Le Président de la République Gabonaise, Ali Bongo Ondimba, a annoncé le 14 avril dernier « la création immédiate d’une unité militaire de 240 hommes au sein de l’Agence Nationale des Parcs Nationaux (ANPN); baptisée « la brigade de la jungle ».
Selon le communiqué rendu public, « cette unité aura pour mission de sécuriser les parcs du Gabon et de protéger la faune et la flore sauvage, notamment contre le braconnage et le trafic illégal d’ivoire ».
Cette mesure fait suite à la découverte, le 6 avril dernier par des agents de l’ANPN, d’une trentaine de carcasses d’éléphants de forêt qui sembleraient avoir été tués récemment dans la réserve de Wongo Wongué, à une centaine de kilomètres au sud de la capitale Libreville.
Le Gabon avait déjà pris en mars de cette année la décision de classer l’éléphant de forêt comme espèce « intégralement protégée » en raison d’un niveau de braconnage jamais atteint jusqu’à présent.
L’éléphant de forêt d’Afrique – Loxodonta cyclotis – désormais reconnu comme une espèce biologique distincte de son cousin des savanes, réside dans les forêts d’Afrique Centrale et de l’Ouest. Il se caractérise par des oreilles généralement plus petites et plus circulaires que l’espèce des savanes et possède des défenses plus minces et plus droites. L’ivoire légèrement rosé de ses défenses a également un grain de meilleure qualité que celui de l’éléphant des savanes, ce qui en fait une proie de choix pour les braconniers.
DECOUVERTE D’UNE TRENTAINE D’ELEPHANTS MASSACRES DANS UNE RESERVE
Le 6 avril dernier, lors d’un survol de la réserve de Wonga Wongué, qui était encore récemment l’un des derniers refuges où les éléphants de forêt pouvaient circuler librement, le Directeur technique de l’ANPN Mike Fay et le conservateur de la réserve Norbert Pradel, ont dénombré plus de 30 carcasses d’éléphants tués récemment.
« Nous avons découvert un corps, puis un autre, et encore un autre, et en quelques minutes nous avons réalisé que quelque chose de grave s’était passé » a indiqué Mike Fay, qui a été un des acteurs clés dans la création du réseau des parcs nationaux du Gabon en 2002, en révélant l’extraordinaire beauté du patrimoine naturel du Gabon à l’ancien Président Omar Bongo Ondimba. Mike Fay a acquis une renommée internationale avec le récit de sa traversée à pied de l’Afrique Centrale, diffusée par National Geographic sous le titre de « Megatransect ».
« Nous avons alors décidé de contrôler la zone et en à peine une heure nous avons découvert 28 carcasses d’éléphants, tous massacrés ces derniers mois. La réserve de Wonga Wongué est en grande partie recouverte de forêt. Nous ne pouvons donc pas savoir le nombre exact d’éléphants tués mais nous sommes certains que ce niveau de braconnage est sans précédent dans l’histoire du Gabon. Ce n’est pas un acte isolé. Nous constatons actuellement une croissance exponentielle du nombre d’éléphants braconnés à travers le pays ».
UNE ESPECE EN DANGER
Au cours des trente dernières années, la grande majorité de la population des éléphants de forêt a été massacrée à cause du trafic illégal d’ivoire. En République Démocratique du Congo, la population a chuté de près de 500 000 individus à moins de 12 000 aujourd’hui.
Le Gabon et le nord du Congo constituent aujourd’hui le dernier refuge pour cette espèce. Les derniers événements confirment cependant la crainte de nombreux observateurs qu’une bataille décisive pour la survie de l’espèce vient de s’engager.
Le professeur Lee White, citoyen gabonais d’origine britannique, qui a été nommé à la tête de l’ANPN en 2009 par le Président Ali Bongo Ondimba, indique que « les dernières observations tendent à prouver que des bandes criminelles organisées pénètrent de plus en plus en profondeur au Gabon et massacrent des éléphants au sein même des forêts les plus reculées que compte encore le continent africain. Selon nos renseignements, la plupart des braconniers viennent de l’extérieur du Gabon et sont équipés avec les nombreuses armes encore en circulation dans la région suite aux guerres civiles qui ont déstabilisé l’Afrique centrale. Nos gardes sont eux en sous-effectif et sous-armés. Sans actions décisives de la part des dirigeants politiques gabonais, nous allons perdre la bataille de la protection des éléphants de forêt et, tout comme nous avons pu le constater ailleurs, cela marquera le début de la fin pour de nombreuses espèces des forêts tropicales. »
LE GABON ASSUME SES RESPONSABILITES
Le marché de l’ivoire connaît actuellement une croissance exponentielle. Une défense d’éléphant peut actuellement être négociée sur le marché noir jusqu’à 50 000 dollars. Les trafiquants arrivent à dégager des marges importantes en achetant aux braconniers le kilo d’ivoire aux environs de 50 dollars pour le revendre à près de 2 000 dollars sur les marchés asiatiques.
Le Président gabonais a tenu à souligner le fait que « la protection de la biodiversité et de l’environnement est le grand défi de notre époque. Si nous perdons nos éléphants, nous serons confrontés à la même spirale qui a amené à la disparition d’espèces animales et à la destruction de l’environnement dans d’autres pays africains, avec pour conséquences inévitables l’instabilité politique et le dysfonctionnement de nos écosystèmes au sein desquels l’homme ne peut plus vivre durablement en harmonie avec la nature. »
« Aujourd’hui, j’ai ordonné la création d’une unité militaire d’élite pour soutenir l’ANPN dans sa mission primordiale de protéger nos richesses naturelles. Cette décision est la preuve de l’engagement de mon gouvernement envers la politique du Gabon Vert et de la gestion de nos parcs nationaux comme un trésor à la fois pour le Gabon et pour le reste du monde. Je demande également aux pays importateurs d’ivoire, particulièrement en Asie, de prendre les mesures nécessaires à leur niveau dans la lutte contre le trafic d’ivoire tout comme le Gabon le fait aujourd’hui, et d’informer leurs ressortissants que l’achat d’ivoire sera réprimé avec la plus grande sévérité. Les trafiquants d’Ivoire travaillent de manière coordonnée au niveau international. Nous devons faire de même pour les combattre. Le Gabon ne peut résoudre seul ce problème ».
Texte et auteur: presidentalibongo.com