Rencontres tous azimuts
Parti pour un week-end prolongé juste après le défilé militaire du 14 juillet, le président français Nicolas Sarkozy n’a eu de véritable entretien bilatéral avec aucun des douze chefs d’État africains présents pour le cinquantième anniversaire des indépendances. « Mais il arrive parfois que des discussions directes puissent s’improviser », explique un habitué. Est-ce alors le traitement de faveur que le président mauritanien, Mohamed Ould Abdelaziz, a obtenu, juste avant la parade sur les Champs-Élysées, si on en croit plusieurs sources ? En revanche, une chose est sûre, le secrétaire général de l’Élysée, Claude Guéant, a aligné les rendez-vous, dont l’un avec François Bozizé. Le président centrafricain a largement optimisé son étape parisienne, puisqu’il a également rencontré ses homologues congolais, Denis Sassou Nguesso, et tchadien, Idriss Déby Itno, le nouveau directeur général de l’Agence française de développement (AFD), Dov Zerah, et le secrétaire général de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF), Abdou Diouf. Ce dernier a eu d’autres entretiens, avec le président togolais, Faure Gnassingbé, et l’homme fort du Niger, Salou Djibo. Quant au président gabonais, Ali Bongo Ondimba, il a abordé la question énergétique avec Henri Proglio, le nouveau PDG du groupe français EDF, en présence de son Monsieur Afrique, Michel Roussin.
La Guinée oubliée
Certes, la Guinée est devenue indépendante en 1958, soit deux ans avant les quatorze autres colonies françaises, qui célèbrent en cette année 2010 le cinquantenaire de leur accession à la souveraineté. Mais était-ce une raison pour ne pas inviter le 14 juillet à Paris une délégation d’anciens combattants guinéens de l’armée française ? Jacques Toubon, chargé de l’opération « 2010, année de l’Afrique », et Hubert Falco, secrétaire d’État français à la Défense et aux Anciens Combattants, y avaient pensé, dit-on, mais l’intendance n’a pas suivi. À Conakry, le président de l’Association des anciens combattants et tirailleurs de Guinée, Diallo Amadou Lamarana, n’a vu venir aucune invitation. Une faute diplomatique qui confortera nombre de Guinéens dans leur sentiment : cinquante-deux ans après, la France n’a toujours pas digéré le « non » de Sékou Touré à de Gaulle.
Grands souvenirs et petits cadeaux
Les douze chefs d’État du continent qui ont déjeuné à l’Élysée, le 13 juillet, ne sont pas repartis les mains vides. Chacun a reçu un petit paquet avec, à l’intérieur, des archives audio et vidéo datant de la période préindépendance de son pays ainsi qu’une lettre du président de l’Institut national de l’audiovisuel français (INA), à l’origine du cadeau. Une copie des documents a été ou doit être par ailleurs remise aux télévisions et aux radios nationales (voir p. 43). L’INA avait même préparé des colis pour les deux absents de ce rendez-vous entre amis, le Malgache Andry Rajoelina – sous sanctions internationales – et l’Ivoirien Laurent Gbagbo – qui a décliné l’invitation.
Paris avait pris les devants
Anticipant d’éventuelles actions des ONG ou une initiative d’un juge d’instruction, le ministère français des Affaires étrangères a pris ses précautions. Il a passé au crible les états de service des 494 soldats africains qui sont venus défiler sur les Champs-Élysées, le 14 juillet. La méthode ? Très simple. Les ambassades de France dans les treize pays concernés ont fait remplir par chaque militaire une demande de visa. Puis les 494 formulaires ont été croisés avec le fichier des personnes recherchées. Et, apparemment, aucun dossier suspect n’a clignoté sur les ordinateurs. Le piquant de l’histoire, c’est que la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH) était informée de la démarche, mais a tout de même adressé, le 12 juillet, à Nicolas Sarkozy, une lettre ouverte lui demandant de « rendre publique la composition des délégations étrangères invitées ». Le coup médiatique était trop tentant…