Drapeaux tricolores en berne, écoles fermées, la Martinique s’apprêtait vendredi à rendre un hommage populaire à Aimé Césaire, le poète de la « négritude » et des opprimés, dont les obsèques nationales se dérouleront dimanche à Fort-de-France.
« Merci d’avoir contribué à l’émancipation du peuple noir », « Papa Aimé, tu voyageras toujours avec nous »: les billets épinglés aux arbres du centre ville témoignent de l’émotion des Martiniquais après la mort jeudi à 94 ans de la figure emblématique et principal dirigeant politique de l’île depuis plus d’un demi-siècle.
Emotion et discrétion. Après une veillée familiale jeudi soir à son domicile, devant lequel quelques bouquets de fleurs ont été déposés, le cercueil d’Aimé Césaire devait être acheminé vendredi après-midi dans les différents quartiers de Fort-de-France, dont il fut le maire pendant 56 ans.
Un parcours qui scandera les étapes « politiquement importantes » de sa vie, avec des arrêts où les habitants pourront se rassembler, au siège du Parti Progressiste Martiniquais (PPM), qu’il a fondé en 1958, au lycée Schoelcher où il a enseigné, ou à son bureau de l’ancien hôtel de Ville.
Les grands axes de l’itinéraire ont en effet été choisis pour leur relation avec son oeuvre et son combat pour l’émancipation et la justice, l’Avenue Jean Jaurès, la Rue Emile Zola où l’Avenue Nelson Mandela.
A l’issue d’un périple de plus de deux heures, le cercueil devait être exposé vendredi soir au stade de Dillon, un quartier du sud de Fort-de-France, où une veillée populaire se poursuivra jusqu’à dimanche matin.
De nombreuses personnalités politiques devraient ensuite assister aux obsèques nationales dans le stade de Dillon. Un hommage de la Nation extrêmement rare pour un écrivain, qui n’a été rendu depuis le XIXè siècle qu’à Victor Hugo, Paul Valéry (1945) et Colette (1954).
Le président de la République, Nicolas Sarkozy, qui avait salué jeudi la disparition du poète, assistera aux cérémonies, ainsi que plusieurs membres du gouvernement.
Mais une importante délégation du Parti Socialiste conduite par François Hollande est également annoncée, avec les anciens Premiers ministres Pierre Mauroy, Laurent Fabius et Lionel Jospin. L’ex-candidate PS à l’Elysée, Ségolène Royal, était attendue pour sa part dès vendredi à Fort-de-France.
« La volonté du président de la République est que le format et le style de l’hommage répondent aux souhaits de la famille, avec la conscience qu’Aimé Césaire aurait voulu quelque chose d’extrêmement simple », a indiqué vendredi à l’AFP le secrétaire d’Etat à l’Outre-mer Yves Jégo, arrivé jeudi en Martinique.
Interrogé sur le souhait évoqué par plusieurs responsables politiques d’un transfert de la dépouille du poète au Panthéon, il a estimé qu’il s’agissait d' »une fausse bonne idée », qui « ne correspond pas du tout aux souhaits de la famille et des Martiniquais ».
Plusieurs écrivains et artistes, comme l’écrivain Daniel Maximin ou le comédien Jacques Martial, évoqueront dimanche l’auteur du « Discours sur la colonisation » au stade de Dillon. Aucune cérémonie religieuse n’a en revanche été programmée, à la demande de la famille d’Aimé Césaire.