Des proches d’Omar Bongo rendent un dernier hommage au président éfunt lors de ses obsèques, le 16 juin. Les Gabonais redoute le scrutin du 30 août prochain pour sa succession.
Les Gabonais redoutent que la succession d’Omar Bongo, en théorie très ouverte, se fasse dans la violence le 30 août prochain.
Les gabonais sont circonspects. Trois jours après le début officiel de la campagne électorale pour désigner un successeur à Omar Bongo, mort début juin, le pays demeure étrangement calme. «Il y a une psychose qui se répand dans la population, une vraie peur que tout le processus tourne au désastre et à la violence», explique un observateur local.
Le scrutin prévu le 30 août prochain suscite encore de nombreuses interrogations. À commencer par la capacité pour le Gabon d’organiser une élection vraiment libre. La présence d’Ali Bongo dans la liste pléthorique des candidats – 23 en tout -, fils du défunt président et favori autoproclamé du vote, n’y est pas pour rien. Au Gabon, comme dans tant d’autres pays africains, la tentation d’une succession dynastique est bien réelle.
«Passage en force»
Peu populaire, Ali Bongo possède en revanche des moyens financiers sans rapport avec ceux de ses rivaux et de puissants leviers de pression sur les administrations et les médias locaux. Sa démission à contrecœur vendredi du poste de ministre de la Défense, sous la pression de ses opposants et de la présidente par intérim Rose Francine Rogombé, n’a pas vraiment rassuré. «On redoute un passage en force du clan Bongo», souligne l’observateur.
Les rumeurs de fraudes sont également nourries par le mode de scrutin à un seul tour et surtout par des listes électorales peu fiables – toujours pas arrêtées à deux semaines du vote. De l’aveu même du premier ministre, elles compteraient 120 000 doublons. Et on y trouverait au moins 700 000 électeurs, un chiffre étonnamment élevé pour un pays de 1,5 million d’habitants.
Les questions s’accumulent aussi sur la position de la France dans ces élections. La rue imagine volontiers l’ex-métropole, très présente au Gabon au cours des quatre décennies de règne d’Omar Bongo, accordant un soutien actif à Ali Bongo. Les dénégations de Nicolas Sarkozy lors de son passage à Libreville, affirmant que «la France n’avait pas de candidat», n’ont pas levé les soupçons. Ni surtout les déclarations de Robert Bourgi, un avocat franco-libanais très influent, conseiller officieux du président français, ayant assuré «qu’à titre personnel» il soutenait Ali Bongo.
Risque de troubles
Les grands rivaux du candidat du pouvoir, les anciens ministres Casimir Oye Mba et Jean Eyéghé Ndong, ou les opposants Pierre Mamboundou Zacharie Myboto et Paul Mba Abessole tirent depuis lors à boulets rouges sur Ali Bongo et sur cette Françafrique qui manipulerait le Gabon. Tous s’accordent aussi pour dénoncer le risque de troubles si l’élection devait laisser la place à la contestation. Un danger que personne ne sous-estime.
Le mode de scrutin à un tour semble en effet garantir un éparpillement des voix. L’élu, quel qu’il soit, sera-t-il mal élu ? L’absence de véritable passé politique à l’aune duquel juger les prétendants complique tout pronostic sur les lendemains de l’élection. «On peut redouter que certains n’acceptent pas la défaite, surtout si le vote est entaché de fraudes», souligne un diplomate.
Dans cette atmosphère de méfiance, la campagne pourrait devenir plus tendue. Lundi, lors d’un discours à l’occasion de la fête nationale, la présidente par intérim a tenté de calmer les esprits. Elle a prévenu que «les fauteurs de troubles, où qu’ils soient et quels qu’ils soient, seront punis conformément à la loi».