Plus de 100 personnes ont été tuées en 48 heures à Nalout et Yefren, deux villes au sud-ouest de Tripoli pilonnées par les forces loyales à Mouammar Kadhafi, selon des habitants de cette région que des milliers de Libyens ont déjà fui pour se réfugier en Tunisie.
Un millier de personnes ont par ailleurs péri en six semaines à Misrata (200 km à l’est de Tripoli), selon des sources médicales, alors que l’ONU a reçu l’autorisation du gouvernement libyen pour y envoyer une mission humanitaire.
Au sud-ouest de Tripoli, les forces loyalistes ont pilonné intensivement lundi la région d’Al-Jabal Al-Gharbi contrôlée en grande partie par la rébellion, selon des habitants.
« Les bataillons de Kadhafi n’ont pas arrêté le pilonnage de la région, surtout Yefren et Nalout, avec des roquettes Grad. Il y a eu 110 morts parmi les rebelles et les civils dans ces deux villes », a déclaré à l’AFP un habitant de Yefren sous couvert de l’anonymat.
Un résident de Nalout, localité proche de la frontière tunisienne, a indiqué que les forces pro-Kadhafi étaient « en train de perpétrer un massacre » dans cette région montagneuse, faisant état d’au « moins 100 morts en deux jours ».
« Ils tirent aveuglement des roquettes Grad sur les habitations, les hôpitaux. Plusieurs familles ont fui vers la Tunisie », a-t-il ajouté.
Un autre témoin dans la petite ville de Ghazaya (nord-ouest de Nalout) évoque des combats incessants à la mitrailleuse lourde et aux roquettes depuis dimanche soir.
Selon lui, « les rebelles avancent de plusieurs côtés autour de Ghazaya, encerclant les forces pro-Kadhafi et les empêchant de quitter la ville ».
Environ 3.000 Libyens ont fui samedi les montagnes de l’Ouest pour rejoindre la Tunisie, selon le Haut commissariat de l’ONU aux réfugiés.
Dans la ville assiégée de Misrata, le bilan des victimes s’alourdissait et la situation humanitaire restait inquiétante.
Mais l’ONU a reçu l’autorisation du gouvernement de Mouammar Kadhafi d’y envoyer une mission du Bureau de coordination des affaires humanitaires de l’ONU, a dit Stephanie Bunker, porte-parole de l’ONU pour les affaires humanitaires.
Tripoli a d’autre part garanti « un passage sûr » à des équipes internationales humanitaires dans les zones qu’il contrôle.
Auparavant, le secrétaire d’Etat britannique pour le développement international Andrew Mitchell avait déclaré à la BBC que la situation à Misrata s’était « sérieusement détériorée ces derniers jours. 5.000 travailleurs étrangers pauvres sont bloqués sur un quai. Des explosions ont lieu à quelque 300 mètres de là ».
Il a annoncé que son pays allait évacuer par la mer, via l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), 5.000 travailleurs étrangers qui y sont bloqués.
Lundi, l’OIM a secouru près de 1.000 migrants, arrivés dans la soirée à Benghazi, et le Comité international de la Croix-Rouge en a évacué 618 autres, par la mer, seule porte sur l’extérieur.
Dans la journée, les pilonnages soutenus ont secoué la ville, survolée par des appareils de l’Otan.
Tard lundi soir, deux grosses explosions ont été entendues de la zone du port d’où s’élevaient des colonnes de fumée. Il pourrait s’agir de tirs de roquettes sur le port, selon un journaliste de l’AFP.
Lundi, 10 personnes ont été tuées et 54 blessées, selon des sources médicales.
En six semaines, un millier de personnes ont péri à Misrata et 3.000 ont été blessées, selon des sources médicales.
« Quatre-vingts pour cent des morts sont des civils », estime l’administrateur de l’hôpital de Misrata, le Dr Khaled Abou Falgha.
Ce bilan n’a pas pu être confirmé auprès d’autres sources. Selon Human Rights Watch, citant des sources médicales à Misrata, à la date du 15 avril, 267 corps avaient été amenés dans les morgues de la ville, mais « le nombre de morts est plus élevé ».
L’hôpital a enregistré une augmentation du nombre de civils blessés par des balles à haute vélocité tirées par des snipers et provoquant des blessures dont les séquelles sont souvent irréversibles.
Le Dr Mouqtar a également constaté, depuis la semaine dernière, de graves blessures causées par des bombes à sous-munitions, interdites par une convention internationale mais que les forces pro-Kadhafi emploient depuis jeudi, selon les rebelles et HRW.
Sur le front Est, à Ajdabiya, les combats se poursuivaient, et l’agence officielle Jana a fait état de nouveaux raids de l’Otan sur Al-Aziziyeh (sud de Tripoli).
Lors de ses 145 sorties dimanche, l’Alliance affirme avoir notamment détruit sept bunkers de munitions près de Tripoli, quatre radars de défense aérienne près de Misrata, et quatre lanceurs près de Zenten (ouest).
Le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon a appelé lundi à un cessez-le-feu réel en Libye, soulignant que c’était l’un des trois objectifs de l’ONU, avec l’extension de l’aide humanitaire, et la poursuite du « dialogue politique et la recherche d’une solution politique ».
Le leader de la rebellion, l’ancien ministre de la Justice Moustafa Abdel Jalil, est attendu mardi à Rome, l’ancienne puissance coloniale, où il doit rencontrer le Premier ministre Silvio Berlusconi, qui a reconnu l’opposition.
Le Premier ministre britannique David Cameron a répété qu’il n’était « pas question d’une invasion ou d’une occupation », alors que le président de la commission des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale française, Axel Poniatowski, réclamait à l’Otan l’envoi de forces spéciales au sol pour éviter un « enlisement ».
Par AFP