Par Daniel Mengara, Président de « Bongo Doit Partir », le 12 janvier 2010.
Après l’ère du parti unique et celle des démocraties de façade, l’Afrique serait-elle en train d’inaugurer l’ère des monarchies présidentielles ? Telle est bel et bien la tendance qui a semblé se dégager de la pratique ô combien oxymorique de la politique en Afrique francophone au cours de la dernière décennie, notamment depuis la mort de Laurent-Désiré Kabila en 2001, un Kabila dont le régime avait inauguré la pratique en Afrique républicaine en plaçant à la tête du pays le fils du président assassiné.
Je passerai évidemment sur le cas marocain qui ne nous concerne pas ici, ce pays étant une monarchie avérée qui, en plaçant Mohammed VI, le fils du défunt roi Hassan II, à la tête du royaume en 1999, ne faisait que suivre le dictat de succession familiale inhérent à ce type de régime politique. Ce qui frappe, c’est plutôt quand, au sein d’une république comme le Gabon, le Togo ou le Sénégal, on retrouve des présidents manipulateurs qui passent outre les injonctions républicaines et, dans le cas du Sénégal, démocratiques, parce que, dans leurs esprits se bousculent des velléités monarchiques par lesquelles ils caressent le rêve secret de faire de leurs pays les propriétés privées et personnelles de leurs familles ou de leurs clans.
Ce qui est sûr c’est que l’association des deux termes—monarchie et présidence—peut sonner comme une antithèse ou, comme on le dit communément en analyse littéraire, un oxymore. L’historien politique, qu’il soit africain ou occidental, est évidemment surpris par cet oxymore. La monarchie et le présidentialisme républicain, dans la pratique occidentale, ne se sont vraiment jamais confondus. Le présidentialisme est né de la pratique républicaine qui a consisté, pour l’Europe, à remplacer ses monarchies par des républiques, puis à élire ou nommer, à la place de ses monarques, des présidents de république. En Europe classique, ce furent les cités-états d’Athènes et Sparte, et puis plus tard, Rome, qui instituèrent les premiers, au travers d’une histoire compliquée, les bases de ce que l’on peut appeler aujourd’hui « une république », et ceci en opposition de la pratique monarchique. C’est également dans le monde classique gréco-romain que, de Platon à Cicéron, se formulèrent les grandes idées républicaines qui, une fois réactualisées au 18ème siècle des révolutions, vinrent conforter les républiques modernes. Cependant, la république comme principe d’état et de gouvernance disparut plus ou moins au Moyen Age, ne subsistant que dans le contexte de quelques villes comme celle de Venise qui s’établirent comme villes indépendantes avec des formes de gouvernance éloignées des principes monarchiques, autrement dit, des républiques si l’on utilise le terme avec élasticité.
Mais c’est bel et bien avec la Renaissance que les prémisses de ce que seront les républiques modernes apparaissent, comme on le voit avec la naissance de républiques en Pologne et aux Pays-Bas dès le 16e siècle, puis, dès le 17e siècle, en Grande Bretagne où se mettra en place une forme particulière de la république qu’on appellera monarchie constitutionnelle ; c’est là une forme qui, de nos jours, se pratique le plus souvent sur la base d’un modèle de monarchie parlementaire avec séparation des pouvoirs. Dans la plupart des cas, surtout les cas qui fonctionnent sur la base de la démocratie, le monarque (roi ou reine) exerce une autorité purement symbolique dans le cadre de l’exécutif, sans capacité réelle de gouverner. Ce sont les révolutions américaines (1776) et françaises (1789) qui, finalement, généralisent la pratique républicaine moderne dès le 18e siècle, avec comme ajout important l’insertion des principes de démocratie et de droits humains tels qu’ils s’affirmèrent dans les nations qui adoptèrent désormais les fondements d’une république démocratique, autrement dit, un modèle de gouvernement basé sur le principe d’un Etat à la fois républicain et démocratique.
Ceci parce que « république » et « démocratie » ne vont pas forcément ensemble. Une république peut se construire sur la base d’un modèle totalitaire—exactement comme on le vit partout dans le monde lors de la Guerre Froide avec l’éclosion un peu partout dans le Tiers-Monde de républiques socialisées sur la base du parti unique totalitaire inspiré par l’Union soviétique—,tout comme elle peut se construire sur une base démocratique comme cela devint le cas aux USA, en France et dans d’autres pays reconnus démocratiques aujourd’hui. La forme républicaine de l’Etat—démocratique ou non démocratique—est aujourd’hui la plus répandue, se retrouvant pratiquée, selon Wikipedia, dans 135 des 194 pays recensés dans le monde. Sur ces 194 pays, seulement 22 restent des royaumes ou des sultanats, 3 sont des principautés et 9 demeurent plus ou moins indéfinissables parce que représentants des unions ou des fédérations comportant des modèles de gouvernement aux formes plutôt variées. Il ressort cependant de cette analyse qu’une république, avant tout, constitue un modèle de gouvernement non héréditaire, ce qui, en principe, l’oppose à la monarchie.
Et c’est parce que la république est un modèle d’Etat différent de la monarchie que l’on comprenait, jusqu’à présent, que l’un devait forcément remplacer ou exclure l’autre car la confusion des deux est non seulement antinomique, elle est aussi intenable dans le contexte d’un Etat qui se veut moderne, c’est-à-dire démocratique et garant des droits humains. Autrement dit, on est une république ou on ne l’est pas. Et on est une démocratie ou on ne l’est pas. Il faut choisir. Il faut choisir car l’amalgame, croyait-on, n’est point permissible. Mais c’était apparemment sans compter avec le « génie » des « grands timoniers » africains qui ont non seulement déjà réussi l’exploit d’ulcérer, partout en Afrique, mais surtout en Afrique francophone, la notion de démocratie en la transformant en ce que le politologue camerounais Achille Mbembe appelle « multipartisme administratif », c’est-à-dire un multipartisme sans démocratie, mais ont apparemment décidé, cette foi-ci, d’instituer, en Afrique francophone surtout, ce que l’on peut désormais appeler l’ère des monarchies présidentielles.
S’agissant du multipartisme administratif en Afrique, voici ce que, plus précisément, nous en dit Achille Mbembe tel que cité par François-Xavier Verschave dans La Françafrique : le plus long scandale de la République:
Une fraction de l’élite au pouvoir confisque l’appareil d’Etat et s’allie à l’armée. Regroupée autour d’un noyau ethnique, bénéficiant de solides appuis intérieurs et disposant du contrôle absolu des organes de répression (brigade présidentielle, police secrète, unités d’élite de l’armée, paras-commandos et organisations paramilitaires), elle s’appuie, en outre, sur d’importants réseaux extérieurs et sur des connexions tissées à la faveur des privatisations et au détour de ses propres participations aux réseaux internationaux de la » finance informelle » (contrebande, trafic de pierres précieuses – émeraudes, diamants -, d’armes, d’ivoire ou de drogue). Puis, à partir de cette position avantageuse, elle tente d’imposer, par la violence, un multipartisme administratif qui consiste à agréger des formations politiques, tout en maintenant […] la répression : […] intimidation, harcèlement permanent, voire arrestation d’opposants, [….] corruption à grande échelle et aggravation des pratiques clientélistes, criminalisation des interventions de l’Etat contre la société (7), […] recours au discours tribal … (p. 289)
Autrement dit, des régimes politiques criminalisés qui, à travers le multipartisme administratif, se contentent d’être des machines à légaliser des partis politiques conviviaux sans toutefois leur permettre l’exercice sans entrave de la démocratie.
On compte aujourd’hui une poignée de pays francophones, à l’instar du Bénin, du Mali et, dans une certaine mesure, le Sénégal, où s’exerce réellement le débat démocratique et, surtout, où subsiste une relative garantie d’alternance démocratique. Par contre, de tous les pays d’Afrique sub-saharienne qui constituent l’héritage colonial français en Afrique, dont la République centrafricaine, Madagascar, le Cameroun, Djibouti, le Congo-Brazzaville, le Gabon, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, la Guinée-Conakry, le Sénégal, le Mali, le Togo, le Bénin, le Tchad, le Niger, la Mauritanie, seuls trois—le Sénégal, le Bénin et le Mali—ont connu une alternance démocratique durable et réelle par laquelle un changement de régime et/ou de président a été opéré au travers d’élections libres et non remises en cause, par la suite, par un coup d’état, et ce depuis le début du processus multipartiste. Dans bien des cas, des processus démocratiques bien commencés ou jamais bien commencés ont été interrompus ou dénaturés. Du coup,—même en y ajoutant les pays francophones anciennement colonisés par la Belgique comme le Burundi, le Rwanda et le Congo-Kinshasa, et même en y intégrant les nations arabes francophones du Maghreb, dont aucune n’est démocratique non plus—, l’évolution démocratique de l’aire francophone semble s’être véritablement enlisée dans ce que l’on pourrait appeler la « malédiction francophone », c’est-à-dire la pratique des élections de façade dans le contexte d’une démocratie de façade elle-même validée et reconnue par des alliés politiques français, en tête desquels on retrouvera souvent le Président français. Les cas du Gabon et du Togo ne tromperont certainement personne, et certains, comme François-Xavier Verschave, verront probablement, dans cette débâcle politique généralisée de l’Afrique francophone, la main invisible de la Françafrique.
S’agissant des monarchies présidentielles, il se dégage là aussi un certain nombre de constats. Quand le régime laissé par Laurent-Désiré Kabila, assassiné le 16 janvier 2001 par son garde du corps Rashidi Kasereka, décida de mettre à la tête du pays Joseph Kabila le fils du président décédé, l’on en rigola presque. La pratique semblait nouvelle et inhabituelle, même en Afrique où on a tout vu (comme diraient les Africains). Elle émut, certes, les Congolais, mais elle fut reconnue par les observateurs comme le moindre mal dans un régime vieux seulement de moins de 4 ans qui n’avait pas encore pu se stabiliser après l’insurrection éclair qui avait défait Mobutu et conduit Kabila le père au pouvoir en 1997. Pour sauver le Congo-Kinshasa du chaos total, donc, il fallait absolument préserver ce qui restait du régime de Kabila, et la meilleure manière d’assurer cette continuité était, sur le plan symbolique, l’intronisation de Joseph Kabila.
Ce qui distingue, par conséquent, le cas Congolais des autres cas que nous verrons plus bas, c’est que Laurent-Désiré Kabila n’avait aucunement eu le temps de préparer son fils à la succession. L’on douterait même que l’idée ait pu traverser son esprit tellement il était préoccupé par sa propre survie au pouvoir dans un contexte de guerre civile plus que jamais avérée au Congo à cette époque. Joseph Kabila arrive donc au pouvoir adoubé non pas par son père, mais par des éléments influents du jeune régime que ce dernier avait mis en place, éléments qui, se retrouvant soudain sans leader et sentant le potentiel d’écroulement qui les guettait s’ils se lançaient dans des querelles de leadership, ont compris que seul le choix de la neutralité et de la continuité, c’est-à-dire de Joseph Kabila, les préserverait du chaos. Joseph Kabila était donc un choix improvisé et non préparé.
Ce ne fut cependant pas le cas au Togo. Dans le cas togolais, le régime vieux de 38 ans de Gnassingbé Eyadéma avait eu largement le temps de préparer les Togolais à une succession monarchique qui, du vivant d’Eyadéma le père, ne faisait aucun doute. C’est d’ailleurs ce qui ressort d’un reportage de Monique Mas dans un article publié sur le site de Radio France International le 7 février 2005 :
En 2002, le président Eyadéma a fait le ménage dans ses propres écuries, écartant certains anciens piliers du régime qui prétendaient réformer la conduite des affaires afin de perpétuer le pouvoir ou d’y accéder. L’ancien président du Parlement togolais et patron du RPT, Maurice Dahuku Péré et quelques autres se sont ainsi cassés les dents. L’année suivante, tandis que des indiscrétions en provenance d’Italie rendaient publique la maladie de Gnassingbé Eyadéma, ce dernier préparait en quelque sorte son testament, confiant le portefeuille des Mines, de l’Equipement et des Télécommunication à son fils Faure Essonizam Gnassingbé, le 29 juillet 2003. Diplômé de grandes écoles de commerce et de gestion américaines et française, trésorier payeur du RPT, Faure était de notoriété publique le successeur désigné d’Eyadéma. L’opposition neutralisée, les piliers civils du régime écartés, l’armée purgée de ses récalcitrants, la maison Gnassingbé entend conserver tous ses quartiers de pouvoir, par la force. Paris lui demande aujourd’hui de «retrouver la voie de la légalité». Comme son père Gnassingbé Eyadéma, Faure Gnassingbé, s’est contenté d’en emprunter les apparences. (Monique Mas, RFI, 7/02/2005)
Le Gabon, comme le Togo, a lui aussi eu le temps de préparer la succession monarchique. Quand, le 8 juin 2009, le régime vieux de près de 42 ans d’Omar Bongo reconnut officiellement le décès de ce dernier dans un hôpital espagnol, il ne faisait aucun doute qu’Omar Bongo avait déjà préparé son fils à la succession. Malgré les démentis maintes fois faits par le défunt président dans les médias à ce sujet, il ne put jamais détourner les observateurs gabonais ou étrangers de cette finalité. Le simple fait qu’il ait fait de ses deux enfants non seulement des piliers du régime, mais aussi la base même de la survie militaire et financière de ce régime, était un signe qui ne trompait personne. Ali Bongo le successeur désigné, on le sait, n’avait pas été fait Ministre de la défense, donc des armées, par hasard. A ce poste, il contrôlait la survie militaire du régime bongoïste. Et Pascaline Bongo, on le sait également, n’avait pas été faite directrice du cabinet présidentiel par hasard. A ce poste, elle contrôlait toutes les affaires publiques et privées de son père et détenait tous les secrets financiers de la famille, y compris le contrôle du coffre-fort noir présidentiel dans lequel Omar Bongo, dans son bureau même, gardait une bonne partie du budget national en vue de mieux contrôler, directement, les comportements de son gouvernement et alimenter la corruption sur laquelle était basée son système.
Ceux qui savent la gestion familiale d’Omar Bongo se souviennent que c’est pratiquement de la présidence de la République que Bongo distribuait à ses administrés, en personne et en cash, une bonne partie des budgets de fonctionnement de l’Etat. Pire, après la mort de Bongo, et malgré la présence d’une Présidente par intérim—Mme Rose Rogombé—désignée par la Constitution, la famille Bongo, dont la majorité ne détenait que des postes politiques qui auraient dû prendre fin avec la mort de Bongo, ne daigna même pas quitter le palais présidentiel, comme si elle savait d’avance que le sort du pays passait forcément par elle. Omar Bongo avait tant et si bien préparé cette succession que, quand vint le moment pour son parti, le Parti Démocratique Gabonais (PDG), de se désigner un candidat en vue des élections présidentielles du 30 août 2009, les piliers du régime stratégiquement mis en place dans le parti par Omar Bongo firent du forcing pour imposer au parti la candidature d’Ali Bongo. Aux dires mêmes de Jean Eyegue Ndong, dernier Premier ministre d’Omar Bongo et pédégiste démissionnaire qui avait également, chose inédite au Gabon, démissionné de son poste de Premier ministre en signe de protestation, la procédure de désignation du candidat du parti avait été violée.
Ce forcing, à l’analyse, ne put aboutir que grâce à une seule chose : l’argent. Autrement dit, jusqu’à sa mort, Omar Bongo avait détenu les clés du financement de son parti politique. Le coffre-fort noir que le défunt président gardait dans un recoin secret de son bureau, coffre-fort qui a d’ailleurs en partie justifié que sa famille n’ait point voulu s’évacuer du palais présidentiel, contenait la seule cagnotte électorale dont disposait le PDG. Dès lors, donc, qu’Ali Bongo, candidat à la succession de son père, avait, par l’entremise de sa sœur Pascaline Bongo, confisqué cette cagnotte, il était par la suite facile pour le clan Bongo d’imposer Ali Bongo comme candidat du PDG. Il était ainsi devenu, par la force des choses, le seul candidat qui avait accès à tout l’argent du PDG confisqué par son père. Et comme le PDG ne gérait pas indépendamment ces fonds, le parti se retrouva naturellement, tant sur le plan financier que militaire, à la merci des Bongo, et obligé d’accepter sa candidature.
C’est d’ailleurs ce qui se vit tout au long de la campagne présidentielle gabonaise. Les candidats dissidents du PDG, tout comme ceux de l’opposition d’ailleurs, ne purent rassembler assez d’argent en les quelques 45 jours d’intérim qu’imposait la Constitution dans ce contexte d’élection anticipée. Et malgré la prolongation des délais commandée après coup par la Cour constitutionnelle en vue de l’observation du deuil national de 30 jours imposé par le régime, les seuls à finalement disposer d’assez d’argent pour mener une campagne digne de ce nom furent Ali Bongo, fils du défunt président, et André Mba Obame, un des piliers du régime et Ministre de l’intérieur jusqu’au 19 juin 2009.
Il faut cependant noter que Daniel Mengara, opposant exilé dont le régime avait rejeté la candidature lors des élections présidentielles d’août 2009, accuse, dans son message à la nation du 4 janvier 2009, Mba Obame non seulement de « fausse opposition », mais aussi de complicité et de collusion avec Ali Bongo. Pour cet opposant exilé aux Etats-Unis depuis 1998, André Mba Obame a, pendant près de 25 ans, travaillé avec Ali Bongo et Omar Bongo à la consolidation du patrimoine antidémocratique du régime bongoïste. N’ayant jamais apprécié de s’être fait ravir son poste tant prisé de Ministre de l’intérieur le 19 juin 2009 par le gouvernement de transition qui le trouvait « impopulaire » auprès des Gabonais, André Mba Obame devint « opposant » le 17 juillet 2009 quand, de Barcelone, il annonça sa candidature à la présidentielle anticipée du 30 août 2009. Daniel Mengara se demande si cette « opposition » serait née si Mba Obame n’avait pas été bouté de son poste de Ministre de l’intérieur par le gouvernement intérimaire.
Daniel Mengara pense que la candidature et l’opposition tardive d’André Mba Obame ne furent qu’un stratagème de plus de la part de ce qu’il appelle les « deux fils » de Bongo—Ali Bongo le fils « naturel » et André Mba Obame le fils adoptif—, stratagème par lequel ils ont entrepris de finaliser, avec l’argent légué par Omar Bongo, leur œuvre d’atomisation de l’opposition réelle en établissant Ali Bongo comme Président du Gabon et André Mba Obame comme chef de l’opposition gabonaise, les deux prenant ainsi en tenaille le peuple pour le compte de la survie du régime, ce qui aura comme résultat immédiat de ne plus jamais permettre aucune réelle possibilité d’alternance démocratique au Gabon.
Daniel Mengara cite d’ailleurs à ce propos le discours ambigu d’André Mba Obame qui, d’une part, se dit opposant, mais, d’autre part, ne rejette pas l’héritage bongoïste. Avant, pendant et après la campagne, affirme Mengara, Mba Obame n’a cessé d’étaler son bongoïsme en promettant qu’il érigerait un monument à la mémoire d’Omar Bongo parce que, à ses yeux, Omar Bongo était un grand homme. On suppose donc qu’à ses yeux, les accomplissements politiques et économiques d’Omar Bongo furent exemplaires, ce qui justifierait un tel monument ! Mais nous savons la plupart des Gabonais suffisamment éduqués pour savoir que de telles déclarations sont certainement anachroniques, surtout au vu des 42 années de misères politiques et économiques que les Gabonais ont vécues sous Omar Bongo. Pire, ayant reconnu avoir été l’un des artisans de la survie politique d’Omar Bongo, donc un de ceux qui ont « apaisé » le Gabon au goût du dictateur, il a continué à affirmer que le Gabon était une démocratie jusqu’à la mort d’Omar Bongo le 8 juin 2009, ce que, bien évidemment, Daniel Mengara trouve ridicule comme affirmation. Cette contradiction, a conclu Daniel Mengara, est le signe même du désir des « deux fils » de Bongo de conduire le pays dans une voie de garage politique par laquelle les deux confisqueraient, l’un le pouvoir, l’autre l’opposition, entre leurs mains. Ils garantiraient ainsi la continuité de la dynastie bongoïste au Gabon.
C’est dire que les cas du Gabon et du Togo, et dans une moindre mesure, celui du Congo-Kinshasa, sont devenus des cas d’école signaleurs d’une tendance que de nombreux Africains semblent désormais redouter. Les rumeurs de succession monarchique circulent d’ailleurs déjà au Sénégal où Abdoulaye Wade est soupçonné de vouloir imposer son fils Karim Wade aux Sénégalais lors de la prochaine échéance présidentielle. Reste à savoir si les institutions sénégalaises, plus longtemps rompues à la pratique démocratique que bon nombre de leurs pairs francophones, laisseront cette possibilité au Président Wade. Hors du giron francophone, des pays encore moins démocratiques comme la Libye et l’Egypte sont déjà classés par l’opinion africaine au rang des prochaines monarchies présidentielles.
On nous répondra, certes, qu’aux Etats-Unis, on vit George W. Bush succéder à son père en 2001, ce qui démontrerait que la tendance n’est pas qu’africaine. A cela, on répondrait facilement qu’il y a une différence majeure entre le cas américain et le cas togolais ou gabonais. En Amérique, les institutions sont démocratiques et donnent le libre choix au peuple de se désigner le président qu’il veut, en fonction de la compétence ou de l’attrait dont ce dernier jouirait à leurs yeux. Le peuple américain, contrairement aux peuples gabonais ou togolais, avait donc librement choisi Bush le fils face à des rivaux très sérieux et très solides, montrant ainsi qu’il avait une confiance assez forte en ses institutions pour laisser ces institutions jouer leur rôle de garantes de l’intégrité du vote populaire. Il n’y a qu’à voir la méticulosité avec laquelle les institutions américaines s’activèrent à vérifier, évaluer, puis valider ce vote lors des multiples recomptages que mandèrent les cours du pays une fois que le résultat avait été reconnu trop proche. Parce qu’en Afrique (francophone surtout), l’impartialité et la neutralité des institutions est toujours mise en doute, on a tendance, sur le continent, à ne leur accorder qu’une confiance relative, et souvent, comme dans des pays comme le Gabon ou le Togo, aucune confiance du tout. Dès lors que les choix de Faure Eyadéma ou d’Ali Bongo ne sont pas des choix démocratiques, mais des choix manipulés, l’on aboutit forcément à une crise de confiance qui reflète, à son tour, l’arbitraire tueur de souveraineté nationale qui est devenu la pratique commune des républiques bananières d’Afrique francophone. Dans ce contexte, hélas, ce sont plutôt les régimes gravitant autour de familles présidentielles aux tendances despotiques et monarchiques qui, par des pratiques et procédures antidémocratiques, imposent leurs choix aux peuples, et non le contraire.
Les mêmes causes menant toujours aux mêmes effets, il serait illusoire de croire que les fils et filles des pères présidents, une fois devenus eux-mêmes présidents, laisseraient un jour le pouvoir à quelqu’un d’autre qu’à leur propre progéniture. C’est que, ayant souvent gouverné par l’arbitraire et s’étant souvent refusé à l’état de droit, les nouveaux dictateurs savent très bien, comme leur père, que tout changement indépendant de régime au travers duquel le peuple se serait souverainement et librement choisi un nouveau président mènerait inévitablement à des questionnements par rapport aux arbitraires politiques et financiers du passé, donc à une potentielle chasse aux sorcières qui chercherait à leur faire répondre des crimes commis par leurs familles, avec comme conséquence principale probable la saisine de tous les biens accumulés par les dynasties familiales désavouées.
Démocratiser, dans ce contexte, voudrait inévitablement dire la possibilité de tout perdre. Or, c’est cette peur de tout perdre et de tout faire perdre à leurs familles qui, en fin de compte, fera que ces fils de présidents devenus arbitrairement présidents préparent, à leur tour, leurs propres fils et filles à la succession, ceci dans le but de protéger indéfiniment leurs familles de toute forme d’atteinte et les biens malhonnêtement accumulés de toute forme de saisine. La tendance monarchique risque donc de se généraliser au sein de régimes additionnels en Afrique, surtout au sein de ces régimes où les présidents en exercice, ayant longtemps régné par l’arbitraire, craindraient les représailles du régime qui, élu démocratiquement ou non, viendrait au pouvoir après eux.
C’est dire que le phénomène de pouvoir familial ou clanique qui a donné naissance à ce que l’on peut désormais appeler les présidences monarchiques ou monarchies présidentielles africaines, c’est-à-dire ces systèmes de pouvoirs absolu et héréditaire que l’on a vu, ces derniers temps, éclore ou se dessiner dans le paysage politique africain, aspirent à avoir un bel avenir devant elles, sauf, évidemment, élans révolutionnaires et ras-le-bol insurrectionnel de la part des peuples ainsi pris en otage.
Dr. Daniel Mengara
Président du mouvement « Bongo Doit partir »
BDP-Gabon Nouveau
P.O. Box 3216 TCB
West Orange, NJ 07052, USA
Tel/Fax : 973-447-9763
Dernière modification le 14 janvier 2010
Merci pour le developpement sur les « monarchies presidentielles »/ « presidences monarchiques » et surtout sur le ROLE de Andre Mba Obame que CHAQUE Gabonais se doit SINCEREMENT personnellement d’ANALYSER en toute SERENITE/SOBRIETE pour s’ecarter des passions fausses poussant a un certain « Culte de la Personalite » vis a vis de celui qui se fait appeler par ses « Freres de Lumiere » A.M.O.
N’oubliez pas de CORRIGER la date de publication/modification qui – je pense – devrait etre le « 14 janvier 2010 » en lieu et place de « 14 janvier 2009″…
Da zhaohu,
Wànshìtong