A tout juste un mois de l’élection législative partielle sur les sièges laissés vacants par les démissionnaires du parti au pouvoir en juillet dernier, le ministre de l’Intérieur, Jean François Ndongou, évoque dans l’interview qu’il nous a accordé ce 6 mai les problèmes liés à la révision du fichier électoral, qui sera finalement pour ce scrutin le même qui a servi à l’élection d’août dernier. Le ministre de l’Intérieur revient également sur le processus de légalisation de l’Union nationale (UN, opposition), ainsi que sur les mesures draconiennes qui seront prises avant la fin de l’année pour juguler la montée de l’insécurité.
Dans quelques semaines vous allez organiser des élections partielles dans huit circonscriptions électorales. A nos confrères de Gabon Matin, vous aviez indiqué que «tout est fin prêt». Etes-vous réellement prêt ?
«Oui nous sommes prêts, puisque nous n’avons que cinq sièges de députés. On peut vous dire qu’à l’heure actuelle il y aura un peu plus de 50 000 électeurs. Nous allons tirer les listes qui concernent les cinq sièges et je suis en contact avec nos amis financiers pour procéder à l’impression des cartes d’électeurs. En ce qui nous concerne, nous n’avons que ces deux tâches : imprimer la liste, la remettre à la CENAP, la convoyer vers les provinces où se dérouleront les élections, produire les cartes d’électeur et distribuer ces cartes. Donc nous sommes prêts pour cette élection partielle.
Le fichier électoral qui a servi à l’élection présidentielle avait été très critiqué en raison de certaines irrégularités que vous aviez vous-même reconnues. Vous aviez d’ailleurs obtenu un report du scrutin partiel de huit mois pour poursuivre le nettoyage du fichier électoral et le rendre «progressivement plus fiable». L’Administration a-t-elle vidé le fichier électoral de ces irrégularités ?
Les irrégularités ne sont pas de notre ressort, elles ne viennent pas du fait que l’administration ne fait pas correctement sont travail, c’est tout simplement parce que certains compatriotes ont pensés qu’ils pouvaient induire l’administration en erreur en se faisant inscrire dans plusieurs centres ou plusieurs bureaux de vote, ce qui a conduit régulièrement aux doublons, des doublons voulus volontairement par des compatriotes.
Lorsque quelqu’un vient, il écrit son nom, Ndongou, il donne la date et le lieu de naissance, il vient la prochaine fois il met N’dongou, cela devient un autre nom, il change la profession, c’est une autre personne, il change de lieu de naissance, ça devient une autre personne, et la machine enregistre tout cela. Donc lorsqu’on lance le contrôle de doublon par la méthode informatique avec un programme, il y a des doublons qui restent parce que Ndongou qui est enregistré n’a le même lieu de naissance que le deuxième N’dongou ou parfois volontairement, ils changent d’acte de naissance.
On s’inscrit en milieu urbain avec la carte nationale d’identité et en milieu rural avec l’acte de naissance et il faut reconnaitre que notre fichier d’état-civil n’est pas fiable. Les actes de naissances sont délivrés au petit bonheur la chance et sans rigueur, donc il peut arriver qu’une personne ait trois copies d’acte de naissance ou il fabrique du faut qu’il cherche à légaliser, donc voila ce qui fait que le fichier devient irrégulier. Pour cette élection, nous avons depuis longtemps continué à traiter les doublons, nous avons essayé un tant soit peu de retirer certains doublons, nous avons radié les décédés. La base du fichier que nous allons présenter est celui de 2009 mais nous pensons qu’il est assez fiable.
Vous aviez annoncé après les vives critiques d’août dernier sur les listes électorales que vous procèderiez dès janvier à la reconstitution intégrale du fichier électoral. Ce travail a-t-il été fait ? Si oui, quel sont les résultats de l’opération ? Si non, quelles sont les raisons ?
Nous allons annuler les listes électorales et cela se fera à une période où nous n’aurons pas la pression. Il n’y a pas d’élection en vue d’ici la fin de l’année 2010 donc nous allons être un peu plus rigoureux, plus regardant pour essayer d’avoir un fichier assez fiable en retirant les doublons, en essayant de les identifier. Les méthodes vont changer et le programme sera renforcé.
Nous avons dans notre fichier deux types d’électeurs : les électeurs qui s’étaient fait inscrire en 1993 où il n’était pas fait obligation d’avoir des ascendants, nous avons des électeurs qu’on a inscrit à partir de 2006 où il avait obligation d’avoir des ascendants. Donc nous allons essayer de ressortir cela et compléter les informations. On va demander même à ceux qui savent qu’ils sont déjà inscrits qu’ils reviennent pour vérifier si l’inscription est faite correctement. Ce travail se ferra fait juste après les partielles. Nous allons définir la date et les médias seront informés car nous feront une campagne de sensibilisation là-dessus pour que les inscriptions se passent dans de bonnes conditions.
L’introduction de la biométrie dans le fichier électoral avait également été évoquée pour en finir avec la fraude. Où en êtes-vous avec ce dossier de la biométrie ?
Il y a des préalables et le premier est que nous ayons d’abord une loi sur l’informatique et les libertés individuelles. Cette loi est en examen au niveau du Parlement, c’est une proposition, elle n’est pas encore arrivée sur le table du gouvernement. Après il faut faire une étude de faisabilité : Est-ce que l’environnement socioculturel gabonais est disposé à accueillir un système d’élection sur la base biométrique ? Combien cela peut coûter ? Quelle est la technologie qu’il faut ? Quel est le fournisseur ? Quel est l’entretien ? Parce que si nous lançons le système biométrique, il va falloir que nous soyons prêts à tout moment. Nous avons vécu en 2009 une situation on nous ne pensions pas organiser une élection, nous étions amener à organiser une élection présidentielle anticipé. C’est toutes ces conditions qu’il faut examiner avant de dire oui ou non, nous faisons la biométrie. Mais il faut préciser qu’il n’y a pas de liens directs entre l’adoption de la loi sur l’informatique et les libertés individuelles et la mise en place d’un système électoral sur la base de la biométrie. Il n’y a pas de lien. La loi que nous attendons est un cadre juridique qui nous permet d’exploiter les potentialités de l’informatique.
La délivrance du récépissé à l’UN vient apaiser le climat social quelque peu tendu par la polémique née autour de la «légalisation » de ce parti de l’opposition. Pourtant vous aviez affirmé que la loi ne vous fixait pas un délai quelconque pour la délivrance de ce document et que vous aviez tout votre temps. Est-ce la voie de la raison, le respect du droit ou la volonté de faire grandir la démocratie qui a motivé votre décision ?
C’est la voie de la raison et faire grandir la démocratie en République Gabonaise qui m’a motivé. Il y a des principes qui sont dictés lorsqu’on crée un parti, des principes qui sont dictés lorsqu’il y a fusion des partis. Lorsqu’on crée un parti, on dépose le dossier au ministère de l’Intérieur, (le procès verbal de la délibération du congrès, le logo du parti, la composition du bureau directeur du parti), on dépose ce dossier avec 3000 signatures et le ministère de l’intérieur a 4 mois pour examiner ce dossier. Si le ministère de l’intérieur n’a pas réagi au bout de 4 mois ce parti est réputé être reconnu de facto, cela intervient dans le cadre de la création. Dans le cadre de la fusion des partis, ou les partis politiques existants perdent leur existante juridique au profit de la nouvelle structure, la loi dit clairement qu’il y a une existence automatique matérialisée par la délivrance d’un récépissé. C’est ce récépissé qui permet à ce parti de prouver son existence juridique. Il y a plusieurs partis politiques qui ce sont retrouver dans le cas de l’UN. Moi j’avais besoin de vérifier un certain nombre de choses, est-ce que les congrès se sont tenus correctement ? Est-ce qu’ils ont respectés les délais de convocation de ce congrès ? Est-ce que les libérations ont été prises dans les formes ? Et pendant l’examen, il y a un fait qui est arrivé, une des personnalités de ce parti compare le Gabon à un autre pays de l’Afrique où il y a eu un coup d’Etat. Moi je pensais que c’était un parti qui venait enrichir les débats politique gabonais et au cours de l’entretien avec le président de ce parti, j’ai dit que c’est un fait nouveau qui vient gêner la procédure de l’instruction de ce dossier, donc il me faut plus de temps pour me rassurer que vous ne venez pas troubler l’ordre établi, vous ne venez pas remettre en cause l’existence des institutions de la République.
Donc j’ai pris le temps pour réexaminer ce dossier sur un certains nombres de critères que nous nous sommes définis ici au ministère de l’intérieur (enquête de moralité, vérifier un certains nombres de faits) et nous sommes arrivés à la conclusion que malgré le fait qu’il ait déclaré que le Gabon pourrait subir un coup d’Etat, nous pensons que ce compatriote n’ira pas au bout de sa pensée et nous avons délivré le récépissé.
Mais là j’avais tout le temps, la loi ne m’oppose aucun délai, la loi m’impose le délai lorsqu’il s’agit de la création d’un parti politique. Prenons un exemple : monsieur Ndjimbi, si vous allez ouvrir votre compte dans une banque, qu’est-ce qui prouve aux autres que vous avez un compte dans une banque, c’est le document que le banquier vous donne qui justifie que monsieur Ndjimbi a un compte ici ou la remise d’un chéquier qui permet désormais de faire des opérations. Tant que vous n’aviez pas cela, vous n’étiez pas reconnu, il n’y avait pas de reconnaissance sans la matérialisation d’un document délivré par le ministère de l’Intérieur, donc le récépissé. Certains compatriotes pensent que nous n’avons pas le droit de parler des questions juridiques parce que nous ne sommes pas d’éminents juristes, mais nous nous sommes des praticiens.
Les dispositions des lois sont imposables à tous les citoyens et en matière de création et d’organisation de la vie politique, c’est le ministère de l’Intérieur qui est en charge de ces questions. Donc les lois qui sont adoptées par le Parlement, nous les appliquons telles qu’elles ont été adoptées par le Parlement.
Concernant la dénomination de l’Union nationale, il y a un compatriote qui a évoqué l’antériorité de cette dénomination de ce parti or c’est votre ministère qui centralise la création des partis, est-ce que pendant votre étude du dossier de l’Union national vous avez constaté cette antériorité de la dénomination ?
Nous ne nous sommes pas penchés sur cette question d’autant plus que le compatriote avait déjà saisi l’instance judiciaire. Nous notre décision n’avait plus d’importance. Nous avons été informé que ce compatriote avait utilisé le nom de l’UN au cours de l’élection présidentielle de 2005, nous ne nous sommes pas appesantis là-dessus, nous laissons le soin à la justice de trancher. Maintenant si les tribunaux nous interpellent pour apporter un certain nombre de faits, nous verrons dans la mesure de notre possible. Il y a un certain nombre d’éléments qu’il faut cerner et savoir s’il avait présenté sa candidature, est-ce que sa candidature avait été acceptée par la commission électorale ? Nous sommes prêts à apporter notre contribution pour éclairer les uns les autres. Mais pour la reconnaissance juridique de l’UN nous ne nous sommes pas appesantis dessus, mais le compatriote est libre de saisir les tribunaux comme il l’a fait.
Qu’est ce que le ministère de l’intérieur envisage fait pour lutter contre l’insécurité grandissante ?
Ce que nous envisageons, c’est la présence effective des forces de polices à travers la ville de Libreville et j’ose espérer que les compatriotes ne diront pas que nous voulons militariser la ville de Libreville. Vous vous souviendrez lorsque nous avons relevé le niveau de sécurité dans la ville de Libreville, les compatriotes se plaignaient qu’ils y avaient trop de policiers et de militaires dans la ville et cette fois ci, nous allons relevé le niveau de sécurité, il y aura des patrouilles régulière, il aura des contrôles des citoyens, des véhicules, à toutes heures, à tout moment et nous allons développer d’autres stratégies sur des questions d’insécurité en général à travers le Gabon, mais de manière particulière à Libreville.
Nous avons procéder à un recrutement et là nous avons 500 compatriotes en formation, nous allons procéder samedi au concours pour le recrutement de 3 000 policiers au titre de l’année 2010. Nous pensons que d’ici le 31 décembre 2010, nous allons avoir 3 500 nouveaux policiers, donc nous allons relever le niveau opérationnel de la police en hommes. Nous allons acquérir sur instruction du président de la république des motos, des véhicules pour faire en sorte que les policiers aient la possibilité de circuler plus rapidement à travers les artères de Libreville et des autres villes du Gabon. Nous allons relancer la brigade canine, non seulement pour traquer les brigands mais aussi pour lutter contre le fléau des stupéfiants au niveau du Gabon autant de projets que nous allons lancer pour relever le niveau opérationnel de la police».