Le directeur de publication de l’unique quotidien national gabonais L’Union, Albert Yangari, a été interpellé par des militaires vendredi après des articles sur les violences post-électorales à Port-Gentil (ouest), a-t-on appris auprès des autorités et de témoins.
Une unité de bérets rouges, une des troupes d’élite de l’armée gabonaise, a arrêté en fin de matinée Albert Yangari, alors que sa voiture était sur une bretelle d’accès à la Cité de la démocratie, un quartier de Libreville, non loin du siège du quotidien, selon un journaliste de l’AFP qui a assisté à la fin de l’opération.
Un conseiller du ministère de l’Intérieur et de la Défense a confirmé à l’AFP que l’interpellation était en relation avec une enquête du journal sur les événements de Port-Gentil, capitale pétrolière du pays.
L’Union, qui tire à 25.000 exemplaires, publie depuis trois jours une enquête sur les violences post-électorales qui ont secoué Port-Gentil entre le 3 et le 6 septembre. Le journal a notamment mis en cause le bilan officiel de trois morts, recensant cinq tués et affirmant que « le nombre de victimes peut atteindre 22 personnes ».
Alors que le gouvernement a toujours affirmé qu’aucune victime n’a été tuée par les forces de sécurité, l’Union avance qu’au moins trois personnes sont mortes des suites de tirs des forces de l’ordre.
Joint au téléphone, l’auteur de l’article Jonas Moulenda a affirmé à l’AFP qu’il craignait d’être arrêté à son tour.
Considéré comme très pro-gouvernemental il y a quelques mois, l’Union a proposé un traitement plus équilibré de la campagne électorale gabonaise à la surprise de nombreux de ses lecteurs.
L’opposition, qui avait récemment parlé d' »au moins 15 morts », a déclaré jeudi qu’au moins cinq personnes sont mortes, ajoutant que selon des « sources dignes de foi et le témoignage du responsable du cimetière de Ntchengue » il pourrait y avoir « 57 décès ».
Les troubles à Port-Gentil, fief de l’opposant historique Pierre Mamboundou, ont éclaté après l’annonce de l’élection d’Ali Bongo à l’issue du scrutin présidentielle du 30 août.
Ali Bongo, fils du défunt président Omar Bongo, a été élu avec 41,73% des voix, devant l’ex-ministre de l’Intérieur André Mba Obame (25,88%) et Pierre Mamboundou (25,22%), qui revendiquent chacun la victoire.
La Cour Constitutionnelle a jusqu’au 18 octobre pour examiner onze recours en annulation de la présidentielle du 30 août déposé par des neuf candidats et une citoyenne.