Des combats ont opposé mardi les rebelles congolais de Laurent Nkunda à des miliciens pro-gouvernementaux après une accalmie de cinq jours dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC), où l’ONU a annoncé le renforcement de ses troupes.
Ces accrochages de quelques heures, les premiers depuis l’instauration par les rebelles le 29 octobre d’un cessez-le-feu unilatéral, sont survenus alors que le tout nouveau Premier ministre congolais, Adolphe Muzito, arrivait à Goma.
Les rebelles de Laurent Nkunda se sont opposés à des miliciens locaux d’autodéfense Maï-Maï, issus de différentes ethnies et alliés de l’armée congolaise, au niveau de Kiwanja, près de Rutshuru, à 80 km au nord de Goma, capitale provinciale du Nord-Kivu.
Une petite base de la Mission de l’ONU en RDC (Monuc) à Kiwanja a été « prise au milieu de tirs croisés » des troupes du Congrès national pour la défense du peuple (CNDP de Laurent Nkunda) et des Maï-Maï, a indiqué la porte-parole de la Monuc à Goma, Sylvie van den Wildenberg.
Le CNDP a accusé les Maï-Maï, les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR, rebelles hutus rwandais) et les Forces armées de RDC (FARDC) d’avoir « tenté de prendre la ville (…) avant d’être repoussés à plusieurs kilomètres ».
La Monuc n’a pas confirmé l’impliquation des FDLR ni des FARDC dans ces combats. Selon elle, l’armée congolaise ne se trouvait à priori pas dans cette zone. Le porte-parole militaire des Maï-Maï de la région, Didier Bitaki, a prévenu que l’offensive reprendrait mercredi.
Le 29 octobre, la rébellion de Laurent Nkunda avait décrété un cessez-le-feu unilatéral après avoir infligé une défaite cuisante à l’armée en arrivant aux portes de Goma. Lundi, elle a menacé de renverser le gouvernement qui rejette l’idée de négociations directes.
Dans ce contexte explosif, le secrétaire général adjoint de l’ONU chargé des opérations de maintien de la paix, Alain Le Roy, a annoncé que la Monuc était « en train de renforcer (sa) présence à Goma ».
M. Le Roy, en tournée dans le Nord-Kivu, a souhaité que le nombre de Casques bleus dans cette ville soit porté à 1.500 – contre un millier actuellement sur les 5.500 soldats de la paix déployés actuellement dans le Nord-Kivu.
« Nous avons demandé des troupes supplémentaires en plus des 17.000 » Casques bleus présents en RDC, a-t-il également rappelé, en faisant référence à une demande faite en octobre par la Monuc au Conseil de sécurité qui n’a pas encore tranché.
De son côté, le chef du gouvernement est arrivé à Goma, première étape d’une tournée de trois jours visant à « réconforter » la population et qui doit aussi le conduire dans le Sud-Kivu et la Province Orientale. Investi il y a trois jours par le président Joseph Kabila, M. Muzito a comme tâche prioritaire « la sécurité et la reconstruction ».
L’instabilité récurrente depuis le milieu des années 90 dans cette région, frontalière notamment du Rwanda et très riche en minerais, menace en effet la stabilité de la RDC et de l’Afrique centrale.
Les autorités congolaises accusent le Rwanda de soutenir Laurent Nkunda, un général congolais déchu, ce que Kigali dément. Mardi, le Rwanda a d’ailleurs critiqué la communauté internationale dont plusieurs émissaires ont fait étape à Kigali.
« L’hypothèse dominante affirmant que la crise est un problème entre le Rwanda et la RDC est fausse », a déclaré le gouvernement rwandais, martelant que « les problèmes de l’est de la RDC (étaient) pour l’essentiel congolais ».
La situation humanitaire reste effroyable dans le Nord-Kivu où plus d’un million de personnes ne vivent plus chez elles, dont 100.000 déplacées par les combats de la semaine dernière.
Plusieurs milliers d’entre elles dépendent entièrement de l’aide humanitaire. Celle-ci avait repris progressivement lundi mais elle a été « suspendue » à Rutshuru après l’évacuation d’une douzaine de personnels humanitaires en raison de la proximité des combats, a indiqué l’ONU.
Selon le Fonds des Nations unies pour l’enfance (Unicef), au moins 37 enfants ont été enrôlés par les miliciens Maï-Maï dans des camps près de Rutshuru.
Le procureur de la Cour pénale internationale (CPI), Luis Moreno-Ocampo, a indiqué suivre « de très près les informations convergentes sur des attaques menées contre la population civile ».