Journaliste, originaire du Sénégal, Abou Abel Thiam devrait, dans des délais raisonnables, publier un ouvrage au titre volontiers provocateur, à savoir « l’Afrique et ses élites : les clichés occidentaux à l’épreuve de la vérité » qui tente, d’après lui, de mettre un faisceau de lumière crue sur des clichés et des faits qui pointent, plus qu’à leur tour, le continent noir et ses dirigeants.
Autant qu’on sache, cet ouvrage est né de l’incompréhension grandissante chez ce fils d’Afrique, de voir une certaine presse occidentale dénigrer souvent les dirigeants et les élites du continent, en particulier des chefs d’Etat victimes de « traitements tendancieux », à l’instar du récent épisode malheureux orchestré par des médias publics de l’Hexagone, ouvrant un feu de « critiques infondées contre le président gabonais, Omar Bongo Ondimba, au motif que ce dernier aurait acquis des biens immobiliers considérables en France.
Dans le même temps, l’auteur s’interroge sur le fondement du silence coupable des « chiens de garde du capital » en occident devant le patrimoine mirobolant des « acquéreurs étrangers, arabes, ou occidentaux » qui s’offrent des propriétés immobilières, qu’il juge parmi les plus prestigieuses et les plus chères de la place parisienne.
D’emblée, Abou Abel Thiam s’estime fondé à révéler que « les palaces les plus huppés de la capitale française appartiennent à des personnalités non françaises ». Et d’égrener :
Le Bristol, Faubourg Saint Honoré (famille Oetker – Allemagne), le Crillon (Starwood Capital – Etats-Unis), le Georges V, avenue du même nom (Prince Al-Wali – Arabie Saoudite), le Meurice, Rue de Rivoli (Sultan de Brunei), le Plaza Athénée, avenue Montaigne (Sultan de Brunei), le Ritz, Place Vendôme (Mohamed al-Fayed (Egypte-Grande Bretagne)…
Du coup, l’interrogation qui vient à l’esprit est fort partagée : a quand un reportage abondant dans les médias occidentaux sur ces fortunes ?
Néanmoins, à ce propos, ce journaliste sans cesse engagé dans la recherche de l’information note qu’après avoir racheté le Georges V en 1996, pour 140 millions d’Euros, le prince saoudien Al Walid déboursa 114 millions d’Euros en plus pour les seuls travaux d’embellissement.
Soucieux de lever le voile sur ces vérités volontairement cachées, il entend donc aller plus au fond des choses que ne l’a fait le pourtant très respectable journal français L’Express en évoquant, sur un ton curieusement respectueux, le cas de l’Hôtel le Crillon, devenu la propriété d’une entreprise américaine en 2005 :
« Avec le rachat du Capital-le fonds d’investissement de Barry Sternlicht, tous les palaces français sont désormais aux mains de propriétaires étrangers. Et ils ne s’en portent pas plus mal ! Ces milliardaires, souvent du Moyen Orient, ont su redonner une seconde jeunesse à nos joyaux de luxe ».
A contrario, l’empressement, et surtout le ton irrévérencieux de la presse hexagonale, le Monde et la télévision publique France 2, en l’occurrence, ont beaucoup choqué l’opinion avertie du continent lorsqu’il s’est agi de révéler des enquêtes de la police française sur les propriétés immobilières des chefs d’Etats africains « amis » de la France.
« A quel aune juge-t-on qu’une dépense de 18 millions d’Euros, celle prêtée à un dirigeant africain, est plus spectaculaire que celle de 254 millions d’Euros acquittée rubis sur l’ongle par le Sultan de Brunei » se demande justement Abou Abel Thiam ?
Ou encore, est-ce le coût de ladite acquisition, en comparaison avec la richesse de l’acquéreur, ou bien serait-ce seulement la région d’origine, selon que l’acquéreur soit de l’Orient ou de l’Afrique, qui importerait pour que les commentateurs occidentaux s’en félicitent ou portent la plume dans la plaie, s’interroge-t-il encore ? Avant de promettre de répondre, loin de tout conformisme politique ou culturel, dans son ouvrage à venir.