Invité à déjeuner à l’Elysée vendredi, le nouveau président gabonais, élu dans la confusion en octobre dernier, et dont la famille tiendrait une place de choix dans l’affaire des « biens mal acquis », a assuré être en parfaite harmonie avec Paris.
Parlant d’« erreur politique fondamentale », l’ancien candidat à l’élection présidentielle gabonaise, Bruno Ben Moubamba, s’est déclaré, dans les colonnes de Libération, « extrêmement choqué qu’un grand pays démocratique comme la France soit la première puissance occidentale à recevoir Ali Bongo ». Invité ce vendredi à déjeuner à l’Elysée, dans le cadre d’une « visite de travail », le nouvel homme fort du Gabon a été accueilli par de sérieuses réserves. Celles-ci émanaient non seulement de ses rivaux politiques, mais également des pourfendeurs de la Françafrique, incarnée par son père, Omar Bongo, inamovible chef de l’Etat gabonais pendant plus de quarante ans, décédé en juin dernier.
« Quelle pomme de discorde?«
Heureusement pour lui, au-delà des critiques, Ali Bongo, 50 ans, a pu compter sur les encouragements de Nicolas Sarkozy. A l’Elysée, le président français a salué les premières réformes de son homologue africain, notamment en matière de lutte contre la corruption. Et l’invité du jour de rendre la pareille à son hôte: à la sortie de l’entretien, le chef de l’Etat gabonais a effectivement déclaré que « la France, par rapport aux élections gabonaises, a eu une attitude exemplaire« . Une politesse qui tranche singulièrement avec les tensions qu’avait soulevées l’élection du fils Bongo en octobre dernier. L’accusant ouvertement de fraude, ses adversaires politiques reprochaient également à Paris d’avoir favorisé sa victoire contestée. Particulièrement visé, le sulfureux Robert Bourgi, considéré comme le M. Afrique de Nicolas Sarkozy, avait notamment déclaré qu’Ali Bongo était « le meilleur défenseur des intérêts français dans tous les domaines », et ce, malgré les dénégations répétées des autorités hexagonales.
Autre épine dans le pied de la relation franco-gabonaise, officiellement au beau fixe donc, l’affaire des « biens mal acquis », finalement éteinte fin octobre par la cour d’appel de Paris, au grand dam des organisations de lutte contre la fraude financière. Parmi les familles de dignitaires africains suspectées d’avoir détourné de l’argent public afin de s’offrir de nombreux biens immobiliers en France, celle d’Omar Bongo tenait une place de choix. Mais si l’activité déployée par les juges du pôle financier de Paris, contre l’avis du parquet, a eu le don d’irriter l’ancien despote et de tendre les relations entre la capitale française et Brazzaville, aujourd’hui les différends semblent aplanis. A en croire Ali Bongo, ils n’auraient même jamais existé. « Quelle pomme de discorde?« , s’est offusqué le président gabonais, vendredi, face aux journalistes qui lui posaient la question. « Au plus haut niveau, il n’a jamais été question de pomme de discorde« , a-t-il répondu, sans autre forme de commentaire.