « françafricain » où s’entremêlaient raison d’Etat, lobbies et réseaux politico-affairistes, permettant à la France de maintenir son influence sur le continent.
Son nom apparaît ainsi dans l’affaire du pétrolier Elf, absorbé par Total, symbole des dérives de la Françafrique. Le Gabon est un allié privilégié de la France en Afrique centrale, son influence ayant notamment servi à dénouer des crises survenues ces dernières années dans cette région.
La France possède d’ailleurs une base militaire à Libreville et M. Sarkozy était venu au Gabon en juillet, lors de son premier voyage en Afrique subsaharienne en tant que président français.