Conscient des menaces (Chine, Inde, Brésil…) qui pèsent sur les parts de marchés françaises en Afrique, le président Nicolas Sarkozy a appelé les dirigeants africains à renforcer leurs échanges commerciaux avec Paris lors du sommet France-Afrique de Nice. Mais sur le terrain, la réalité est cruelle et semble prédire l’assèchement irrévocable des relations économiques privilégies françafricaines.
40% dans les années 60 contre 2% actuellement, c’est le triste revirement des échanges longtemps privilégiés entre la France et le continent africain. Pour pallier cette perte de vitesse spectaculaire, le président français avait présenté, lors du sommet France-Afrique de Nice (31 mai-2juin), une nouvelle stratégie pour maintenir ses positions commerciales et en gagner en Afrique.
Certes l’initiative est louable tant il en va de l’économie française, mais rien n’indique cependant que dirigeants africains adhéreront les yeux fermés à ce projet face aux gros investissements et promesses des pays tels que la Chine, l’Inde ou encore le Brésil pour ne citer que ces pays émergents. Preuve que la France n’a plus de chasse gardée sur le continent, même dans le pré carré francophone.
Première menace française : la Chine. En dix ans, elle a décuplé ses échanges commerciaux avec le continent, devenant le premier partenaire commercial de l’Afrique noire. En 2008, ses échanges commerciaux ont atteint 108 milliards de dollars. Pékin a récemment signé des accords portant sur des milliards de dollars avec la République démocratique du Congo et le Nigeria. Elle construit des routes, des stades et des hôpitaux sur tout le continent.
Contrairement aux Occidentaux, la Chine n’impose pas de conditions politiques en échange de ses investissements. Elle est ainsi devenue un partenaire majeur de pays en froid avec l’Occident, tels que le Soudan, le Zimbabwe ou l’Angola. Elle investit de préférence chez ceux qui possèdent de grandes ressources en matières premières tels que le Soudan, l’Angola, la RDC ou le Gabon. Même dans des pays comme le Bénin qui ne dispose pas de matières premières en abondance, elle est devenue très influente. La France n’est plus le premier partenaire commercial du Bénin, c’est désormais la Chine.
Inquiet de la présence massive de la Chine en Afrique, le Japon a récemment décidé d’investir massivement sur le continent. Pour l’instant, Tokyo est surtout présent dans le domaine de l’aide au développement, notamment dans le secteur de l’agriculture ou dans celui du développement de l’énergie solaire. Voulant diversifier leurs sources de pétrole et devenir moins dépendants du Moyen-Orient en la matière, les Etats-Unis investissent quant à eux dans le golfe de Guinée, au Nigeria, mais aussi en Angola, pays qui fut longtemps leur adversaire politique.
Plus discrète que la Chine, l’Inde est très active sur le continent notamment à travers son importante diaspora présente dans toute l’Afrique anglophone, en particulier en Afrique du Sud, au Nigeria, au Kenya, en Ouganda ou au Malawi. Le cinéma et les séries télé indiennes font un tabac sur le continent noir.
Le Brésil pour sa part Occupe une place croissante dans l’économie de pays tels que l’Angola qui connaît l’une des croissances les plus rapides en Afrique, grâce à la manne pétrolière. Il investit tout particulièrement dans le domaine pétrolier, mais aussi dans celui de la culture.
Même les pays du golfe se sont invités dans la danse, investissant en Afrique du Nord, mais aussi en Afrique noire, notamment au Sénégal. Très présents dans le secteur des télécoms, mais aussi de l’hôtellerie, ils ont récemment obtenu la gestion du port de Dakar jusqu’alors chasse gardée du group français Bolloré. La Libye aussi investit massivement sur tout le continent, de Bamako à Cotonou jusqu’en Afrique australe. Même le Malawi n’est pas épargné par les investissements du colonel Kadhafi.
Il est clair aujourd’hui que l’Afrique «n’a plus besoin de la France», surtout dès lors que le PIB progresse de près de 5% par an depuis une décennie.