Prévue le 4 octobre prochain, la rentrée scolaire 2010 pourrait connaître des soubresauts si les revendications des enseignants ne sont pas satisfaites. Dans une interview accordée ce 28 septembre à notre rédaction, le secrétaire général de la Convention nationale des syndicats du secteur éducation (CONASYSED), Fridolin Mvé Messa, indique que la grève pourrait être évitée si le gouvernement accorde ne serait-ce que les postes budgétaires prévus par les accords.
Il s’emblerait que votre coalition menace d’entrer en grève avant la rentrée scolaire pour non satisfaction de certains points contenus dans le cahier des charges déposé sur la table du gouvernement. Est-ce vrai ?
«Je ne peux pas vous dire aujourd’hui que nous entrerons en grève ou que nous n’allons pas le faire, tout dépendra de l’attitude et des agissements du gouvernement. Nous sommes en négociations avec le gouvernement, nous pouvons même dire que les négociations sont terminées. Nous avons déjà signé un protocole d’accord devant le défunt chef de l’Etat, Omar Bongo Ondimba. Il s’agit simplement de l’application du protocole d’accord et de l’acte additionnel parce que nous avons prorogé l’effectivité de certaines mesures, notamment l’attribution des postes budgétaires aux enseignants.
Quels sont les points d’achoppement entre le gouvernement et la CONASYSED ?
Il s’agit d’attribuer plus de 1700 postes budgétaires, parce que nous avons des enseignants qui sont sortis des Ecoles de formation et qui attendent d’être affectés. Notamment de l’Ecole normal de Libreville et de l’Ecole normale des instituteurs de Libreville, Owendo et Franceville. Il y a aussi ceux qui attendent depuis deux ans des affectations, ils n’ont pas encore de poste budgétaire parce que le ministre a pris la décision de ne plus affecter un enseignant qui n’a pas de poste budgétaire. Beaucoup d’enseignants aujourd’hui s’orientent vers la police parce que là-bas, il y a des postes budgétaires qui les attendent. Ça c’est un fait !
Un autre élément est que les engagements pris par le gouvernement de payer la prime incitative à la fonction enseignante (PIFE) n’est pas effective parce que beaucoup d’enseignants aujourd’hui n’ont pas encore touché cette PIFE. Il ya également le problème de bons de caisse. L’Etat avait retenu les bons de caisse des enseignants pour cause de grève. Aujourd’hui, suite à la décision du premier ministre de payer les droits aux enseignants, ces bons de caisse ne sont toujours pas restitués aux enseignants.
A cela s’ajoute le problème de vacations 2009-2010 et même celles de 2008-2009 qui ne sont pas encore payées. Les examens sont terminés, pourtant beaucoup d’enseignants n’ont pas encore touché leurs vacations. Il y a également le problème de rappels. Tous ces problèmes réunis font planer le risque d’un blocage en début d’année. Mais il revient au gouvernement de nous montrer le contraire, de montrer sa bonne foi de vouloir régler le problème afin que nous ne puissions envisager d’entrer en grève. Il faut dire que le risque est grand, parce qu’à côté de ces problèmes que je viens de citer, il y a que l’Etat s’est engagé à équiper les établissements en bibliothèque. À l’heure où je vous parle, aucune bibliothèque n’est équipée, aucun kit informatique n’a été acheté, ce qui prouve suffisamment qu’il y a un risque d’entrer en grève. Mais je ne sais pas si le gouvernement va empêcher l’effectivité d’une grève.
Quelle est la réponse du gouvernement ?
Nous n’avons pas encore la réaction du gouvernement, nous avons écrit au premier ministre au mois de juillet pour appeler son attention. Aujourd’hui nous n’avons pas encore eu sa réponse. Nous étions en plein mois de juillet, nous avons demandé au gouvernement de prendre toute la période de vacances pour régler les problèmes. Demain nous aurons un point de presse ici au siège du syndicat, nous allons dénoncer ces choses-là et nous allons espérer que d’ici vendredi, samedi ou dimanche, le gouvernement nous appellera pour nous dire effectivement ce qu’il compte faire pour que ces préalables soient effectivement régularisés avant l’arrivée des cours.
Il semble que vous contestez également les nominations faites par le ministre de l’Education nationale.
Le ministre n’est pas habilité à nommer les hauts fonctionnaires de l’Education nationale, cette prérogative revient au président de la République qui peut effectivement donner une partie de ces prérogatives au Premier ministre. Il n’y a donc que deux personnes qui sont habilités à nommer : le président de la République et le premier ministre, par décret pris en conseil des ministres ou par le Président. Voilà le mode de désignation des responsables, mais aujourd’hui le ministre a pris une décision. Nous ne savons même pas si cela est une décision, une circulaire ou un arrêté, nous ne savons pas.
Le papier qu’il a publié dans Gabon Matin ne comporte pas de cachet, de numéro, ou le titre de l’acte dont il est question donc, autant de questions qui montrent que le document sorti ne vaut rien. Parce que le ministre n’est pas la personne habilité à procéder à une nomination. Lui, il a pour mission de faire des propositions au président qui peut les entériner ou non. Là, il met le gouvernement dans une situation difficile, car il a déjà publié ses nominations. Il souhaite que le gouvernement entérine ces propositions, or le premier ministre peut trouver à redire. Il s’arroge des prérogatives qui ne sont pas siennes. Nous récusons donc ces nominations parce qu’elles ne sont pas valables.
Y a-t-il un minima à satisfaire pour éviter la grève ? Si oui lequel ?
Nous ne sommes pas là pour bloquer les choses inutilement, nous voulons simplement que le ministère nous dise que s’agissant du poste budgétaire, les enseignants seront affectés, parce que nous avons trois promotions d’enseignants qui attendent d’être affectés. S’il nous dit que les collègues qui ont été formés seront affectés et qu’ils ont déjà leurs postes budgétaires, ce sera un soulagement pour les enseignants qui attendent leur titularisation. S’il nous dit que les enseignants qui attendent les intégrations qui sont sur bulletin rose, qui souhaitent passer sur bulletin bleu auront leur bulletin bleu en septembre ou à la fin du mois d’octobre, ce sera déjà un pas. S’il nous rassure également que les salaires bloqués des enseignants seront payés, ce sera une avancée. Nous voulons que le ministère montre la bonne foi en réglant les problèmes pour que nous puissions réviser notre attitude. Mais si le gouvernement ne fait pas d’efforts, nous non plus, nous n’en ferrons.»