Le trajet de cet animal emblématique a été suivi pour la première fois par des balises.
Mais où vont les tortues luths lorsqu’elles quittent les côtes du Gabon, un des hauts lieux de leur reproduction? En plaçant des petits émetteurs sur 25 femelles, des chercheurs de l’université d’Exeter, dans le sud-ouest de l’Angleterre, ont ainsi pu découvrir les routes empruntées par ces monstres marins dont certains traversent l’océan jusqu’en Amérique du Sud, pouvant ainsi parcourir plus de 7000 kilomètres!
Elles vont se nourrir durant ces incroyables périples et reconstituer leurs réserves avant de revenir au bout de deux, trois, voire cinq ans sur les lieux de pontes. Trois grandes routes migratoires ont été empruntées par ces tortues: la première les emmène au centre de l’Atlantique entre l’Afrique centrale et le Brésil, une autre les conduit très au sud au-delà du cap de Bonne-Espérance et enfin, la plus longue, les emmène jusqu’en Amérique du Sud. «Nous ne savons pas ce qui influence ce choix», explique Matthew Wit, l’un des chercheurs de l’université britannique, «mais nous savons que ce sont des voyages incroyables».
Déclin rapide
L’intérêt de telles recherches est de permettre une meilleure organisation de leur protection. Les populations de tortues luths qui sont les plus grandes parmi les espèces de tortues marines – elles pèsent 500kg en moyenne et peuvent mesurer jusqu’à deux mètres – sont inscrites sur la liste rouge de l’IUCN (International Union of Conservation of Nature).
«Dans l’océan Pacifique, leur population a connu un déclin très rapide sans que l’on voie aucun signe de rebond», précise en effet l’étude publiée mercredi dans la revue Proceedings B de la Royal Society. «La population de l’Atlantique Nord a connu des évolutions variables: certaines décroissent, d’autres sont stables, d’autres augmentent», précisent encore les scientifiques. Quant à la population des tortues de l’Atlantique Sud qui se reproduisent sur un territoire centré sur le Gabon, «leur évolution reste incertaine», soulignent les chercheurs. Cette population est l’une des plus importantes au monde puisque près de 40.000 femelles ont été recensées.
La principale cause du déclin constaté dans le Pacifique pourrait être la pêche. Un constat inquiétant pour les scientifiques sachant que les tortues qui traversent l’Atlantique croisent également les chalutiers. «Toutes les routes empruntées par les tortues luths les entraînent dans des secteurs très risqués en termes de pêche, la population de l’Atlantique est réellement en danger», estime à son tour Brendan Godley, qui a également participé à la publication. Cette nouvelle étude pourrait donc apporter de précieux renseignements pour élaborer des stratégies de conservation.