Leurs déclarations contredisent celles du chef de la junte au pouvoir, le capitaine Moussa Dadis Camara, qui a imputé la mort de dizaines de manifestants à des éléments incontrôlables de l’armée guinéenne.
« Parmi ceux qui ont tiré sur les gens, il y avait des individus qui ne portaient pas l’uniforme de l’armée régulière. Ils parlaient une langue que je ne comprends pas« , a déclaré Mouctar Diallo, un dirigeant de l’opposition qui a été battu au cours du rassemblement.
Un responsable guinéen de l’Onu qui a souhaité garder l’anonymat a dit avoir été battu par des hommes armés parlant anglais avec l’accent libérien. « Ils étaient ivres et, à l’évidence, sous l’influence de stupéfiants« , a-t-il dit.
La présence de mercenaires étrangers, si elle est avérée, ajouterait du poids aux accusations de mouvements guinéens des droits de l’homme qui affirment que la tuerie, qui a fait au moins 157 morts, a été organisée et n’est pas le fait d’éléments incontrôlés de l’armée.
Les relations ont souvent été tendues entre la Guinée et le Liberia et ce dernier a accusé son voisin du nord d’avoir soutenu les rebelles qui ont déclenché la guerre civile de 1999-2003.
CAMARA ACCUSE L’OPPOSITION
Le capitaine Camara a pris le contrôle de la Guinée en décembre dernier à la faveur d’un coup d’Etat sans effusion de sang et il n’a jusqu’ici pas honoré sa promesse d’assurer une transition rapide vers un régime civil.
Les investisseurs ont été déconcertés par la décision, le mois dernier, des autorités guinéennes d’annuler la vente en 2006, du complexe de bauxite-alumine Friguia au producteur russe d’aluminium UC Rusal.
La télévision publique a annoncé que le président russe Dmitri Medvedev avait adressé vendredi au capitaine Camara une lettre de félicitation à l’occasion du 51e anniversaire de l’indépendance de la Guinée. Aucun autre chef d’Etat étranger n’a, semble-t-il, fait de geste similaire.
La France, ancienne puissance coloniale, a suspendu sa coopération militaire avec Conakry à la suite du bain de sang de lundi, qui intervient après des mois de tensions croissantes entre la junte et l’opposition guinéenne.
Le capitaine Camara a réaffirmé jeudi soir à Reuters que l’opposition était responsable des violences pour avoir appelé quelque 50.000 partisans à se rassembler dans un stade de la capitale.
« Ils savaient qu’avec cette marée humaine ils ne pourraient pas contrôler leurs partisans. Ils savaient ce qui allait se passer« , a-t-il dit dans une interview.
« Leur but était de dire que le président Dadis ne devrait pas être candidat (à l’élection du 31 janvier). Je pense que c’était prémédité« .
Le calme est revenu à Conakry depuis lundi mais des témoins ont rapporté que les forces de sécurité avaient utilisé des gaz lacrymogènes pour disperser des milliers de proches de victimes venus près d’une mosquée chercher les corps qui leur étaient remis vendredi par l’armée.
Les autorités ont avancé un bilan de 57 morts, dont beaucoup ont, selon elles, été victimes d’une bousculade.
Par ailleurs, le président burkinabé Blaise Compaoré a été nommé médiateur dans la crise en Guinée par le président en exercice de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest, le Nigérian Umaru Musa Yar’Adua, a annoncé la Cedeao.