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Politique/Médias: Déclaration du journaliste Francis Sala Ngouah Beaud

LIBREVILLE (AGP) – Le journaliste francis Sala Ngouah Beaud, présentateur vedette de la chaîne de télévision gabonaise privée  »TV+ » dont il était Directeur général adjoint après 10 ans de services, a déclaré dans les médias publiques RTG1 et 2 et dans la chaîne privée  »TéléAfrica » que sa démission de TV+ est consécutive aux manoeuvres de déstabilisation du Gabon qui étaient en préparation. Voici le texte intégral.

Q : Vous avez assumé les fonctions de Directeur adjoint de TV+, avant de démissionner la veille du scrutin, que s’est-t-il passé ?

R :  »J’ai été associé, et l’opinion m’est témoin, au nom et au compte de l’un des candidats à l’élection présidentielle du 30 août dernier, en l’occurrence M. André Mba Obame, pour le compte de TV+, l’organe de presse qui m’employait, nous avons mené campagne jusqu’au bout, jusqu’au dernier moment. La veille du scrutin, mes convictions sont revenues en avant et je n’ai pas hésité à les faire valoir car, il m’est apparue que cette campagne a été menée tambour battant avec seule et unique volonté de faire provoquer un chaos, d’emmener le pays vers des voies innommables, voire irréparables. Et ce qui est apparue juste après la proclamation des résultats, n’a fait que me conforter dans cette voie que j’avais adoptée et j’ai été rattrapée par ma laïcité, mon esprit républicain et mes convictions. Sans avoir pris position pour quelque parti ou pour quelque candidat que ce soit, j’ai estimé à la clôture de cette campagne électorale qu’il était de mon devoir d’en appeler à la conscience des citoyens et des Gabonais en leur demandant évidement de se prononcer en âme et conscience suivant leurs convictions, au regard de ce qui a été vu, entendu et dit tout au long de cette campagne là. Je n’ai pas apprécié, je vous le dis très sincèrement, même si cela me vaut aujourd’hui de vivre dans une semi-clandestinité, un certain nombre de propos plutôt haineux et qui tendaient véritablement à déchirer le tissu social, la preuve, avec tout ce qui se passe à Port-Gentil, je dois dire que ça confirme que cela a été prévu et préparé. Même si on passait par ailleurs pour être des baragons de l’unité nationale, la cohésion sociale, la coexistence pacifique, des positions battues en brèche ensuite par de comportements entretenus et encouragés par ces acteurs politiques là ».

Q : Vous voulez dire qu’il y avait des réunions qui préparaient tout ce que nous avons vécu après la proclamation de la victoire de Ali Bongo Ondimba ?

R :  »J’étais au coeur de cette campagne. J’étais assis droitement et j’ai été associé plus ou moins étroitement à un certain nombre de décisions qui se prenaient. J’ai eu à parcourir certaines provinces avec cette équipe de campagne. J’ai pu être au fait d’un certain nombre d’éléments qui s’opéraient. Et je dois vous dire en toute honnêteté et objectivité que cela ne présageait rien de bon. Il y avait comme une volonté de partition du pays, d’affrontement ethnique provincialiste qui était entretenue, encouragée et il n’était un secret pour personne lorsque vous regardez la configuration politique du moment à la veille de cette élection, et tous les ralliements qui ont pu s’opérer en faveur du candidat André Mba Obame. Il fut clair et évident que l’objectif affirmé, avoué était de faire prévaloir une espèce de force identitaire plutôt que tel autre, autant de choses qui ne participaient de ma conception du débat politique, de la compétition électorale. C’est pour ces raisons que j’ai estimé qu’il était de mon devoir d’adopter une attitude de recul. Je voulais d’avance préciser parce qu’il s’est dit beaucoup de choses, on m’a traité de tous les noms, j’ai été l’objet de pas mal de menaces, ma famille et moi-même. Cela fait une dizaine de jours que je ne vois ni mon épouse ni mes enfants, parce que je suis obligé de vivre dans une clandestinité qui ne dit pas son nom, au regard des menaces qui sont les miennes. Je dois dire qu’une espèce de triangle s’est opéré avec certains pays voisins africains et qui tendait à encourager une espèce de déstabilisation du Gabon au lendemain de la proclamation des résultats de l’élection présidentielle. Et cela s’est établi notamment à l’occasion de certains déplacements dans certains de ces pays là. J’étais au Cameroun, en Guinée-Equatoriale où il y a eu des rencontres qui se sont opérées avec des responsables de ces pays là »

Q : Avec des candidats à l’élection ?

R :  »Oui, avec des candidats à l’élection. Il y a eu effectivement des deals qui se sont noués pour prévenir et préparer ce qui pourrait advenir au lendemain de l’élection présidentielle, parce nul, personne dans ces camps là n’était persuadé que le candidat du PDG l’aurait emporté par la voie des urnes, que cela aurait été un hold-up électoral ainsi qu’il se plaise à le rappeler, le clamer, qu’il fallait user de la force et pour cela faire rentrer des forces extérieures au pays sur le territoire national, des mercenaires qui sont arrivés et qui auraient pris position, qui se sont permis de vérifier les positions exactes du pays ».

Q : Ces mercenaires faisaient-ils partie de l’équipe de campagne ?

R :  »Oui, je vous l’affirme en toute honnêteté et objectivité. Ce sont des faits avérés que je suis prêt à soutenir au cours d’un débat public qui le voudrait. C’est d’ailleurs la raison principale pour laquelle le samedi 28 août, j’ai refusé le voyage de Port-Gentil, pour l’avant dernier meeting de campagne du Bloc uni pour le changement, parce que j’avais constaté que dans la délégation figuraient des officiers extérieurs au pays, qui allaient certainement pour une reconnaissance du terrain et prévenir tout ce qui s’est passé par la suite ».

Q : Et ces mercenaires venaient de quel pays ?
Mais de la Guinée Equatoriale. En dehors de la Guinée-Equatoriale et du Cameroun, ne venaient-ils pas d’autres pays ?

R :  »Nous avons fait une escale vers le Ghana où il était prévu que le candidat AMO rencontre un certain nombre d’éléments dans ce pays, notamment des autorités. Je crois que finalement au tout dernier moment, cela n’a pas été possible et finalement il n’y a eu que le Cameroun et la Guinée-Equatoriale. Mais au Cameroun, le président Biya était absent et aucune rencontre n’a pu se faire avec lui contrairement à la Guinée-Equatoriale où une rencontre a eu lieu avec le président Obiang Nguema ».

Q : Donc si on vous comprend bien les candidats à élection présidentielle, notamment les candidats indépendants n’ont jamais pensé qu’une élection pouvait porter Ali Bongo au pouvoir et qu’ils venaient uniquement pour saborder la stabilité du pays ?

R :  »Il est clair que pour tous ceux qui ont suivi cette campagne électorale et le scrutin qui en est suivi notamment pour les candidats dissidents du PDG, il était exclu que le candidat de ce parti soit proclamé vainqueur par les urnes. Donc il y a eu une forte intimidation, fanatisation des foules, les appelant à comprendre que l’heure du changement est arrivée, et qu’il ne pouvait être opéré par ces candidats dissidents, où de l’opposition traditionnelle. Il n’était pas question pour eux que le candidat Ali Bongo Ondimba soit proclamé vainqueur, parce que le disaient-ils impopulaire, comptable d’un bilan qui était loin de satisfaire la majorité des Gabonais et disaient-ils encore, étranger et qu’il ne pouvait pas bénéficier des suffrages des Gabonais, et ce message qui était constamment véhiculé, distillé à longueur de meeting, de causeries et de rencontres. Aujourd’hui on peut se demander oui, mais pourquoi avoir attendu si longtemps, avant de se prononcer sur la question et pourquoi ne pas avoir senti une odeur de coup? Oui on a vu monter progressivement cette fanatisation des foules au départ timide, on disait au départ que c’est des curieux qui viennent entendre, s’imprégner de la nature et puis se faire ensuite une idée sur la question, et puis on a assisté à un élargissement à des gens qui venaient de partout et qui étaient là complètement fanatisés, omnibulés par un discours extrêmement haineux et qui tendait beaucoup plus à une partition de la République plutôt qu’à essayer de convaincre du mieux que l’on pouvait l’électorat sur un programme de société qui soit le plus porteur ».

Q : on a vu à Oyem ce candidat interpellé les mythes fang, Akoma Mba et autres. Est-ce que cette fièvre haineuse a pu monter là-bas ?

R :  »Beaucoup moins à Oyem qu’à Bitam. C’est vrai qu’à Oyem il y a eu une foule énorme et je dois dire que de mémoire de journaliste, et d’observateur de la scène politique nationale, c’est la première fois qu’il m’a été donné de voir autant de monde au cours d’une rencontre politique, et même au temps de feu le président de la République Omar Bongo Ondimba. Il y a eu en effet un travail de fond qui a été opéré encore une fois sur l’identitaire ethnique, provincialiste. On a voulu faire remonter l’essentiel des problèmes que rencontraient les populations dans ces localités là à des carences, des insuffisances notoires que l’on devrait au PDG et ce qui m’a le plus conforté dans cette position qu’on était parti pour des affrontements dont je dirais pas le nom. Il y a eu volonté délibérée de s’arroger l’électorat de la province du Woleu-Ntem en tenant un discours fondé sur un rappel de mythe et de faits traditionnels et sur un langage qui ne tenait en soi sur une seule chose : moi ou le chaos. Vous comprenez qu’on avait plus affaire à une compétition électorale, mais à un règlement de compte qui ne disait pas son nom et qui pour l’essentiel aurait consisté à jeter les population dans la rue et à susciter des réactions des forces de sécurité pour faire porter la chapeau à l’autre ».

Q : Est-ce que vous craignez pour votre vie aujourd’hui ?

R :  »J’ai énormément peur parce que, au départ, ma famille est menacée et moi aussi. Mais ce qui me conforte dans ma prise de position, c’est que je n’ai pas été seule à sentir venir le danger. Beaucoup d’autres collaborateurs et confrères ont décidé de tourner le dos, car n’ayant pas approuvé cette manière d’appréhender la politique et tout ce qui pouvait aller avec. C’est vous dire que je suis dans une insécurité totale, heureusement avec le soutien d’amis, mais les menaces sont là et permanentes et j’ai peur pour ma famille et moi. Mais si ce sera le prix à payer pour préserver le Gabon des situations difficiles et inévitables, pourquoi ne pas continuer à assumer ».

Q : Vous qui avez été au coeur de ce système, quel est le danger que le Gabon court dans les jours à venir car on suppose que des plans ont été concoctés et vont être mis en exécution ?

R :  »Je pense qu’il y a déjà un éclaircissement qui devait nous emmener à appréhender l’avenir avec beaucoup plus d’optimisme. Le fait que les résultats de l’élection présidentielle tels que proclamés par le ministère de l’Intérieur et confirmés par la Cour constitutionnelle, ait été bien perçus et validés par une bonne partie de la communauté internationale et singulièrement par des Etats que l’on pouvait penser au regard du récit que je vous ai fait, à qui à la chienlit, à une cause déstabilisatrice du Gabon. Et puis la population gabonaise a compris qu’elle n’a pas intérêt à se laisser aller à des marchandages de politico-politiciennes qui ne disent pas leur nom. Ce qui me parait fondamental aujourd’hui c’est que les institutions de la République, malgré tout ce qui se dit, continuent de mener avec dextérité les affaires de l’Etat ».

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