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Gabon : André Mba Obame le Président élu s’explique

Dans une interview «exclusive» publiée le 21 février par le bimensuel gabonais « Nku’u le messager », André Mba Obame l’autre Président élu , le secrétaire exécutif de l’Union nationale (UN, opposition) qui s’est autoproclamé président du Gabon et réfugié depuis le 25 janvier au siège du PNUD à Libreville, explique les motivations de son esclandre, justifie sa participation aux législatives partielles de juin dernier et laisse entrevoir sa position quant au dialogue de sortie de crise invoqué par différents acteurs politiques Gabonais.

Quinze mois après l’élection présidentielle anticipée du 30 août 2009, qu’est-ce qui justifie l’acte que vous avez posé le 25 janvier 2011, quelle en était, surtout, l’opportunité?

Je n’ai jamais reconnu la victoire de Monsieur Ali Bongo Ondimba. J’ai toujours affirmé, avec d’autres candidats, que les résultats publiés n’étaient pas sincères, et n’ai eu de cesse, comme principale revendication, de réclamer le recomptage des voix sur la base de la confrontation des procès verbaux. Ce à quoi, se sont toujours opposés, le candidat du PDG, la CENAP et la Cour constitutionnelle. J’ai promis au peuple gabonais que je ferai tout ce qui est de mon pouvoir pour que son vote soit respecté. C’est le combat que je mène, en tant que président élu, avec l’appui massif des Gabonaises et Gabonais.

Pourquoi avoir attendu si longtemps?

Dès le 3 septembre 2009, les ingrédients du coup d’Etat électoral étaient réunis. Alors que la CENAP était en plénière, aux fins d’approuver définitivement les résultats, et ce, conformément aux dispositions du Code électoral, le ministre de l’Intérieur, précédé par des «bérets rouges», a fait irruption dans la salle des délibérations pour lire des résultats concoctés par ses services et qui donnaient la victoire à Monsieur Ali Bongo Ondimba.

C’est le lieu de rappeler ici que la compilation des résultats par l’assemblée plénière de la CENAP, seule instance de décision en période électorale, n’était pas encore terminée au moment de cette intervention du ministre de l’Intérieur. Malgré cette forfaiture annoncée, le vainqueur de l’élection que je suis privilégia néanmoins la voie de la légalité républicaine, quoique convaincu de la partialité de toutes les institutions chargées de gérer la transition, et particulièrement la Cour constitutionnelle. Cette dernière ayant validé le coup d’Etat électoral, j’ai, avec d’autres candidats, pris la ferme position de ne jamais trahir le peuple gabonais en reconnaissant Ali Bongo Ondimba comme président de la République.

Nous insistons, pourquoi avoir attendu si longtemps ?

La position que je viens d’exprimer est restée constante. Elle est depuis renforcée par la survenance des faits nouveaux. Il s’agit de la diffusion par la chaîne publique de télévision France 2, d’un documentaire financé par les institutions publiques françaises dans lequel des personnalités introduites dans le secret des princes ont clairement indiqué que c’est moi, André Mba Obame, qui ai gagné l’élection présidentielle du 30 août 2009.

A cela s’ajoutent les révélations du site WikiLeaks, notamment la dépêche n°1473 dans laquelle, l’Ambassadeur des Etats-Unis en France recommande à Mme la Secrétaire d’Etat Hillary Clinton, de conseiller le président Barak Obama de ne pas reconnaître Monsieur Ali Bongo Ondimba comme vainqueur de l’élection présidentielle; les résultats ayant été inversés au détriment de monsieur André Mba Obame, le président réellement élu par le peuple gabonais.

Au demeurant, du point de vue juridique, il s’agit là de deux faits nouveaux qui permettent de rouvrir le débat sur le contentieux électoral de 2009. Faut-il rappeler qu’en la matière, il n’y a aucune prescription. De ce fait, rien ne m’interdit de saisir d’autres juridictions compétentes, à l’étranger notamment, aux fins de constater la pertinence de ces faits nouveaux, et de contester alors la décision de la Cour constitutionnelle gabonaise. C’est d’ailleurs le sens donné à la saisine, par des avocats commis par moi. C’est aussi le sens des consultations des responsables politiques africains et occidentaux que j’ai rencontrés durant mon récent séjour hors du Gabon.

Si tel est alors le cas, pourquoi vous vous êtes présenté aux élections législatives partielles du 8 juin 2010?

Je me suis présenté à ces élections législatives partielles par respect pour mes électeurs et pour confirmer mon mandat. Il faut savoir que cette élection était la conséquence de mon exclusion du Parti démocratique gabonais (PDG) sous les couleurs duquel j’avais été élu député en 2006. Il s’agissait de démontrer à ce parti que mon charisme et ma personne étaient le socle de mon mandat, et non mon appartenance au PDG.

Que signifie pour vous la main tendue, et comment entrevoyez-vous l’issue de la crise politique qui s’est installée au Gabon depuis lors, même si d’aucuns estiment qu’il n’y a pas de crise. Autrement dit, si jamais des négociations s’engageaient entre vous et le pouvoir en place, quelles formes pourront prendre ces négociations, quelles sont vos préalables, et sur quels points entendez-vous les engager?

Lors de ma prestation de serment, j’ai pris l’engagement solennel de faire respecter le choix massif effectué par le peuple gabonais le 30 août 2009 en faveur du changement. Nous avons tous l’obligation de prendre en compte la soif de liberté croissante des Gabonais et leur désir d’avoir un gouvernement représentatif.

Car, on ne peut exercer indéfiniment le pouvoir par la force. Tout cela passe, incontestablement, par le rétablissement de la vérité des urnes de l’élection présidentielle du 30 août 2009. Toute autre démarche ne fait pas partie de notre agenda. Persuadés de ce que nous sommes, nous viendrons à bout du pouvoir illégitime. Car des changements véritables comme celui pour lequel nous luttons se produiront parce que des citoyens se rassembleront et exerceront leur force morale sur une situation donnée. Nous y sommes !

Pourquoi avoir demandé la protection des Nations-Unies?

Suite à l’acte historique posé à travers la prestation de serment et la mise en place du gouvernement légitime, il était indispensable de tout mettre en œuvre pour éviter que le problème politique posé soit étouffé dans l’œuf par le pouvoir illégitime en portant atteinte à l’intégrité physique et morale des acteurs principaux de la restauration de ma victoire. Il s’agissait aussi d’impliquer la communauté internationale dans le règlement de la crise politique gabonaise, les arbitres intérieurs s’étant disqualifiés.

Interview réalisée par F. Bounda du bimensuel « Nku’u le messager »

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